Quelles perspectives pour l’événementiel en 2022 ?

Par Élodie C. le 31/03/2022 - Agence : Publicis GROUPE

Temps de lecture : 8 min

Hybridation, immersion et sens de la fête.

Après deux années passées sous cloche et une activité quasiment à l’arrêt, le secteur de l’événementiel se prépare à un renouveau post-covid entre transformation, hybridation et retour — attendu — au présentiel. Alors que les individus semblent pressés de se retrouver dans des lieux de vies extérieures jusqu’ici restreints (terrasses, cinémas, bars, concerts, discothèques, etc.), la digitalisation va-t-elle tout emporter ? Quelle expérience « augmentée » / différenciante a-t-elle à offrir à des individus lassés d’outils numériques abondamment utilisés ces dernières années ?

Nous avons échangé avec un panel d’acteurs du secteur sur les perspectives et innovations qui se dessinent pour l’événementiel en 2022.

Un contexte sanitaire compliqué

À l’instar d’autres secteurs, même fortement bousculé, le secteur de l’événementiel ne s’est pas totalement arrêté malgré deux ans de « tunnel sanitaire », et ce, grâce à aux événements en ligne. « Limitée jusque-là », « l’expérience digitale devenait obligatoire » se souvient Olivier Armbruster, CEO de Voilà, l’entreprise co-créée par Orange et Publicis accompagnant la digitalisation des événements professionnels.

Aujourd’hui, le secteur « revit », il s’est même « réinventé » observe Emmanuel Vivier, co-fondateur du HUB Institute. « D’abord forcés d’expérimenter le potentiel des évènements en ligne pour contourner les contraintes sanitaires, les acteurs ont mûri en accéléré leurs approches et les technologies associées. Je veux bien sûr parler du boom de l’hybridation des événements entre présentiel et distanciel. » 

Une multiplication d’événements en ligne a eu lieu, « mais souvent avec un “Zoom amélioré” et de la vidéo classique », note Olivier Armbruster. « Bien heureusement, les événements en physique ont repris. » Comme avant ? Pas sûr. Frédéric Lambert, fondateur de Enchanté, concepteur et opérateur de grands lieux de vie festifs, voit l’apparition d’événements à plus petite échelle, « pour se retrouver et renouer des liens distendus par la crise sanitaire » : Les gens ont « l’envie et le besoin de se retrouver et de faire la fête, comme dans les lieux que nous opérons — ICONIK, à côté de la place d’Italie — nous avons de nombreuses demandes de privatisations, mais à des échelles moindres. Essentiellement des salariés qui veulent se retrouver après le travail », relève-t-il. « Les gens n’en peuvent plus d’être sur des écrans toute la journée. Ce ne sont donc pas de gros événements, mais des micro-soirées pour des équipes qui souhaitent partager à nouveau du temps ensemble. Certains, embauchés pendant les 2 dernières années, ne se connaissent même pas ! C’est un format très nouveau pour nous. » 

Un retour salutaire aux événements physiques, d’autant que le « 100 % digital cristallise son lot de frustrations », concède Benoît Malphettes, co-fondateur de l’agence Frénésie. Le secteur se retrouve néanmoins face à marché qui a évolué, à l’instar du monde des agences, celui-ci s’est concentré, les nouvelles attentes des consommateurs couplées à une digitalisation accélérée nt entraîné une exigence accrue en même temps qu’une montée en gamme des offres. « La conception même des événements a bougé, nous pensons la plupart de nos activations avec un prisme digital dans tous les cas. Avec des interactions online, du teasing sur les réseaux sociaux, des talks interactifs, des démo produits…, poursuit Benoît Malphettes. Des systèmes parallèles viennent augmenter les rencontres et les nourrir. » Les versions digitales sont toujours présentes même si les éditions se tiennent à nouveau en physique, que ce soit les événements B2B ou B2C.

Revoir notre émission Les Enjeux — la Réclame : quelles perspectives pour l’événementiel en pleine crise ?

Une hybridation logique

Avec l’accélération marquée des usages liée à une omniprésence du mobile et des réseaux sociaux, notamment depuis la crise sanitaire, la question même de la présence du digital ne se pose plus. Pour Flavien Lefort, directeur des technologies chez Brainsonic Event, en 2022, « l’enjeu n’est plus de choisir entre une expérience en ligne ou présentielle, mais de proposer le bon mix répondant aux objectifs de communication et d’engagement des publics. Des publics qui endossent aujourd’hui 1 000 casquettes : tantôt participants, tantôt utilisateurs, tantôt influenceurs, tantôt éclaireurs. Mais aussi des annonceurs plus matures et exigeants que jamais. Un planning stratégique qui co-construit avec la direction technique… autant de facteurs qui imposent aux agences de changer de modèle », estime-t-il encore. Comment innover ? « En intégrant finement les expertises techniques et stratégiques à la chaîne de valeur, en entretenant des partenariats vertueux et bidirectionnels avec des fournisseurs de solutions innovantes. »

Revoir notre émission Les Enjeux — la Réclame : L’événementiel s’est-il digitalisé pour de bon avec le confinement ?

Du côté d’Enchanté, la possibilité de disposer de lieux en fixe permet d’accélérer cette digitalisation : « Pré-commandes, commandes sur place, les écrans permettent de fluidifier les flux et s’intègrent désormais naturellement dans le parcours client. Ils libèrent du temps nos équipes pour mieux travailler la relation client. »

Quelles innovations pour le marché ?

Parmi les nouveautés attendues sur le secteur, il en est une qui ne devrait surprendre — presque — personne : les metaverses et autres univers virtuels qui promettent d’offrir une immersion renouvelée. « Nous travaillons beaucoup sur le lien que les marques entretiennent avec les communautés. Les NFT et le Metaverse engendrent des créations quotidiennes de contenus que les annonceurs commencent à peine à s’approprier, explique Benoît Malphettes. Leur présence est incontournable sur ces supports. Une NFT qui contient des éléments de marque et prend de la valeur fait rayonner proportionnellement l’image de marque. Annoncer dans le metaverse, fédérer des communautés dans un espace numérique et transposer ces rencontres dans des espaces physiques… est une hybridation nécessaire en 2022 », pour le co-fondateur de Frénésie.

Un avis partagé par Olivier Armbruster (Voilà) pour qui la capacité à drainer du monde, les préoccupations environnementales ou le simple changement d’habitudes de travail font du digital un outil fait pour s’imposer avec les événements hybrides. « La technologie offre aussi des immersions fabuleuses avec des studios créatifs qui développent des supports immersifs de plus en plus impressionnants, que ce soit en VR, mapping ou vidéo 3D. Des outils qui invitent au voyage avec des storytelling qui embarquent. » Tout l’enjeu sera d’offrir des expériences live engageantes, « de la même façon qu’un match de foot à la télé bénéficie d’atouts qui n’existent pas au stade. Notre plateforme “bout en bout” a été pensée pour cela avec une immersion inégalée (interactivité enrichie, full HD, format full mobile, affichage en surimpression) tout en assurant simplicité d’utilisation pour l’organisateur », promet-il.

En écho, Emmanuel Vivier (HUB Institute) observe ainsi le glissement d’ » un événement « à l’ancienne » avec une date de début et de fin, vers une approche plus globale d’animation de communautés qui propose des événements et des contenus additionnels durant toute l’année. » Avec, évidemment, « de nouveaux outils plus puissants et perfectionnés qui vont bien au-delà des outils de webinars ou de visioconférences ». Pour le HUB Institute, qui a porté sa préférence sur la plateforme française Inwink — « après avoir testé plus de 100 plateformes du monde entier » — « l’événementiel B2B a plus que jamais un énorme potentiel s’il sait se repenser en mixant en mode hybride : networking qualitatif, streaming vidéo interactif et marketing ciblé autour d’une vraie production annuelle d’insights. 2022 sera l’année des smart events ou ne sera pas ! »

Et si l’innovation était tout simplement de retrouver le goût et le sens de la fête tel qu’on l’avait autrefois ? Sans smart tech, ni low tech, juste avec des « ambianceurs ». C’est toute la démarche de Nova Event, lancé par le groupe Combat (Rock en Seine, Cheek, Les Inrockuptibles, Radio Nova, etc.). Un signe que le marché de l’événementiel n’a pas dit son dernier mot puisqu’après Voilà, un nouvel acteur sort du bois. Est-il vraiment nouveau ?

Avec des années d’organisations d’événements et « de fêtes somptueuses, décadentes et intelligentes (dixit Gabriel Gaultier) derrière elle (La Grande Tournée et Les célèbres Nuits Zébrées par exemple), le moment est venu pour Radio Nova de “marketer” son offre. Pas question de se départir pour autant de son identité, précise d’emblée Laurence Delaval, directrice déléguée de Combat Solutions : “C’est la promesse de Nova que nous proposons. Un ton impertinent, festif, simple, le vrai sens de la fête, ce que c’est très bien faire Radio Nova. Nous souhaitons nous adresser aux marques qui veulent sortir du cadre et des clous créatifs. Avec un pas de côté débridé et provoquant, d’autant que notre professionnalisme sur l’organisation d’événements comme Rock en Seine parle pour nous.” 

Une offre sur mesure ou à la démesure de la demande — lancement de produit, événement, OPS, convention interne, animation pour force de vente, etc. — dans l’objectif affiché de créer de la préférence de marque, de l’attractivité pour les jeunes salariés d’une entreprise, et de l’engagement. Une démarche qui pourrait faire vibrer la marque employeur de certaines entreprises.

D’ailleurs, chez Publicis Live et Enchanté, la RSE est autant un enjeu pour les clients que les équipes. François Bitouzet, CEO de Publicis Live, explique ainsi quel’innovation responsable est l’une des priorités de la firme. Et ce, “afin d’accompagner nos clients dans leurs enjeux RSE en leur proposant une nouvelle génération d’événements, les Events For Good, qui réinvente l’héritage de notre métier au service de l’environnement, des communautés et de l’économie.” Mais l’innovation doit aussi se mettre au service des équipes, “pour attirer les meilleurs talents et leur offrir un environnement de travail à la hauteur des leurs attentes d’après COVID. La clé de la réussite ? Peut-être d’inventer une nouvelle façon en événementiel, une façon qui investisse de manière volontariste dans la R&D et qui casse les silos habituels pour ouvrir de nouvelles perspectives au secteur.”

De son côté Frédéric Lambert (Enchanté) a observé une montée en compétences du personnel et des profils qui deviennent de plus en plus polyvalents — runners, programmateurs, animateurs, “conséquence naturelle” de la digitalisation des lieux de l’agence. “C’est aussi une réponse à la pénurie de main-d’œuvre dans le secteur : nous avons dû revoir nos modèles et nos organisations. Le succès de nos lieux ne dépend que de l’humain et c’est à des groupes comme Enchanté de porter de nouvelles valeurs. C’est dans ce sens aussi que nous travaillons sur les enjeux RSE de nos lieux. Des contenants recyclables, des verres en verre, des couverts en inox, pour limiter les déchets, des poubelles de tri. Tout se réfléchit pour être durable.

Pourvu que la fête dure.

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