Les 10 tendances de la communication digitale pour 2020

Par Élodie C. le 27/09/2019 - Agence : Brainsonic

Temps de lecture : 21 min

Le playback pour tous ?

Autrefois timides ou indifférentes, les marques n’hésitent plus à s’engager et communiquer sur ces engagements : RSE, lutte contre les inégalités, digital detox, transparence et quête de sens, les derniers mois ont drainé de multiples enjeux pour les marques et annonceurs. Des enjeux qui ont imprégné la création publicitaire tout au long de l’année et ont trusté les cérémonies de récompenses.

Ces tendances appellent les marques à une nouvelle manière de communiquer autour de leur identité. Comment s’articule-t-elle à l’heure du tout connecté et du multi-écran où tout se consomme massivement, et si possible rapidement ? Quelle sera l’innovation, l’usage ou l’approche qui fera la communication de demain ? Nous avons interrogé différent(e)s dirigeant(e)s du secteur pour découvrir ce qui sera, selon eux, la prochaine tendance de communication digitale à venir.

1- L’émergence de nouvelles plateformes conversationnelles

Cela ne vous aura pas échappé, aux côtés des mastodontes du web, Facebook et Google (avec YouTube), de nouvelles plateformes ont émergé créant de nouveaux usages pour les consommateurs, et donc de nouveaux enjeux pour les marques. TikTok, Twitch, Discord et évidemment Fortnite tentent de rebattre les cartes de la communication digitale.

Face au ralentissement de Facebook, d’autres plateformes nouvelles et anciennes vont prendre le relais conversationnel, boostés par l’usage des plus jeunes, prédit Arthur Kannas, directeur général et co-fondateur de l’agence Heaven. Youtube, Twitch, TikTok, Discord et même Fortnite deviennent de nouveaux carrefours cette fois-ci centrés sur l’usage vidéo, audio ou jeu vidéo. On notera que Twitter est toujours là, avec des spécificités en termes d’usage et de cible.” Sur ces nouvelles plateformes, “les commentaires et les conversations y prolifèrent, en mode texte. En audio également. Comment saisir le potentiel de ces conversations éphémères ou archivées ?”, questionne-t-il.

L’engagement (et le reach) des médias sociaux en pleine mutation, ce qui représente autant une opportunité qu’un défi pour les marques. Julien Ferrand, directeur conseil chez Intuiti, y voit d’ailleurs une “tendance de fond” observée depuis 18 mois. Si “l’évolution des algorithmes des plateformes” est pointée du doigt, lorsque Facebook ou Google éternue, c’est tout internet qui se mouche, “l’impact direct est une diminution des taux d’engagement des pages de marques, diminution qui atteint progressivement les influenceurs, jusqu’alors stars de l’engagement, relève-t-il. Pour contrebalancer cette baisse de reach, les pages postent plus de contenus… sans voir l’engagement augmenter. “Dans ce contexte, de lassitude de discours trop marketés, d’infobésité et d’enjeux de préservation de la vie privée, les communautés se désengagent et migrent vers des plateformes plus privées, explique encore Julien Ferrand. Si la notion de stratégie de contenu social media tend à se démocratiser chez les annonceurs, le futur des réseaux sociaux ne se fera pas sans réaction à ces nouvelles tendances !”

D’autant que de l’autre côté, une certaine plateforme explose grâce à ses fonctionnalités et usages singuliers.

Ce qui fait dire à Mathieu Flaig, directeur général et co-fondateur du cabinet-conseil SYSK, que “TikTok volera la vedette à Instagram en 2020”. En effet, comme il le rappelle, le réseau social chinois, autrefois Musical.ly, “a connu une croissance depuis 2 ans comme aucun réseau social jusqu’ici (le champion étant avant lui était Instagram). Avec plus de 500 millions d’utilisateurs actifs dont 4 millions en France en 2 ans, il a initialement mis en place une stratégie très agressive de recrutement (via des millions de $ dépensés en publicité chez ses concurrents).” Aujourd’hui, la plateforme se monétise et “fournit désormais aux annonceurs une plateforme solide et puissante : des formats publicitaires in-feed comme sur Instagram, des influenceurs multiples, et des chiffres d’engagement très au-dessus de ce que l’on observe habituellement, rappelle-t-il. Avec un Instagram, dont les influenceurs sont remis en question, où les « likes » pourraient être cachés et où l’engagement est en baisse, et un Snapchat qui renoue tout juste avec la croissance (+ 13 millions de nouveaux utilisateurs quotidiens en trois mois, NDLR), il y a fort à parier que 2020 sera l’année de TikTok« .

2. Plus de data = plus de créa

À mesure que l’engagement et le reach patinent, on observe un retour de la création publicitaire, après des années d’optimisation de la data. Plus qu’un retour, Jean Allary, partner et Head of Strategic Planning chez Artefact, y voit “un besoin de création publicitaire dans le digital. Plus on est sophistiqué dans le marketing digital – avec la data, la personnalisation, etc. et l’abandon total des mécaniques de marketing de masse – plus on segmente les messages, les médias, les groupes de cibles, et plus on a tendance à croire que le média commande la création : c’est-à-dire, le bon endroit au bon moment aux bonnes personnes.

Pour lui, il est désormais nécessaire d’allier le meilleur de la création publicitaire et du marketing ultra personnalisé : “De manière générale – et Artefact balaie devant sa porte sur ce sujet-là -, plus le marketing est sophistiqué, plus il est peut devenir inefficace d’un point de vue rentabilité : l’argent que vous gagnez en performance de taux de clic n’est pas absorbé par le temps nécessaire à la personnalisation. Parfois, le meilleur ROI vient d’un bon vieux message interruptif qui fait rigoler les Français.” Et c’est là que la créa entre en scène, “qu’elle soit personnalisée ou non en aval”. “Le but du jeu de la pub est tout de même d’être remarquée et d’apparaître dans les parcours consommateurs de manière pas tout à fait seamless. Si votre pub fait partie du décor, ce n’est certainement pas une qualité”, estime-t-il.

Et les annonceurs semblent désormais s’en rendre compte, “cela va susciter une deuxième jeunesse pour la création publicitaire qui va, à la faveur des vieilles recettes, réintroduire dans le marketing, même très personnalisé, de bonnes vieilles tactiques d’impact, de mémorisation, etc. pour faire en sorte de conjuguer la sophistication du marketing digital à la “sophistication” des techniques d’interruption publicitaire classiques pour véritablement allier meilleur des deux mondes », parie Jean Allary.

Exemple est donné avec l’un des clients d’Artefact, Fisher Price : “Le challenge d’un point de vue média est de trouver des mamans de 0 à 2 ans avec, dans le lot, des primipares, rappelle le co-fondateur d’Artefact. Les autres contacts médias – grands-parents, mamans avec des enfants plus âgés, etc. – sont moins prioritaires. Toute la création publicitaire (haut ou bas de parcours) de Fisher Price part d’une idée de marque forte : l’éducation par le jeu doit être ludique, pas une reconstitution anxiogène d’un monde pour mini-adultes. »

Cette idée forte donne des films très branding qui visent à créer de l’interruption, précise-t-il. Ensuite, on déroule le fil via des petits formats à la performance lors du parcours client, du retargeting, du content ad hoc sur Amazon, des emailing ad hoc dans le CRM, etc. Il y a donc une cohérence et une intégration des messages autour de cette idée publicitaire forte, mais qui serait moins efficace sans idées fortes autour de la proposition de valeurs de Fisher Price aux mamans par rapport à la concurrence.

Data et créa peuvent (doivent ?) faire bon ménage, malgré les réticences de deux mondes que tout semble opposer, comme le confirme Jean Allary : “Il peut y avoir de la défiance entre les personnes très “digital” et les publicitaires, au-delà du décalage générationnel, mais en réalité il n’y a rien de plus efficace que de s’aimer et tirer le meilleur des deux savoir-faire pour concevoir des dispositifs à la fois pertinents, modernes et efficaces.

Depuis dix ans, de nouvelles solutions technologiques et digitales ont permis de “renouveler le storytelling des marques”, estime Paul Gruber, Chief creative officer (CCO) chez Mazarine. “Ce flux permanent et hyperactif – source inouïe de créativité – peut nous détourner de l’élément crucial de toute communication digitale : la technologie doit sublimer la création pour révéler la juste émotion. » Et donc ne pas “commander” à la création ? “Aujourd’hui, la production de contenus a atteint un tel volume – notamment sur les réseaux sociaux – qu’elle s’est uniformisée jusqu’à un point de rupture : les contenus écument les mêmes recettes, et les marques perdent leur singularité. Les plateformes web et e-commerce sont aussi concernées par cette standardisation de l’expérience client.” Les mêmes recettes éculées et éprouvées – mais qui ont fait leur preuve – tendant donc à uniformiser les contenus et la création. Paul Gruber y voit “l’enjeu de demain” pour une agence créative et technologique : “Mettre l’innovation au service de l’identité des marques. Qu’elles soient vocales, sociales, interactives, web ou augmentées, la maîtrise des technologies passe par une exigence toujours plus forte de craft et de sens. La seule alliance pour que l’émotion reste le cœur d’expression des marques. »

Il en veut pour preuve Apple, qui a proposé un parcours interactif d’art en réalité augmentée à Paris cet été, en partenariat avec le New Museum de NYC. “Les créations réalisées par des artistes à la renommée internationale, et que l’iPhone a rendu accessible facilement, ont donné un nouveau souffle au parcours expérientiel de la marque, estime-t-il. Ce type d’initiatives artistiques ouvrent une nouvelle voie d’expressions digitales, et devraient se multiplier dans les mois à venir. »

Un avis partagé par Benoit Bertrand, Head of strategy chez Isobar, pour qui l’expérience client sera le “grand défi à venir pour le digital” : “Dans un contexte de digitalisation des usages, l’expérience est devenue un facteur majeur de compétitivité entre les entreprises. En nourrissant l’engagement et la fidélité, elle est un levier de croissance central pour beaucoup d’acteurs », affirme-t-il.

Les entreprises fondent toutes sur les solutions technologiques qui fluidifient ces expériences (réalité augmentée, app, VR), “mais en faisant cela, on est en train de faire de l’expérience client une commodité, une banalité”, prévient Benoit Bertrand. Les parcours sont les mêmes, les technologies sont les mêmes, la marque et tout ce qui fait sa singularité se diluent dans le fonctionnel, jusqu’à disparaître.

Pour lui, cette uniformisation de l’usage des technologies est “un réel point d’alerte et un challenge” pour les marques qui ne se solutionnera que par “la créativité et l’hybridation entre la culture de la marque et celle de la technologie.” C’est ce qu’on appelle chez Isobar, la Creative Experience, explique-t-il. C’est-à-dire la capacité à bâtir des expériences mémorables, utilisant la technologie pour imaginer des produits ou des services qui créent de la valeur, portés par un storytelling puissant”. Ce que l’agence a imaginé avec le Jet Lag Social Club (Flying Blue).

3. La monétisation des messageries instantanées, devenues centrales

Pour Arthur Kannas, directeur général et co-fondateur de l’agence Heaven, la prochaine tendance de la communication digitale sera la « Messengerisation » des plateformes sociales existantes. Quésaco ? “Facebook part à la conquête de la monétisation des conversations privées. C’est devenu une tendance confirmée par M. Zuckerberg : la croissance des interactions sur la plateforme s’observe désormais à travers les échanges privés, via les messageries et les groupes, à l’inverse d’un désengagement sur les flux publics.” En effet, ces conversations sous les radars sont devenues un enjeu de taille pour Facebook puisque le dark social représente désormais la majorité des contenus partagés en ligne, d’après une récente étude.

L’année 2018 ayant été un tournant majeur pour l’image de Facebook, c’est le moment de consacrer ses efforts sur d’autres terrains que les flux aux contenus publics coûteux à maîtriser et aux publicités coûteuses à vérifier, explique-t-il. Sur le modèle chinois WeChat, Facebook va profiter de cette situation pour rapprocher ses messageries Instagram, Messenger, WhatsApp et ainsi constituer un nouveau colosse aux sources de revenus plus diversifiées (commerce, transaction, abonnement, monnaie avec Libra) que la seule publicité. Ce rapprochement sera tout autant un terrain d’opportunités transactionnelles et conversationnelles pour les marques qu’un “rempart à un risque de démantèlement sur fond de monopole aux US », prédit Arthur Kannas.

Avec la monétisation des plateformes, Julien Ferrand voit l’occasion pour les annonceurs de passer “d’un rôle de fournisseur de produits à celui d’un fournisseur de services. » Il s’agit par exemple de “mettre à disposition un numéro Whatsapp pour accéder à un conseil ultra personnalisé. C’est ce qu’a fait Hellsmann’s avec Whatscook », rappelle-t-il. La marque est ainsi passée de fabricant de mayonnaise à coach cuisinier. “Une belle proposition de service”, estime-t-il. Comme au printemps dernier, où Fitbit, spécialiste de la montre-coach connectée, a proposé des programmes de fitness directement intégrés dans un chatbot avec le soutien du média Jam.

Chacun de ces services permet également de collecter des informations sur les habitudes et attentes des utilisateurs, précise le directeur conseil d’Intuiti. Et c’est bien là le nerf de la guerre puisqu’on ne peut pas concevoir une proposition de service pertinente sans une connaissance aigüe de son user.”

Les enjeux des marques sur les réseaux sociaux pourraient se résumer à d’être intéressant avant d’être intéressé, rendre sa marque utile et explorer des nouveaux business models (du produit vers le service) selon lui.

4. Cliquer propre

L’année passée nous l’a montré, les enjeux sociétaux se superposent à ceux des entreprises. “Avec 2% des émissions mondiales de CO2 – soit plus que le transport aérien – nos activités digitales sont passées de la promesse d’un monde plus vert à l’angoisse d’une contribution effrayante au réchauffement climatique, avance Ivan Beczkowski, président et directeur de la création de [tag]BETC Digital[/tag]. Le sujet de la pollution numérique va rapidement devenir un des paramètres dont il faudra tenir compte dans la stratégie digitale des marques. Exactement comme hier les consommateurs se demandaient si le leaflet promo dans leur boîte aux lettres valait la quantité de papier et d’encre utilisée, ils se demanderont légitimement demain si ça vaut le coup de recevoir votre newsletter ou pourquoi votre site est si gourmand en ressources et bande passante.

Il en veut pour prendre, ces chiffres “qui donnent le vertige”: “Nos mails professionnels quotidiens représentent autant de CO2 émis en une année que 1000 km en voiture, [et cela pour 20 mails par jour uniquement]. Une recherche Google pour arriver à votre site : c’est autant d’énergie dépensée qu’une heure avec une ampoule basse consommation. » Il rappelle ce rapport de Greenpeace « Clicking Clean », évaluant les performances énergétiques des principaux acteurs mondiaux du digital. Netflix, Twitter ou Spotify y sont épinglés quand d’autres, comme Google, “s’en tirent mieux car ils utilisent massivement des sources d’énergie renouvelables.” À l’instar de Facebook qui plante ses data centers en Islande afin de profiter des conditions climatiques pour refroidir et/ou alimenter ces infrastructures.

Bientôt tous les sites, services ou contenus digitaux des marques seront aussi jugés par les consommateurs au prisme de leur empreinte carbone, assure Ivan Beczkowski. Heureusement, il existe des solutions pour améliorer le bilan énergétique des productions digitales : hébergements verts, code propre, eco-design de sites, compensation carbone des productions vidéo, etc.

Une démarche plus vertueuse et eco-friendly qui sera récompensée : “La bonne nouvelle, c’est que cela va dans le sens de la performance, mais le défi est lancé aux designers qui vont devoir allier frugalité et création de désir. Moins consommer, mais mieux, on dirait que l’avenir de la planète passe par là.

5. Le social commerce

Après la monétisation des messageries et des plateformes, arrive dans son sillage le “social commerce”. Une tendance que Sandrine Plasseraud, présidente de [tag]We Are Social[/tag] en France, voit émerger, même si cela fait 15 ans que des tentatives d’implémentation d’une fonctionnalité commerce s’opèrent. « Il y a une dizaine d’années : Facebook permettait déjà aux marques de créer une boutique en ligne, on parlait alors de F-Commerce, rappelle-t-elle. À l’époque, force est de constater que l’échec fut cuisant. » Était-ce trop tôt au niveau des usages ? Était-ce lié au fait que les e-commerçants s’étaient contentés de faire du copier-coller de leur expérience de vente online sur Facebook, sans prendre en compte les raisons pour lesquelles les gens passaient du temps sur le réseau social ? Sans apporter de plue-value versus l’expérience sur leur site web ?

« Aujourd’hui, de nombreuses plateformes se lancent véritablement dans le social commerce et cette tendance est là pour durer.” Une tendance que l’on nomme désormais “shoppable posts”. Pas un post de marques sur Instagram sans la mention “Voir les produits” qui redirige ensuite vers leur e-shop. Instagram a d’ailleurs lancé “Instagram Checkout qui permet d’effectuer ses achats sans quitter la plateforme souligne Sandrine Plasseraud. Du côté de Pinterest, la fonctionnalité “Shop The Look” permet aux utilisateurs de la plateforme de rechercher et d’acheter des produits directement depuis les épingles mode et décoration d’intérieur.

Bien sur, avant l’apparition de ces fonctionnalités, d’autres technologies ont aidé à démocratiser le social commerce, comme la reconnaissance visuelle sur Snapchat en partenariat avec Amazon.

Reste que “ce sont les usages qui ont véritablement évolué pour laisser des opportunités au social commerce, estime Sandrine Plasseraud. Et ces usages se sont notamment développés et démocratisés via les Digital Native Vertical Brands (DNVB), ces fameuses marques qui se sont créées en mode direct-to-consumer et mode pure-player, sans autre choix que de vendre en ligne”, comme Jimmy Fairly, Bergamotte ou encore Merci Handy en France.

6. Le podcast comme étendard du contenu de qualité ?

Autre tendance qui ne surprendra personne, l’audio et notamment le podcast. Pour Matthieu Stefani, co-fondateur et CEO de [tag]Cosa Vostra[/tag], la tendance sous-jacente est inhérente à sa découverte du podcast il y a presque trois ans (il anime aujourd’hui le podcast Génération Do It Yourself) : le contenu de qualité. “Les réseaux sociaux nous ont divertis pendant 10 ans, et ce, dans tous les sens du terme, explique-t-il. Ils ont opéré une diversion vers des plateformes captant beaucoup d’attention et générant une sorte de pollution intellectuelle, un snacking permanent. À l’inverse de cette nourriture intellectuelle qui n’est pas vraiment bonne, fait grossir et rend idiot, les gens tendent à se tourner désormais vers le contenu de fond intelligent.

Pourquoi ? “Cette tendance est une réponse à la course effrénée à la visibilité des dernières années et qui nous a tous lessivés. » Après avoir eu l’impression de s’être fait abrutir pendant des années par la télévision et les réseaux sociaux, Matthieu Stefani constate “un repli fort sur l’audio, avec un besoin de fond, d’intellectualisation, d’apprentissage. Même si la télé effectue une petite forme de repli, quand les réseaux sociaux restent un vecteur important pour distribuer ce type de contenu.

En effet, “enfin intégré comme une catégorie à part entière de Spotify, et accessible dans les résultats de recherche Google depuis quelques semaines en France, le podcast va enfin bénéficier de la visibilité qu’il mérite !”, assure Julien Ferrand d’[tag]Intuiti[/tag]. Son format particulièrement adapté aux situations de mobilité, est “à explorer pour proposer de nouveaux contenus répondant à plusieurs enjeux digitaux :
– Alimenter votre stratégie de contenu/service
– Répondre aux enjeux de plateformisation (Google Podcast, Apple Podcast, Spotify, …)
– Servir votre stratégie SEO”
, explique-t-il.

7. Le live pour tous

Ce que Arthur Kannas aime à appeler “le Courteney Cox moment*”. “Initiés par les sites pour adultes, puis par les contenus jeux video (cette chronologie étant sans relation), les lives se refont une jeunesse via des outils de conversations et de monétisation avancés. Le live est partout et les marques vont devoir apprendre à le maîtriser, pour en faire un outil intéressant pour l’audience et efficace pour le business. En Chine, Taobao montre l’exemple avec son mix d’influence et de commerce”, explique-t-il.

8. La content factory

À rebours de la tendance des longs formats de l’audio, Guillaume Mikowski, cofondateur et CEO de [tag]Brainsonic[/tag], parie sur la tendance de la « content factory, encore peu présente en France mais qui a explosé aux Etats-Unis où nous avons (encore) trois ans de retard ».

Comme il l’explique, “cela répond à la problématique des contenus de flux pour les marques.” Certains contenus, type publicités long form, font l’objet de brief et sont produits par les agences. Mais la marque est confrontée à une autre problématique avec ses différentes prises de parole et la multiplication des canaux, “elle doit être always on en permanence avec ses audiences.” Ainsi, elle est obligée de produire en volume des contenus de qualité pour soutenir toutes ses prises de parole sur des canaux très différents, précise-t-il. “Les stories sur Facebook, Snapchat ou Instagram ont d’ailleurs fait exploser le syndrome”. Pour la marque l’enjeu est de produire au bon prix au regard de la durée de vie de ces contenus, de quelques secondes ou minutes à une journée, tout en maintenant une production récurrente et un flux régulier. Sans omettre de s’adapter aux pics de charge qui demande d’être ultra réactive..

Pour le fondateur de Brainsonic, “la réponse vient avec la content factory, un mix organisationnel, de process, de work flow, profils (exé, créatifs, team DA-CR, monteur, CM, etc.) réunissant tous les métiers de l’image qui permettent de travailler en mode PAAS, Production As A Service.” C’est-à-dire comme le SAAS, sauf que l’annonceur paye au ticket. “C’est-à-dire un certain montant pour une heure de travail sur un profil d’agence requis”.

Les marques sont obligées de s’organiser pour pouvoir répondre à cette problématique, sinon elles ne peuvent pas être assez réactives auprès de leur audience et s’infiltrer dans les communautés d’intérêts à des moments clés, estime-t-il encore. La content factory c’est l’industrialisation des métiers de l’image aux services de ces nouveaux enjeux et problématiques. Ça va pousser chez les annonceurs, c’est évident.

9. Le no-clic de Google et la fin du SEO générateur de trafic… mais générateur de visibilité

Une étude menée par le spécialiste du SEO, Rand Fishkin, grâce à des données récoltées par Jumpshot* (société d’analyse marketing) a montré que les utilisateurs cliquent moins souvent sur les résultats de recherche du moteur californien car, dans la plupart des cas, l’aperçu affiché par Google contient la réponse à leur requête. D’après les données fournies par Jumpshot sur plus d’un milliard de requêtes, le nombre de recherches “zéro clic” effectuées sur Google (par les internautes US) n’a cessé d’augmenter au cours des trois dernières années (+12% par rapport au premier trimestre de 2016).

De quoi menacer l’équilibre des médias en ligne ainsi que des sites de marques ? Pas nécessairement puisqu’au premier trimestre 2019, 41,45 % des recherches effectuées par Google ont donné lieu à des clics organiques vers des sites n’appartenant pas à Google, ce qui n’est pas rien. Toutefois, Google a tendance a abandonner son rôle de moteur de recherche pour devenir un moteur de réponses. Du côté des marques le challenge est évident et ce qu’elles perdent en trafic, elles pourront le gagner en visibilité : “En fait, pour chaque clic sur un résultat payé dans Google, il y a 11,6 clics vers des résultats organiques. Le référencement est loin d’être mort », estime Rand Fishkin. Toutefois, la part des clics disponibles pour les éditeurs et les sites web s’amenuisent, mais leur capacité « d’influencer” existe toujours. L’étude prédit ainsi une augmentation des demandes “On-SERP SEO”, soit “la pratique consistant à optimiser la page de résultats dans Google pour diffuser le message souhaité par un éditeur, une marque ou une organisation”. L’information est transmise en restant sur Google, sans aller sur le site tiers.

10. Engagements & engagement

À une époque, les engagements des marques étaient synonymes de faible engagement sur les réseaux sociaux. Cette année en revanche, on a remarqué une envie grandissante de la part des marques de s’engager pour la planète, pour les gens, afin de mieux répondre à leurs aspirations.

Pour Hélène Ortola, de [tag]DISKO[/tag], le digital est le meilleur support pour véhiculer ces engagements car “il permet à tout un chacun de s’exprimer librement, de communiquer de différentes façons possibles, de viraliser un sujet dans un temps très court en étant concis, ou au contraire de prendre le temps et d’expliquer toutes les dimensions de ses engagements, et enfin de faire participer les autres. Et ça tombe bien car tous les engagements sociétaux sont sur le social, et la plupart des mouvements les plus engagés y débutent même, comme : #prayforamazonia #periodsarecool #climatestrike, etc. »

Le digital a ce rôle facilitateur qu’il permet à n’importe qui de “poser les questions qu’ils souhaitent à une marque, de la manière la plus transparente possible. Comme le fait Everlane en stories Instagram tous les mardis avec “Transparency tuesday” qui permet à tous de poser des questions aux collaborateurs sur la marque, ses produits, sa politique interne. »

Pour la directrice générale adjointe de DISKO, “les engagements en tant que levier d’engagement font partie du nouvel ordre créatif mondial.” “Et une fois leurs engagements définis, les marques se sont tournées en partie vers le digital pour les affirmer… s’assurant sans cesse, dans leurs prises de parole, de mesurer le poids de leurs mots, d’être sûres qu’elles soient légitimes, et “clean” pour éviter le backlash en ligne.”

Même si certains engagements clivants n’empêchent pas les polémiques, de Nike et « Dream Crazy » avec Colin Kaepernick ou la pub Gillette “The best a man can be” aux États-Unis, “ils sont bien souvent créateurs d’un impact positif plus large (malgré la polémique, Nike a vu ses ventes en ligne croître de 31% le week-end de la diffusion du film). Preuve que les Engagements créent un engagement digital mais sont surtout générateurs de préférence et de profit ; dès lors pourquoi s’en priver ?”.

Hélène Ortola rappelle toutefois qu’ “au delà des promesses de marques et des revirements de promesse ou signature, les gens attendent surtout des discours de preuves, puisque 49% des français estiment que la communication “for good” correspond à du greenwashing, ils ne sont que 23% à estimer qu’elle se transforme en mesures concrètes dans la réalité”, d’après la dernière étude de l’Observatoire du Goodvertising.

Pour que les marques réussissent au mieux à engager leurs communautés via leurs engagements, “c’est aussi l’agence de communication d’être force de conseils en proposant entre autres des sites plus responsables, moins de couleur pour diminuer la consommation énergétique ou en faisant appel à des banques d’images plus diversifiées en termes de populations, comme le propose par exemple The Gender Spectrum Collection. »

À noter la publication prochaine de notre interview de Thomas Kolster dans le courant du mois d’octobre.

Bonus

– Le retour du bon vieux jeu concours ?
Vous avez bien lu, comme l’explique Lucas Denjean, directeur général de [tag]SensioGrey[/tag], “après une phase marquée par une dépendance croissante au paid, les annonceurs sont à nouveau préoccupés par la first party data collect.” “Nous parions donc sur le retour des programmes d’engagement, des plans de contact et de la collecte de données consommatrices, poursuit Lucas Denjean. Une reprise de contrôle sur les données qui ne peut se faire sans contrepartie : “Pour cela, il faut bien offrir quelque chose en échange, un service, un bénéfice fonctionnel, une dotation. »
  
– Du social listening à l’émotion listening
Authenticité et quête de sens, les consommateurs exigent plus de sincérité et d’émotions de la part des marques. C’est pourquoi, “au-delà des tendances technologiques et d’usages, sur le digital encore plus qu’ailleurs, les marques veulent créer du lien avec leurs audiences, avance Laura Meunier, planneur stratégique chez [tag]tequilarapido[/tag]. Et pour cela, quoi de mieux que de passer par les stimuli émotionnels ?

Elle poursuit : ”Aujourd’hui, on pense l’émotion comme créatrice d’engagement pour cultiver la relation marque-audiences. Pour aller plus loin, on pense qu’elle est révélatrice de sens pour les marques, elle accompagne la transmission du brand purpose.”  Tequilarapido se dit tellement convaincu, que l’agence utilise “le listening pour détecter non pas uniquement les insights, mais les émotions des communautés pour ajuster en permanence la tonalité et le sens du discours de nos clients.” Ce regain d’émotions permettrait “une meilleure appropriation pour les publics cibles, affirme encore Laura Meunier. Nous mettons les émotions au cœur de nos stratégies, notamment sur le social media où celles-ci sont fédératrices et révélatrices de la relation entre la marque et sa communauté.” Les clients sont ainsi incités à “surprendre, toucher, faire rire, distraire… en somme, à faire preuve d’intelligence émotionnelle”, comme ce fut le cas récemment pour le Groupe Renault où l’agence a titillé la fibre nostalgique des audiences cibles.

We’re taking out our time machine!⏳ Who remembers this good old R5, now mythical? Tell us your travel memories with it! ?? ➡️ bit.ly/2LMSiqU

Publiée par Groupe Renault sur Vendredi 13 septembre 2019



* Courteney Cox est apparue pour la première fois à l’écran en 1984 dans le vidéo-clip de la chanson Dancing in the Dark de Bruce Springsteen. Il pensait que c’était une fan choisie au hasard dans la foule, c’était en réalité une jeune actrice castée pour l’occasion.

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