TikTok : une opportunité pour les marques ? Voici un 1er retour d’expérience

Par Élodie C. le 02/05/2019

Temps de lecture : 8 min

De quoi faire chanter les marques.

Avec 700 millions d’utilisateurs actifs dans le monde et 4 millions en France (Digiday), TikTok est tout simplement l’application dont tous les adolescents raffolent. Elle se place à la troisième position dans le coeur des 12-16 ans, juste derrière Snapchat et Instagram d’après l’étude #BornSocial de l’agence Heaven. En revanche, elle bénéficie de la plus forte croissance du marché, +12,6% l’année dernière. Au premier trimestre 2018, elle est même passée devant Facebook, Instagram, Snapchat ou encore YouTube sur l’AppStore avec 45,8 millions de téléchargements (663 millions de téléchargements sur l’année). Excusez du peu. Véritable phénomène, l’application reste pourtant mal appréhendée par le commun des mortels et peu investie par les marques. Accompagnée par les agences FCINQ et M&C SAATCHI.ONE, Maoam s’y est néanmoins risquée : comment engager les jeunes ? Si le taux d’utilisateurs actifs est encore faible sur TikTok (29% selon le cabinet Apptopia) à côté des poids lourds du secteur (+ de 90% sur Instagram), le taux d’engagement sur l’application n’est pas négligeable. Malgré son succès auprès de cette cible, TikTok représente-t-elle une réelle opportunité pour les marques ? Éléments de réponses avec Josué Pichot, directeur de création de l’agence FCINQ et Muriel Espinosa, chef de groupe de Maoam, dans ce nouveau bilan de campagne.

Le contexte

Pour les plus de 20 ans qui ne connaîtraient pas l’application, TikTok est en quelque sorte le descendant de Vine. Connu sous le nom de Musical.ly (créé en 2014) avant son rachat en 2017 – pour un milliard de dollars environ – par le groupe chinois de médias, Beijing ByteDance, TikTok est une application de création et partage de vidéos, façon synchronisation labiale, ou “lip syncing”. Du playback pour résumer. Sur cette plateforme, des adolescents, dans une très grande majorité, se filment en train de chanter et/ou danser sur des musiques célèbres. Qui n’a jamais rêvé de se prendre pour Beyoncé sans faire saigner les oreilles de son auditoire ? L’application est rapidement devenue très populaire auprès des adolescents, son cœur de cible. D’après le dernier baromètre BornSocial de l’agence Heaven, réalisé en partenariat avec l’association Génération Numérique, TikTok est la troisième application préférée des collégiens français de moins de 13 ans, devant Instagram et Snapchat. Alors même que toute inscription leur est interdite. En effet, l’âge limite d’inscription sur les principales plateformes est fixé à 13 ans (Instagram, Snapchat ou YouTube), et 15 ans en France sans autorisation parentale. En marge du RGPD, WhatsApp a relevé cette limite à 16 ans pour les utilisateurs de l’Union européenne. Quoi qu’il en soit, le ciblage publicitaire à destination des moins de 13 ans est officiellement interdit aux marques : sus à la collecte de données, profilage et autre retargeting.

TikTok est une application gratuite connue sous le nom de Douyin en Chine. Elle a été lancée en 2016 par Zhang Yiming, le directeur général de ByteDance et fondateur de Toutiao, la plus grande plateforme de contenus d’actualité en Chine, avec 120 millions d’utilisateurs quotidiens. ByteDance Technology est l’une des étoiles montantes de la tech chinoise et elle rassemble aussi un empire d’applications sociales tournées vers la vidéo. La fusion a permis à ByteDance de récupérer les 100 millions d’utilisateurs de Musical.ly, essentiellement basés aux États-Unis. Contrairement à TikTok dont les utilisateurs se situent principalement en Inde et en Asie.

La France a, elle aussi, été submergée par ce tsunami virtuel. Cette application est particulièrement populaire chez les 11-14 ans (38 % déclarent avoir un compte sur TikTok), et chez les filles (57,82 % de cette tranche d’âge), selon une enquête de l’association Génération Numérique effectuée auprès de 7 421 jeunes de moins de 18 ans.

Le brief

Maoam, c’est “le bonbon fun de la marque Haribo”. Pour la marque, il s’agissait autant de promouvoir sa gamme Happy Fruttis que d’améliorer la notoriété du produit Maoam auprès d’une cible particulière : « Il nous fallait améliorer le top of mind de notre produit auprès d’une génération de consommateurs absente des médias traditionnels et qui fonctionne avec ses propres codes« , explique Muriel Espinosa, chef de groupe pour la marque Maoam. Un message qui a trouvé un certain écho auprès de l’agence FCINQ : « Lors de notre recommandation annuelle, suite au brief de la marque Maoam et suite à notre étude de social listening, nous avions recommandé trois “touchpoints” privilégiés pour Maoam : YouTube, Snapchat et Tiktok, poursuit Josué Pichot, directeur de création chez FCINQ. Nous avions proposé plusieurs opérations pour chacune des plateformes en insistant sur la qualité et la logique d’aller sur TikTok. Cette plateforme, tant par son audience que par son usage faisait sens et permettait notamment de bien faire le lien avec le film TV de Maoam qui joue sur la danse et la musique”.

Comme toute plateforme, TikTok a ses influenceurs, encore faut-il choisir les bons. Au moment du brief, FCINQ avait “déjà identifié des influenceurs qui seraient volontaires pour soutenir notre opération. Quelque temps après notre recommandation, un Haribo Challenge s’est lancé naturellement sur TikTok (sans que nous ni la marque n’ayons fait quoi que ce soit), cela a d’autant plus appuyé notre idée et aidé à obtenir le “go” final.

Pourquoi un challenge ? Si le playback est la vitrine de TikTok, les défis et autres challenges sont l’ADN de la plateforme : l’application en propose un nouveau chaque jour. Comme le “Oh nanana dance challenge” qui consiste à danser, en groupe généralement, sur cette chanson de Bonde R300 et Kondzilla. Évidemment, certains challenges sont sponsorisés par des marques, mais rien ne garantit que “la mayonnaise prenne”. TikTok combine ainsi étonnamment plus attraits de YouTube, Instagram et Snapchat. Tout ce qui est susceptible de plaire aux adolescents : de la vidéo à fort potentiel de viralité – et donc de notoriété – mais aussi des effets visuels en pagaille pour réaliser ses propres clips, la présence d’influenceurs, des hashtags et du filtre à n’en plus savoir qu’en faire.

La campagne

Lancée le 20 mars dernier, cette opération de Maoam était une première sur TikTok. Le #MaoamChallenge “invitait l’audience à se lâcher en musique tout en mâchant des Happy Fruttis, cette pâte à mâcher ‘au goût de fou jusqu’au bout’ capable de déclencher une énergie incontrôlée le temps de sa dégustation”, précise la marque.

Une quinzaine d’influenceurs ont été activés pour relever ce challenge. Leurs vidéos ont été relayées et défiaient également une communauté grandissante à rivaliser de créativité. “Notre visibilité a été incroyablement boostée grâce à un message positif parfaitement relayé”, se félicite Muriel Espinosa. Influenceurs, achat média sur la plateforme et Instagram, ainsi que des RP ont permis de soutenir et amplifier cette campagne inédite pour Maoam, “c’est un triptyque indispensable dans la réussite d’une campagne aujourd’hui, précise Josué Pichot. Nous avons recruté deux top influenceurs – @sachasmiles et @matdeuh – ainsi que 14 micro influenceurs afin de lancer le challenge”. En outre, le directeur de création de FCINQ indique “qu’une story Instagram a également été pensée et sponsorisée afin d’inviter les jeunes utilisateurs de ce réseau à participer. Ce contenu a fait 8 millions d’impressions pour 62,4% de l’audience cible touchée. 5,7K clics ont été recensés afin de basculer sur TikTok”.


Pourquoi choisir TikTok pour cette campagne, plutôt que Snapchat par exemple, également très populaire auprès des jeunes ? “La mesure de l’efficacité de certaines opérations sur Snapchat est parfois complexe, voire impossible, explique Josué Pichot, notamment quand on veut créer de l’UGC (user generated content) – même si elle est tout à fait adaptée à Snapchat également. Snapchat permet en ce moment – par expérience – d’avoir de très bons résultats, l’achat d’espace y est moins cher et peut s’avérer très performant en termes de taux de clic par exemple. Cependant, cette opération, liée à la copy TV internationale de Maoam, a été conçue par rapport aux usages de la plateforme TikTok, musique, danse et challenge sont donc le cœur du dispositif. […] C’est une des clés du succès, et l’une de nos règles internes en termes de conception et d’idéation digitale : créer en fonction de l’utilisateur et de ses usages.

Les résultats

– 23 000 euros en earned média
– 1,3 million de vues
– 225 000 cœurs
– 2 535 commentaires
– plus de 2 190 partages pour 16 contenus influenceurs

Story sponsorisée Instagram :
– 8 millions d’impressions pour 62,4% de l’audience cible touchée.
– 5 700 clics ont été recensés afin de basculer sur TikTok.

Les clés du succès

– Surfer sur une plateforme au début de sa vague
À l’instar d’un Snapchat qui est devenu un véritable phénomène générationnel, TikTok bénéficie des mêmes avantages et inconvénients : une forte communauté, engagée et en pleine croissance, des prix relativement faibles, mais des marques peu investies, car déconnectées de ses usages.

Ce qui est certain c’est que TikTok est une plateforme à suivre, estime Josué Pichot, et même s’il n’est pas possible de prédire son avenir, aujourd’hui son audience et sa dynamique sont extrêmement intéressants. Les marques doivent savoir être opportunistes quand cela a du sens par rapport à leur audience et ce qui est faisable facilement aujourd’hui avec cette plateforme sera peut-être beaucoup plus coûteux demain.

– L’adéquation entre TikTok, l’ADN et la cible de la marque
Nous intégrons cette plateforme dans nos recommandations et nos campagnes quand cela a une logique par rapport à la marque et au brief, mais sa particularité fait qu’évidemment elle ne peut pas être intégrée systématiquement pour n’importe qui ou simplement en se disant que cela fera ‘moderne’”, explique encore le directeur de création. “C’est l’une des clés du succès, et l’une de nos règles internes en termes de conception et d’idéation digitale : créer en fonction de l’utilisateur et de ses usages.

– L’indispensable amplification avec les influenceurs
Comme l’explique plus en amont Josué Pichot, les influenceurs font désormais partie d’un “package” indispensable dans la réussite d’une opération lancée sur les médias sociaux. Mais pas n‘importe lesquels, il faut identifier “des influenceurs qui aiment la marque et ont très envie de relever le challenge.” Le message n’a que plus de chance d’être naturellement décuplé auprès de l’audience cible : “Une idée centrale qui fait sens, plaît, permet d’insérer naturellement nos produits et une bonne orchestration des différents médias (et notamment une campagne avec des formats publicitaire aussi bien sur TikTok que sur d’autres plateformes Insta, etc.).”

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