L’interview de Sébastien Borget, co-fondateur et COO de The Sandbox.
Co-fondé par deux Français, The Sandbox est un univers virtuel phare de la tendance métavers. Carrefour, Axa ou encore Snoop Dogg y ont acquis des « lands » pour proposer des expériences inédites à leurs publics.
Comment les marques doivent-elles aborder le métavers aujourd’hui ? Y a-t-il déjà des bonnes pratiques à suivre ou des pièges à éviter ? Plongeons dans le web3 – sans nous y perdre – avec Sébastien Borget, co-fondateur et Chief Operating Officer de The Sandbox.
Imaginez qu’un annonceur ne connaisse pas The Sandbox. Comment présenteriez-vous votre solution ?
Sébastien Borget : The Sandbox est un monde décentralisé virtuel et en 3D. Vous y retrouvez des jeux, mais pas que. Les expériences proposées sur The Sandbox vont des concerts virtuels aux galeries d’art en passant par les hubs sociaux. Et il est possible de monétiser et de posséder tout ou partie de ces expériences.
Est-ce un métavers ?
S.B. : The Sandbox fait partie du métavers qui est une myriade d’univers décentralisés, où chaque utilisateur peut posséder son identité virtuelle sous la forme d’un avatar utilisable d’un monde à l‘autre. Un monde virtuel seul n’est pas un métavers. Et n’en font pas partie les mondes virtuels comme Roblox, Second Life, Minecraft ou Horizon Worlds de Meta de par leur nature centralisée et close.
L’interopérabilité des actifs entre les mondes virtuels du métavers est-elle déjà possible ? On pense notamment au fait d’utiliser le même avatar acheté sous forme de NFT d’une plateforme à l’autre.
S.B. : C’est encore relativement tôt pour mettre en pratique cette interopérabilité. Mais celle-ci est souhaitée et promue par des univers comme Decentraland, Cryptovoxels, Spatial, Otherside [le monde virtuel de Yuga Labs, la société derrière les Bored Ape Yacht Club ou CryptoPunks, ndlr]. Et évidemment par The Sandbox !
Quelle est l’audience de The Sandbox ?
S.B. : The Sandbox totalise aujourd’hui 3 millions de comptes et 350 000 utilisateurs actifs par mois.
Est-ce que The Sandbox représente déjà une opportunité pour les marques ?
S.B. : Notre plateforme est idéale pour les marques qui souhaitent proposer des expériences d’un nouveau type, en favorisant l’immersion et la créativité. C’est une façon inédite de se “connecter avec les fans”, en donnant de la valeur à la relation marques et fans à travers l’expérience.
Le métavers n’a pas de vocation commerciale aujourd’hui. Les utilisateurs s’y retrouvent pour être émerveillés et pour participer à la création de nouveaux contenus. Le shopping ne fait pas encore réellement partie des usages du métavers, mais cela pourrait changer dans les années à venir.
La co-création est clé au sein de The Sandbox. Avec VoxEdit, les utilisateurs peuvent créer leurs propres NFT et les vendre sur notre place de marché. Et Game Maker leur permet de créer des jeux sur The Sandbox avec une approche “no code”, sans connaissance nécessaire en développement.
Nous encourageons les marques à laisser les communautés remixer leurs contenus, à mettre en avant ces “assets” sur leurs propres lands [les terrains que les marques peuvent acquérir sur The Sandbox, ndlr] dans le cadre d’événements virtuels.
Quelles sont les bonnes et mauvaises pratiques actuelles des marques sur The Sandbox ?
S.B. : Nous n’en sommes encore qu’aux prémices du métavers. Cependant, contrairement à ce qui s’était passé avec le web et le web2, les marques et entreprises ont déjà saisi l’intérêt du métavers et investissent très en amont dans celui-ci. Des départements ont été créés, et il commence à se dire que le nouveau CMO – Chief Marketing Officer – pourrait devenir un Chief Metaverse Officer !
Cependant, les marques doivent être conscientes que lancer une collection de NFT n’est pas suffisant pour entrer dans le métavers. Pour y parvenir, il faut proposer une véritable expérience de marque, et fédérer autour de celle-ci une communauté.
Il est d’ailleurs intéressant d’observer que les marques traditionnelles qui réussissent aujourd’hui dans le web3 ont toutes collaboré avec des communautés existantes du web3. Citons Adidas (avec Bored Ape Yacht Club, Punks Comics et GMoney), Nike (avec RTKFT) ou Gucci (avec Wagmi-san).
Les premières marques à se déployer sur le web3 sont naturellement celles liées au divertissement, à la mode ou à la musique. Puis viennent celles du retail ou de la bancassurance, comme nous avons pu l’observer avec Carrefour et Axa. Ces entreprises savent que la génération à venir sera “metaverse native” et qu’il est clé d’avoir une présence dans cet univers. Sur la prochaine décennie, la relation client aura lieu dans le métavers. Et, après s’être concentré sur la vente d’actifs numériques avec les NFT, viendra l’émergence du commerce de biens physiques dans le métavers.
Quelle pérennité garantissez-vous aux entreprises qui font l’acquisition d’un “land” – c’est-à-dire un terrain virtuel – chez vous ?
S.B. : Après avoir acquis un terrain, une entreprise détient un asset numérique, un NFT, qui représente des coordonnées sur une carte. Elle va pouvoir créer une expérience sur ce terrain et y inviter d’autres utilisateurs.
Tant que The Sandbox sera en ligne, le terrain sera toujours accessible. Mais nous allons plus loin grâce à l’ouverture et à la décentralisation : le NFT du terrain, en tant que jeton non fongible, est présent sur la blockchain Ethereum. Si demain The Sandbox ferme, un autre projet pourra reprendre les terrains créés en leur donnant strictement les mêmes propriétés, ou au contraire, en modifiant le rôle de ces éléments dans d’autres univers virtuels.
Quel conseil numéro un donnez-vous aux marques qui se lancent chez vous ?
S.B. : Ne singez pas le réel et affranchissez-vous des lois de la physique ! Les vêtements s’animent, changent de couleur ou de motif à la volée. Les protagonistes peuvent voler ou se téléporter. Un concert peut prendre des formes toutes nouvelles. Dans le métavers, la créativité ne doit pas être bridée par les contraintes du monde “IRL”.