Le marché retrouve des couleurs avant d'affronter le cookieless.
Après une année de mutations pour le secteur des médias, 2022 devrait être celle de l’innovation et de la transition, notamment avec les premières mises en application de la loi Climat et Résilience, dont le dispositif Oui pub (vs Stop pub) fait partie, et l’arrivée annoncée du cookieless sur Chrome en 2023 après plus d’un an de report. Les données first party et le ciblage contextuel (mots clés et sémantique) sont appelés à devenir l’alternative favorite.
Le marché publicitaire retrouve des couleurs après deux années compliquée : au 1er trimestre, sur le périmètre observé par l’IREP (télévision, cinéma, radio, presse, publicité extérieure, courrier publicitaire, imprimés sans adresse) qui inclut également une estimation globale des recettes digitales (source : France Pub), les recettes nettes publicitaires totales s’élèvent à 3,923 milliards d’euros, en progression de +13,7 % par rapport au 1er trimestre 2021 (+12,2 % vs le 1er trimestre 2019).
Pour les 5 médias – presse, radio, cinéma, télévision et publicité extérieure (incluant leurs recettes digitales), les investissements sont en hausse de +13,9 % par rapport au 1er trimestre 2021, sans retrouver leur niveau du 1er trimestre 2019 à -4,7 %. Les recettes nettes digitales de la télévision, de la presse et de la radio affichent une puissante dynamique de +22,9 % vs 1er trimestre 2021 et dépassent largement le 1er trimestre 2019 avec une croissance de +47,4 %.
Les nouveaux comportements et attentes des consommateurs renforcés par la pandémie – e-commerce, local, streaming, livraisons à domicile, responsabilité et durabilité – induisent logiquement de nouvelles façons de communiquer pour les marques et des investissements mouvants pour les médias.
Un panel d’acteurs issus du secteur, interprofession et agences média, nous livrent ce qui sera, selon eux, la tendance de l’achat média en 2022.
1. Le boom de l’e-commerce et le renouveau du retail media
Les restrictions et fermetures imposées par la pandémie ont accéléré le développement du e-commerce et des services de livraisons alimentaires (+11% en 2020), permettant notamment le déploiement du quick commerce dans les grandes métropoles : à Paris, le « quick commerce » s’installe dans les habitudes de consommation et capte déjà 1 euro sur 4 de la livraison à domicile (étude NielsenIQ-Fevad)
L’explosion de la vente en ligne – 32,5 milliards d’euros au 1er trimestre 2022, + 11,8% vs 2021 – a également pressurisé la logistique de marques proposant la livraison gratuite, si bien que de grandes enseignes sifflent la fin de la récrée et font désormais payer les retours.
Logiquement, avec la digitalisation des parcours de courses ces dernières années, le retail media évolue et permet aux marques et autres annonceurs d’insérer des publicités ciblées directement dans les espaces de vente en ligne, d’adresser à la bonne cible, au bon moment.
“Même si les restrictions sanitaires liées à la crise Covid ont fortement accéléré la croissance du e-commerce, et dans son sillage le développement du retail media, celui-ci reste encore un écosystème embryonnaire tant d’un point de vue technologique que du point de vue de l’adoption des marques, nuance toutefois Thomas Quélin, VP Digital Marketing Artefact. Plusieurs enjeux restent encore mal adressés : allocation budgétaire entre plateformes, ergonomie des interfaces, interprétation des résultats et mesure de la performance et disponibilité de la donnée dans les interfaces.”
Gautier Picquet, président de l’UDECAM et CEO de Publicis Media, est plus optimiste et voit le marché de l’achat média transformé par l’accélération e-commerce cette année : “Aux tendances de fond qui s’amplifient (transfert des audiences des mass media), s’associent des éléments conjoncturels qui poussent les annonceurs et les agences à modifier leurs arbitrages d’investissements publicitaires : remise à plat du marketing digital à l’ère du post-cookie et du consentement, accélération des besoins des marques sur la vente en ligne, nouvelles perspectives du web3, mais aussi inflation marquée des prix, sont autant d’éléments qui restructurent à court et moyen terme les allocations budgétaires des mix marketing”, constate-t-il en préambule.
“Fin des chasses-gardées, fin des monopoles et autres marchés ‘captifs’, toutes les stratégies sont envisageables et envisagées. A cela, s’ajoute une nécessaire maîtrise des contenus et des langages, en particulier auprès des jeunes générations. Plus que jamais, cerveau gauche et cerveau droit doivent cohabiter et les agences médias se révèlent être des partenaires clés à travers la valeur de conseil et l’ingénierie inédite des leviers qu’elles déploient pour contribuer à la performance des marques !”
2. Le brand content
Relégué à l’âge de pierre de la publicité numérique, la bannière et la pop-up ont laissé place à un format plus sophistiqué et toléré à l’ère du contenu roi. Avantage certain, il contourne les bloqueurs de publicité dont l’adoption reste importante sur desk, quand la publicité ciblée est rendue plus compliquée avec la suppression des cookies tiers.
Un format publicitaire qui ne dit pas son nom puisqu’il permet des prises de parole hors de tout discours… publicitaire et autres argumentaires de vente.
Un “écrin” pour les sujets RSE des marques : « Le rôle du brand content, sous toutes ses formes, va s’intensifier dans les problématiques RSE des marques (près de 11% des communications publicitaires selon Kantar en 2021), explique ainsi Emmanuel Crego, directeur général de Values.media. Les marques ont besoin d’étayer leurs propos sur ces thèmes, apporter des preuves concrètes, engager et initier un échange avec leurs parties prenantes.”
À l’inverse, il estime que les formats publicitaires « classiques », parfois très normés, ne peuvent pas toujours y répondre entièrement. “C’est là que le brand content joue son rôle : préempter des territoires, décliner un discours dans la durée, se différencier… Cela fonctionne si le discours reste authentique et légitime. Le sujet n’est donc pas uniquement celui de la posture publicitaire mais de véritable stratégie d’entreprise, la RSE étant bien plus qu’un axe de communication. ».
3. Programmatique pour tous
A ses prémices, le programmatique était annoncé comme une révolution pour le secteur de l’achat média. Et pour cause, il promettait d’automatiser le processus d’achat et de vente des espaces publicitaires digitaux. Aujourd’hui, il n’est plus question de parler de tendance, tant cette méthode basée sur l’intelligence artificielle et un apprentissage automatique s’est généralisée. “La très grande majorité des achats média digitaux que nous opérons pour nos annonceurs sont aujourd’hui programmatiques, quel que soit le device, quel que soit le format”, confirme Sandrine Reinert, directrice générale de de Jellyfish (groupe Fimalac). L’ouverture des éditeurs à ce mode d’achat a transformé les modèles en seulement quelques années pour être aujourd’hui la norme.”
Elle se dit convaincue que cette “norme” va s’étendre aux médias traditionnels avec une digitalisation “très forte et rapide” de la télévision, la radio, et l’affichage. “Les éditeurs se structurent et s’organisent pour répondre aux besoins des spécialistes de l’achat média programmatique comme Jellyfish, en proposant la mise à disposition de leur data et de leurs inventaires sur différentes plateformes d’achat, pour nous permettre d’opérer des achats plus intelligents, plus agiles, et plus efficaces. Le nombre de tests que nous opérons sur ces médias émergents, l’évolution des usages et la remise en question de la part des annonceurs des modèles traditionnels nous laissent à penser que nous sommes en train de construire une nouvelle norme sur cette base.”
En France, TF1PUB a dégainé son offre de programmatique TV linéaire garantie en 2020 déjà. Soit la mise à disposition d’inventaires TV linéaire sur un DSP.
Chez Artefact, cette automatisation est également au cœur de leurs campagnes media. “Elle fait évoluer le rôle des consultants media en agence et nécessitent la collaboration avec de nouveaux spécialistes. La collaboration entre experts media et spécialistes data (data analyst, data scientists, data engineer…) permet notamment de nourrir plus efficacement les algorithmes à disposition par les plateformes pour décupler les performances, explique Natacha Kocupyr, VP Digital Marketing Artefact. Stratégies de bidding pilotées à la valeur, au stock disponible, taux de remplissage…nécessitent une complémentarité de profils avec une approche commune pour intégrer des données business dans le pilotage des campagnes media.”
4. Publicité et pouvoir d’achat
Les prix à la consommation ont bondi de 4,8 % sur un an dans l’Hexagone, selon les données publiées en avril dernier par l’Insee. Selon l’Institut, l’indice des prix au mois de janvier 2022 a bondi de +2,9% sur un an, avec des hausses significatives des produits alimentaires (+1,5%), des produits frais (+3,6%) ou encore des services (+2%). Lors du premier trimestre 2022, les prix à la consommation étaient de +3,5%, dépassant ainsi la barre symbolique des 3% pour la première fois depuis 2008 (année de crise économique – bancaire et financière – mondiale).
Cette inflation mine le pouvoir d’achat des consommateurs, les incitant à piocher dans leur épargne constituée en partie ces deux dernières années. Et aussi surprenant que cela puisse paraître, l’IAB à l’arme toute trouvée pour lutter contre.
“À l’heure où, partout dans le monde, les prix à la consommation augmentent (+5,7% dans les pays développés selon les derniers chiffres du FMI), les entreprises qui se battent sur les prix pour rester compétitives, ne pas impacter directement le consommateur et ne pas dégrader leur marge ont une nouvelle flèche à leur arc, une arme anti-inflation redoutable, la publicité !”, suggère Nicolas Rieul, président de l’IAB France. Comment communiquer dans un contexte d’inflation et justifier, pour certaines marques, leurs hausses de prix, quand le consommateur est tenté de choisir le produit le moins cher ? Il est autant affaire de storytelling, de transparence, que de désirabilité.
“Du constructeur de téléphone Apple, qui voit sa part de marché stagner depuis plusieurs années et qui doit absolument gagner plus d’argent avec le même nombre d’utilisateurs, à Amazon, qui pour rester compétitif sur les prix est devenu, en quelque année seulement, le 3eme acteur de la publicité en ligne mondiale – son activité retail n’étant d’ailleurs pas rentable sans la publicité – tous les acteurs ayant un accès aux consommateurs sont désormais tenté de lancer leur régie pour garantir des prix bas ou augmenter leur profit.
L’exemple le plus récent est bien sûr celui de Netflix : Reed Hastings, CEO de la firme, confronté pour la première fois à la stagnation de son nombre d’abonnés, a annoncé vouloir « permettre à ceux qui sont ouverts à la pub d’obtenir un prix plus bas », d’autres grands acteurs ont annoncé leurs ambitions dans le domaine comme Disney +, Shopify ou les acteurs du quick commerce. De quoi offrir aux annonceurs et acheteurs médias de quoi s’occuper encore quelques temps…”, prédit le président de l’IAB France et de la Mobile Marketing Association France.
5. Un secteur en recomposition
Si le contexte économique actuel laisse craindre une inflation qui s’installe dans les rayons, Anne Thetier, directrice générale en charge du trading Omnicom Media Group, observe aujourd’hui “une très forte inflation touchant tous les médias offline et plus particulièrement les médias audiovisuels.” Un phénomène qu’elle estime “particulièrement probant en télévision” : “Depuis quelque temps déjà, la consommation de la télé linéaire s’érode et paradoxalement, cette baisse est accompagnée d’une inflation importante”, souligne-t-elle. “Même si la demande en termes de volume budgétaire est restée soutenue, il nous apparaît inopportun que les régies se sentent autorisées à pratiquer cette reprise de valeur justement dans un contexte d’érosion de l’audience. La rétractation de l’offre ne peut pas justifier à elle seule une montée des prix importante. La fusion des groupes TF1 et M6, si elle est effective – qui devrait capter environ 70% du marché – est un élément d’inquiétude supplémentaire sur cette tension du marché.”
Entre des régies plombées par une approche trop court-termiste et des éditeurs audiovisuels qui doivent mener bataille face aux plateformes de streaming vidéo en développant une “vision holistique de leurs programmes, résolument cross-canal et cross-média”, un problème demeure pour la DG trading d’OMD : celui de la mesure.
“L’interprofession, notamment, travaille à la création d’une mesure globale vidéo capable de mesurer toutes les formes de diffusion des programmes, qu’ils soient vus en direct, en différé ou en replay. Il est devenu impératif de briser les silos. Lorsque le marché aura réussi à valider cette mesure cross-média, alors une grande partie du problème sera sans doute résolue, prédit-elle. En tant qu’agences, nous devons continuer de défendre les intérêts des annonceurs. Dans ce contexte particulier, notre mission est à la fois plus essentielle que jamais mais également plus complexe : continuer de veiller à la qualité des environnements de diffusion et d’acheter les écrans les plus à même de servir l’objectif des marques, tout en préservant le « pouvoir d’achat » publicitaire. C’est une équation particulièrement difficile à résoudre face à cette inflation.”
Autant d’enjeux qui concourent et expliquent la recomposition à l’œuvre dans le secteur. Celle évoquée par Anne Thetier avec la fusion des groupes TF1 et M6, celle – offensive – déroulée par le groupe Bolloré qui concentre toujours plus de médias dans son giron, mais aussi celle opérée par les plateformes qui se piquent d’AVOD. Lors de son audition par la Commission d’enquête du Sénat, le magnat a d’ailleurs justifié sa démarche par la concurrence exercée par les GAFA et la nécessité d’atteindre une taille critique à même de peser face à eux.
“Au-delà des luttes d’influence des grandes fortunes industrielles, la recomposition prend sa source dans l’hégémonie des grandes plateformes mondiales sur le marché publicitaire, qui, non content d’afficher des taux de croissance peu communs, se renforce au travers de nouvelles offres (TikTok, Twitch, par exemple), avec le risque que l’on connait pour les acteurs traditionnels. Les annonces de la possible ouverture à la publicité des acteurs SVOD (Disney & Netflix) ne font que confirmer cette tendance”, note Olivier Bacconnet, Chief Investment Officer chez GroupM.
Les principaux médias se recomposent donc face à ces nouveaux enjeux. Et au-delà de la fusion TF1-M6, “dont il ne faut pas négliger les conséquences sur la radio et leurs propositions digitales”, rappelle-t-il, d’autres mouvements sont en cours. En particulier dans le digital observe-t-on chez GroupM où “les acteurs ad-techs (Sublime / AdYouLike, entre autres) se regroupent ou sont cédés à des investisseurs plus à même de soutenir leurs développements et innovations.”
Olivier Bacconnet veut donc croire que cette forte concentration permettra surtout d’investir dans l’innovation et le développement d’une offre de valeur pour les annonceurs, et n’aura pas seulement pour effet de conduire à une hausse des prix, conséquence de son impact sur les investissements médias.
Lire notre dossier : Les 5 tendances de la communication RSE
6. Communiquer responsable
Tendance de toutes les tendances – dans l’événementiel, en création publicitaire, dans la tech ou en tendance graphique, la communication RSE infuse logiquement le secteur des médias. 2022 va accueillir les premières mises en application de la loi Climat et Résilience – affichage de l’impact environnemental des produits sur les publicités, mentions liées à encourager les mobilités douces, encadrement des allégations sur la neutralité carbone, sanctions en cas de greenwashing… – et le dispositif Oui Pub (vs Stop pub) est testée dans 15 collectivités (pour 2,5 millions d’habitants) pendant trois ans. Quelle forme cette communication responsable va-t-elle prendre ici ?
Pour Julien Domingues, Head of Dentsu trading chez Dentsu France, « la communication responsable est un vaste enjeu qui comprend autant les notions de transparence, de brand safety, de privacy, d’engagements RSE ou encore de mesure d’impact carbone.” Elle est au cœur des préoccupations des stratégies média des annonceurs. Mais plus qu’une tendance, “c’est une action nécessaire et indispensable au regard des enjeux de notre société et des attentes de la population”. “Véritable vitrine de la société, le secteur de la communication doit être acteur et non spectateur, et s’engager profondément dans cette démarche de responsabilité. Plus qu’une démarche commerciale, il s’agit aujourd’hui de l’enjeu majeur du marché. Lorsque l’on parle de durabilité, de responsabilité, d’harmonie, de respect de la vie privée, etc., en tant que groupe majeur de communication, nous proposons des solutions à nos clients pour y répondre ; il est néanmoins évident que le marché de la publicité, dans son ensemble et à toutes les étapes, se doit de partager et prôner ces valeurs.”
Un avis partagé du côté d’Havas Media Group qui rebaptise cette communication responsable en « meaningful planning » ou comment le media planning doit davantage être porteur de sens pour les marques, explique Faïza Rabah, insight director chez Havas Media Group. “Aujourd’hui, l’achat média revêt une dimension quantitative mais aussi de plus en plus qualitative et responsable. Il s’appuie sur des KPIs qui vont au-delà des KPIs traditionnellement utilisés sur chacun des médias. A côté du GRP ou de la couverture sur cible, de nouveaux indicateurs complémentaires, reflétant la qualité des contextes éditoriaux ou à la dimension RSE des supports, sont désormais pris en compte dans les achats. Ce sont des enjeux très importants pour les marques.”
Les acteurs du marché publicitaire développent ainsi des initiatives en ce sens. Côté agence média, la directrice insight évoque ainsi Havas Impact Carbone, le calculateur maison de l’impact carbone des plans plurimédia utilisés pour les clients de l’agence, ou encore « Meaningful Marketplaces » dont l’objectif est de construire des plans médias équitables sur le digital. Elle observe aussi de nombreuses offres disponibles en ce sens du côté des régies. En TV, en passant par les collaborations des régies avec des acteurs comme Goodeed ou les offres « vertes » en affichage. “Demain, on peut imaginer qu’un eco-score publicitaire voit le jour. On apprend encore en marchant car il faut instaurer de nouveaux référents et de nouveaux réflexes, mais ce sont des sujets passionnants et challengeants.”
En attendant l’éco-score publicitaire, de plus en plus d’agences développent leur propre outil ou s’associent avec des adtech (comme Razorfish avec Green It avec le Razoscan) pour mesurer l’empreinte carbone de leurs activités. Dentsu France affirme ainsi s’engager “au quotidien au travers d’actions concrètes et viables” et évoque le partenariat signé par le groupe il y a plus d’un an avec Axionable pour mesurer et d’optimiser l’empreinte carbone des campagnes publicitaires. “Ce partenariat a pour but d’accompagner nos clients dans une approche smart data, à laquelle s’ajoute aujourd’hui une approche média responsable. En parallèle, nous avons travaillé à la création d’un « do tank », le club dentsu SW!TCH, qui rassemble plusieurs de nos clients, qui a pour mission de proposer des actions et méthodologies concrètes avec des résultats tangibles en termes d’éco-responsabilité et de réduction de l’impact carbone des campagnes publicitaires. »
7. Médias locaux & proximité
Comme l’expliquait Jérôme Fourquet, directeur du département opinion et stratégies d’entreprise de l’IFOP, dans notre rubrique En Théorie, “la crise du Covid a eu comme principal effet, notamment en matière de consommation, non pas de créer des ruptures avec les pratiques et habitudes préexistantes, mais d’amplifier et d’accélérer un certain nombre de tendances déjà préexistantes au Covid.” Ainsi, plus qu’une fracture territoriale en matière de consommation, des différences régionales, expliquées par la différence des modes de vie, se sont renforcées. En termes de campagnes, la proximité est donc clé : une même cible socio-démographique devra sans doute être adressée différemment qu’elle se trouve dans le Nord, en métropole, campagne, à l’Est ou au Sud Ouest.
“Le sujet clé c’est de travailler sur des stratégies média nationales – off ou on, peu importe – mais en opérant des renforts locaux en fonction des objectifs clients – notoriété, branding ou promotion, trafic en magasin – là où c’est sous pondéré ou pas forcément efficace par rapport à certaines cibles dans le cadre d’une communication nationale”, explique Dorothée Caulier, directrice générale du groupe indépendant CoSpirit Media (CoSpirit Groupe).
“Les marques ont parfois besoin d’asseoir un message en fonction d’une problématique et de la pondérer en fonction d’une autre, précise-t-elle. Sur une cible socio-démographique identique, les 15-24 ans par exemple, pour une même profil, la consommation média ne sera pas forcément la même du nord au sud, ou d’est en ouest, nous sommes donc obligés d’opérer un renfort en digital, en PQR (presse quotidienne régionale) ou PHR (presse hebdomadaire régionale) sur certaines cibles pour pouvoir adresser le message de manière plus conséquente.”
Pour Dorothée Caulier, cette tendance devient même un prérequis dans la manière de travailler : “Nous sommes dans les prémices, à l’instar de la TV segmentée qui était la tendance de 2021 et mettra 4-5 ans à s’installer. C’est la même chose sur la partie média local, cela doit faire/ou fera partie des plans de manière systématique. Nous retrouvons cette tendance auprès de tous nos clients actifs.”