Anticipez le futur de la publicité TV avec les CGV 2025

Par Xuoan D. le 24/09/2024

Temps de lecture : 10 min

20 secondes, RSE, IA, data et mesure unifiée.

Chaque année, à l’automne, il y a des rendez-vous à ne pas manquer : les journées du patrimoine, les feuilles oranges des arbres, nombre d’événements professionnels de rentrée… mais aussi les CGV

Oui, les conditions générales de ventes des régies TV, et en particulier celles adhérentes aux SNPTV, le syndicat national de la publicité TV, qui se sont accordées pour dévoiler l’édition 2025 en ce beau mardi de septembre.

Les CGV sont-elles un temps fort pour les juristes ? C’est probable. Mais c’est aussi un rendez-vous indispensable pour tout acheteur média, en agence ou chez l’annonceur, pour en savoir plus sur l’évolution du médium TV et de ses offres publicitaires.

Et cet opus 2025 pourrait même intéresser tout communicant. Entre le passage au spot de 20 secondes en lieu et place du 30’’, l’accélération de la data et de l’IA, sans oublier des offres bas-carbone particulièrement étoffées et l’évolution des usages entre agrégation et hybridation, les sujets ne manquent pas.

À défaut d’un bon visionnage sur la Réclame TV (qui n’existe pas encore), je vous souhaite une bonne lecture.

20 seconds is the new 30 seconds

Les professionnels de la profession que vous êtes ne seraient pas surpris d’apprendre que l’étalon de références des tarifs publicitaires TV va passer de 30’’ à 20’’ chez TF1 Pub et M6 Publicité

Pourquoi ce changement ? Car « la moyenne de tout ce qui est diffusé sur les écrans de télé est de 21 secondes », précise Laurent Bliaut, DGA marketing et R&D de TF1 Pub. Mais la raison est aussi financière. Le 30 secondes, en étant « la base 100 du secteur engendre une aberration économique. Le 20 secondes a un indice de 93. Ainsi le 30 secondes est à peine plus cher, ce qui fait une différence de coût à la seconde de 34 % », explique ce vétéran des régies TV. À terme, le risque d’inflation est ainsi réel pour le 30’’, même si pour Laurent Bliaut, « le fait que certains clients optent pour le 20’’ au lieu du 30’’ habituel va libérer de l’espace. » Or, on le sait, le média TV linéaire manque aujourd’hui d’inventaire face à la demande des annonceurs.

Toujours plus de RSE

Alors que l’ère du « post-purpose » des marques a été proclamée, la RSE a-t-elle été mise de côté dans les CGV 2025 des régies TV françaises ? Que nenni ! C’est au contraire la tendance dans laquelle s’inscrivent toutes les régies du marché ou presque, chacune à sa façon.

Le sous-titrage et l’audiodescription

« CANAL+ Brand Solutions propose des réductions tarifaires aux annonceurs qui fournissent des spots publicitaires sous-titrés et/ou audio-décrits, afin d’inciter à produire des publicités accessibles aux personnes ayant des déficiences auditives ou visuelles », détaille Fabrice Mollier, président de la régie de CANAL+.

Même intention chez M6 Publicité, avec un premier sous-titrage et une première audiodescription de spot offerts pour tous les clients. Une façon pour la régie de transformer, spot après spot, un marché encore peu inclusif selon Cécile Dinet Moncourt, directrice générale adjointe TV et digital : « Alors qu’en France 5 à 7 millions de personnes souffrent de surdité, seulement 10 % des publicités diffusées en direct sont sous-titrées pour les sourds et malentendants. »

Chez France TV Publicité, les endorphines des JO de Paris 2024 sont encore là, avec des performances records pour la régie. Saluons notamment le fait qu’à « l’occasion des Jeux, France TV Publicité a proposé aux annonceurs qu’ils souhaitaient bénéficier d’un service gratuit offert de sous-titrage des publicités pour les personnes sourdes et malentendantes », nous informe Vincent Salini, directeur commercial numérique. Un sous-titrage effectué en interne avec l’aide d’un outil d’IA de sous-titrage. Le résultat ? 100 % des spots diffusés pendant les JO étaient sous-titrés.

Le bas-carbone

En 2025, les conditions spécifiques des régies TV seront à nouveau favorables aux annonceurs limitant leurs émissions de CO2 : 

Paramount Global France (MTV, Comedy Central, Game One, Pluto TV) offre une remise de 50 % pour les spots faisant la promotion de « produits élaborés dans une logique éco-responsable ».

beIN REGIE lancera en 2025 une nouvelle version de la calculette carbone développée avec DK et le SNPTV.

NRJ Global, signataire du contrat climat, « reconduit ses dispositifs « Native » pour les communications de marques engagées et l’offre de publicité solidaire avec Goodeed. NRJ Global s’engage également à proposer des conditions commerciales spécifiques pour les campagnes d’information des administrations et des organisations caritatives en faveur de pratiques responsables et de l’utilisation de produits moins polluants. »

M6 Publicité a rejoint la Convention des entreprises pour le climat. Quatre formats publicitaires RSE sont au catalogue : « S6lidaire, pour soutenir un projet associatif ; 6green, pour valoriser les produits à moindre impact sur l’environnement ; l’offre Comportements responsables pour valoriser l’adoption de nouvelles pratiques de consommation ; et enfin 6Scan Labels pour informer sur les bénéfices des principaux labels environnementaux. »

– Enfin, TF1 Pub continue son programme Ecofunding Carbon. Le principe ? En partenariat avec l’ADEME, pour chaque campagne d’annonceur faisant la promotion de produits écoresponsables (étendus cette année à 10 critères supplémentaires, au-delà de ceux de l’ADEME pour intégrer les services et les institutionnels), TF1 abonde un fonds qui permet de réaliser et de diffuser ensuite des spots de sensibilisation. « Cet acte de générosité représente environ 5 millions d’euros bruts de campagne gratuite », d’après Laurent Bliaut.

La régie de « la une » proposera également des bilans carbones gratuits et systématiques pour toutes les campagnes sur tous ses médias d’ici fin 2024. 

Côté écrins, un nouvel écran Impact Screens est positionné juste avant le JT de 20H de TF1 chaque vendredi, réservé aux campagnes faisant la promotion de produits ou services engagés. Et une verticale IMPACT est créée sur TF1+. 

L’option Autopilot Carbon lancée en 2024 sera prolongée en 2025, avec la possibilité sur TF1+, en optimisant « le mix écran, la compression de la copie, le mix de format pour en moyenne délivrer près 33% d’émissions carbone en moins », selon Laurent Bliaut. L’usage de cette optimisation gratuite par les annonceurs est encore décevante pour la régie, « mais certaines nouveautés mettent du temps à être adoptées. Par exemple, le retail media a dû attendre 3-4 ans avant de décoller. »

L’IA

Au 2ᵉ trimestre 2025, France TV Publicité lancera ADspace IA, une nouvelle fonctionnalité au sein de sa plateforme d’achat ADspace. Il s’agit d’une « solution inédite de recommandation et d’achat, automatisée et personnalisée, boostée par l’IA. La plateforme embarquera toute l’offre france.tv, data et contextuelle, et proposera le meilleur mix total vidéo (TV linéaire, TV segmentée, CTV, OTT) en fonction des indicateurs prioritaires (reach, couverture utile, impact carbone, reach attentif). »

L’union fait la data

France TV Publicité annoncera dans les prochains jours le lancement de sa data clean room en partenariat avec une solution bien connue du marché. De quoi mettre à profit les données first party des 20 millions d’utilisateurs logués de france.tv (dont 3 millions recrutés pendant les JO avec une moyenne d’âge à 36 ans vs 42 ans habituellement) ainsi que « les données retail media qui iront au-delà de celles de Carrefour en 2025 » selon Vincent Salini.

Idem, du côté de M6 Publicité, cela contractualise autour de la donnée retail media. Déjà partenaire d’Unlimitail depuis 2023, la régie – de la petite chaine qui monte… devenue grande – fait le plein de data avec de nouveaux partenariats avec Valiuz et Infinity. « La collaboration avec Valiuz va s’étendre à Boulanger et une alliance stratégique avec Veepee sera présentée et détaillée prochainement. »

TF1 Pub n’est pas en reste avec de nouveaux deals retail media pour son inventaire de TV segmentée :  Unlimitail, Cdiscount et Sirdata.

Pour CANAL+ Brand Solutions, la data est aussi une nouvelle source d’insights pour les marques. Pour Emmanuelle Godard, Digital, Data & Innovation Director : « Nous avons en effet une connaissance très fine de nos abonnés : nous savons où ils habitent, le profil de leur foyer, les émissions qu’ils regardent, les informations et les produits qu’ils cherchent en ligne (grâce à la data Prisma) et même ce qu’ils achètent (grâce à la data Valiuz). Autant d’informations qui nous permettent de construire des segments en fonction des problématiques de nos clients. Afin que la data vienne infuser nos recommandations media, sponsoring et OPS, nous avons développé cette année une plateforme. Avec INSIGHT+, les équipes peuvent en un clic, sortir sur une cible donnée, ses centres d’intérêt, les sports qui la font vibrer, les films dont elle raffole ainsi que les meilleurs programmes pour la toucher en télévision et en digital. Pour ce faire, nos data scientists ont créé un P-score qui attribue à chaque contenu une note, combinatoire entre la puissance et l’affinité du contenu sur la cible. Le P-score, pour pertinence, permet ainsi de déterminer sur chacune des cibles les contenus les plus pertinents pour la toucher. »

L’agrégation fait la force

« Nous débordons de l’écosystème CANAL depuis des années », se félicite Fabrice Mollier, président de CANAL+ Brand Solutions. Eurosport, OQEE by Free, UGC, le Grand Rex, Max (ex HBO), l’offre de la régie via bien au-delà de CANAL+ et de ses chaines filles. Au total, 44 marques médias font partie de la « marketplace » CANAL+ Brand Solutions. Le Grand Rex devient aussi un asset pour les campagnes créatives de la Factory de la régie, qui se réjouit que « le partenariat entre Max et CANAL+ BRAND SOLUTIONS est le premier au monde entre une plateforme et une régie TV/Vidéo ». Commercialement, cette agrégation permet à l’offre Stream+ d’exister, réunissant MyCanal, Max et OQEE.

Avenue Charles de Gaulle à Neuilly, le groupe M6 se veut également rassembleur avec « un partenariat commercial et éditorial ambitieux avec la plateforme Pluto TV (Paramount). Il comprend l’échange de chaines FAST entre les 2 plateformes et sur le plan commercial, l’opportunité pour M6 Publicité d’élargir son reach grâce à la commercialisation de tous les inventaires issus de la plateforme Pluto TV ainsi que les contenus Pluto TV accessibles sur M6+. »

La CTV

Chez RMC BFM ADS, on se réjouit de « poursuivre en 2025 une stratégie d’hyperdistribution », d’après Raphaël Porte, directeur général de la régie. « Après un lancement réussi sur Samsung TV Plus de 4 chaines broadcast (BFMTV, BFM Business, RMC Story et RMC Découverte) puis de 8 chaines FAST », un partenariat similaire a été mis en place pour les smart TV et OS de TCL, en attendant d’autres constructeurs.

Simple sujet technique, avec une migration de la TNT linéaire à la TV connectée ? Raphaël Porte y voit bien plus que cela : « La CTV nous permet de toucher un public très rare et souvent négligé par la télévision traditionnelle. Par exemple, en CTV, 41 % des téléspectateurs consomment moins d’une heure de télévision par jour [source : une étude de juillet 2024 par Harris Interactive]. Nous atteignons également une audience plus jeune, avec une moyenne d’âge de 45 ans contre 57 ans pour la télévision classique. De plus, nous touchons un public plus aisé, avec un indice d’affinité de 150 sur les revenus supérieurs à 65 000 euros par an. En somme, la CTV nous permet de gagner sur tous les tableaux. »

Au-delà de ces partenaires, la CTV ne semble pas susciter une attention particulière de la part des régies pour 2025, celle-ci étant désormais totalement intégrée au mix total vidéo : TV linéaire, TV segmentée, CTV, OTT.

GRP contre CPM, le match n’aura pas (encore) lieu

Annoncée pour 2025 lors des CGV 2024, la migration de l’achat pub TV du GRP vers le CPM n’est plus à l’ordre du jour. L’écart entre ces deux références des marchés TV et digital était trop grand, comme l’explique Laurent Bliaut (TF1 Pub) : « Ce débat n’a pas été bien compris. Pourquoi ? Parce que quand on dit une impression dans le digital, à la télévision, on ne parle pas d’impression, mais de contact. Et derrière une impression, parfois, vous avez deux contacts selon le standard télé. Parfois, vous n’en avez même pas un demi. Parce que le standard télé, c’est une mesure où la complétion est intégrée dans le score. Si vous avez vu deux secondes d’un spot de 20 secondes, vous comptez pour 0,1. Et vous comptez 0,1 aussi bien pour l’accumulation de contacts que pour l’apport en couverture. Dans l’univers digital, le standard vidéo, c’est deux secondes. Donc, ça veut dire que vous avez deux secondes d’un spot de 20 secondes, vous comptez un. » Mais ce sont les agences média en particulier qui se seraient montrées mitigées quant à l’abandon du GRP. 

Alors que les usages et les offres s’hybrident, comment faire en sorte qu’une mesure commune existe ? « Médiamétrie a pris le relai », annonce Laurent Bliaut. Un comité cross vidéo a été créé où siègent l’UDECAM, l’Union des marques, les broadcasters et régies TV, mais aussi les plateformes digitales. « Avec un peu d’optimisme, on peut se dire que dans le courant de l’année 2025, on aura établi des standards qui permettront d’avoir des outils qui dédupliquent sur des standards équivalents la télévision linéaire. » La profession semble unanime : « Il faut que Médiamétrie continue à centraliser et à publier les mesures TV. » 

Rendez-vous, ici même, dans un an pour en savoir plus sur cette mesure cross vidéo ? Prenons les paris.


Pour les plus studieux, voici la synthèse complète
des CGV 2025 des régies du SNPTV.

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