L’interview de Raphaël Assouline, cofondateur de RLTY.
Ces dernières années, le web3 a connu une percée flamboyante – certains marques s’aventurant dans le métavers et les NFT – la première creative metaverse agency a d’ailleurs récemment vu le jour en France. Témoin de cette montée en puissance et du potentiel de ce marché naissant, trois entrepreneurs ont eu l’idée de monter RLTY (prononcez « reality »), une startup qui organise des événements dans le métavers. Un outil facile d’accès et d’utilisation qui s’intègre à tous les mondes virtuels basés sur la blockchain (The SandBox, Decentraland, Somnium Space, Voxels, etc.)
Pour ce Focus web3, nous nous sommes entretenus avec Raphaël Assouline, cofondateur de la startup, qui évoque plus en détail de cette solution innovante au service des marques. Comment l’apprivoiser ? Quels types d’événements les marques et entreprises peuvent-elles organiser ? Comment toucher au mieux vos cibles ? Un passionné du web3 depuis ses prémices nous éclaire.
À quel moment avez-vous eu l’idée de créer une startup dédiée aux événements dans le métavers ? La pandémie a-t-elle joué un rôle dans cette prise de décision ?
Raphaël Assouline : Nous sommes trois entrepreneurs dans la startup : Jérôme Guilmet, Zack Sabban et moi-même. Avec Jérôme, nous étions associés dans une société appelée Geronimo Agency – qui développait des applications mobiles – que l’on a cédé à Onepoint, groupe que nous avons quitté 2 ans après. Après cela, nous avions très envie de monter une startup tech. De son côté, Zack avait monté Festickets (une marketplace de tickets de festivals), mais il a subi un arrêt de son activité drastique à cause du Covid. Il a dû se réorganiser pour maintenir son activité autant que possible, il s’est donc mis à créer des évènements virtuels en livestream – c’était les prémices de ce que nous avons cherché à développer par la suite avec RLTY.
Depuis 2017, nous investissons tous beaucoup dans les cryptos et les NFT. Toute cette notion de valeur d’actifs digitaux nous intéresse beaucoup, au même titre que la décentralisation de la propriété numérique et du développement des métavers. Au tout début de son développement, nous avions eu la chance de rencontrer The Sandbox, et avons pu constater la montée en puissance de ces mondes virtuels qui commençaient à prendre de l’ampleur. En tant qu’entrepreneurs de la tech, cela nous a tout de suite enjoués, nous avons vu cela comme une révolution. Quand Zack a testé les premiers évènements à distance en livestream (2020), nous avons remarqué que les personnes étaient passives derrière leurs écrans, elles ne pouvaient pas échanger avec les autres participants, ou alors de manière limitée. Nous avons identifié les métavers comme étant un bon moyen de réunir des personnes à distance en nombre, et de proposer de manière qualitative une expérience à distance évènementielle personnalisable. C’est pour cela que nous avons lancé RLTY, l’événement est un très bon moyen de démocratiser l’accès à ces espaces, et en même temps d’y retrouver d’autres participants au même instant.
Nous avons également lancé RLTY car le web3 a connu une montée en puissance spectaculaire ces dernières années. Les utilisateurs (notamment les jeunes) sont de plus en plus nombreux, et cela intéresse un marché plus traditionnel d’entreprises (des PME au CAC40). Celles-ci vont chercher à toucher cette audience, potentiels nouveaux consommateurs. Nous avons donc créé la startup pour des raisons utilitaires, mais aussi parce que cette tendance du web3 intéresse de plus en plus de monde.
Votre solution est-elle utilisable pour tous types d’événements, aussi bien grands publics et professionnels ?
R.A. : Pour l’instant, nous avons une orientation plutôt professionnelle, mais l’idée est d’élargir cette audience à terme. Nous avons déterminé quatre grandes cibles de créateurs d’évènements sont :
–Les professionnels de l’événement physique : ceux qui cherchent à créer un jumeau numérique en parallèle de l’événement physique pour amplifier la visibilité de l’événement à l’international. Nous avons commencé à le faire avec des conférences web3, mais nous pouvons tout à fait créer des fashion show, des concerts, etc.
–Le monde de l’entreprise de manière globale : pour des événements en interne, notamment avec des salariés à distance, mais aussi pour des journées portes ouvertes et recrutements.
–Les collections NFT : notamment les personnes qui créent des wearables. Aujourd’hui nous voyons beaucoup d’acteurs – pas uniquement dans le milieu du wWeb3, mais du retail ou encore du luxe également – qui créent des NFT d’habits virtuels (comme Balenciaga). L’événement virtuel est un bon moyen de mettre en avant ces produits mais aussi de les vendre.
–Les animations de communauté : que ce soit pour du web3 ou pas. Il y a beaucoup d’acteurs aujourd’hui qui ont des Discord avec des nombres de followers importants. Nous pensons que cet aspect expérience métavers est un bon moyen d’animation de communauté pour réunir ces utilisateurs sur un nouveau format d’échange, et pas uniquement les garder sur Discord. Il y a pas mal d’acteurs qui, dans leur aspect communication, cherchent à sortir de leurs habitudes et à justement proposer de nouveaux moyens de divertissements à leur audience. Typiquement, le fait de les réunir au sein d’un événement métavers et de leur permettre de se rencontrer est un bon moyen d’animer sa communauté, et de créer de la communication autour de cela.
Nous ne sommes encore qu’aux prémices du métavers, ne pensez-vous pas qu’il est encore un peu tôt pour créer une entreprise uniquement dédiée aux événements web3 en France ?
R.A. : Le siège de RLTY est en France, mais nous avons vocation – et nous le faisons déjà – à travailler avec des clients à l’étranger. Les événements métavers ont des vertus d’internationalisation, il n’y a pas de contraintes locales sur notre activité (ndlr : le web3 n’a pas de frontières).
Certes, c’est un marché naissant, mais il attire beaucoup d’acteurs et suscite de l’intérêt. Énormément de gens nous sollicitent pour créer des événements, nous avons plus de 100 évènements dans le pipe actuellement. Il y a peu d’offres de professionnels justement parce que nous sommes aux prémices, ce qui nous place en position de précurseur sur le marché. À l’heure actuelle, nous n’avons pas identifié d’acteurs concurrents. Nous avons créé une technologie et nous nous sommes positionnés sur un marché avec des clients déjà très demandeurs du sujet, donc nous pensons au contraire que c’est le bon moment.
Vous avez créé la start-up en janvier 2022. Est-ce que votre concept a intéressé les marques depuis ? Est-ce qu’un type de marques en particulier vous démarchent ?
R.A. : Il y a des acteurs de différents horizons, beaucoup de salons et de conférences professionnelles sur le web3. Depuis le mois d’avril, nous avons organisé quelques événements déployés manuellement qui ont plutôt bien marché. Parmi eux, la Paris NFT Day Conference, la Paris Blockchain Week Conference, Metaverse Summit 2022 ou encore la NFT Expoverse Los Angeles.
Ensuite, nous parlons à des marques très différentes : des collections de NFT aux cliniques de chirurgie esthétique en passant par des annonceurs traditionnels comme Orange, AXA et CANAL+. Celles-ci voient l’événement comme un bon moyen d’engager. En plus, cela ne dure qu’une journée ou deux, financièrement c’est relativement abordable, et cela ne nécessite pas d’animer une land ou un terrain virtuel à l’année. Quand on achète une land – comme beaucoup de marques l’ont fait – il y a par la suite le souci de les animer. Nous commençons aussi à échanger avec des festivals de musique et des concerts, nous allons très probablement faire un gros évènement au mois de novembre sur la thématique.
Vous rendez accessibles des terrains virtuels pour vos clients, comment fonctionne votre offre ?
R.A. : Quand nous nous sommes lancés, nous avons voulu nous positionner comme un outil tout de suite, et pas uniquement comme une société de services. Donc nous avons créé depuis plusieurs mois maintenant un outil (qui va sortir fin du mois de septembre / début octobre) permettant de déployer automatiquement des événements sur toutes les plateformes – enfin, celles que l’on identifie comme pertinentes (de par le graphique, le nombre d’utilisateurs connectés simultanément, le nombre de fonctionnalités, l’automatisation de déploiement d’événements, etc). Nous commençons par Decentraland et The Sandbox, nous pourrons ensuite nous ouvrir progressivement sur d’autres univers.
L’idée, c’est d’avoir un système automatique de déploiement ; il faut que la plateforme puisse répondre à ces enjeux. Pour l’instant, nous en faisons beaucoup sur Decentraland, et nous allons le faire sur The Sandbox quand ils auront ouvert publiquement. L’outil est assez simple d’accès, d’utilisation et est très ludique. Après avoir créé votre compte, vous choisissez l’évènement que vous voulez, la plateforme, la typologie (bar, salon, concert). En fonction de tout cela, RLTY vous met à disposition une librairie d’immeubles virtuels, il ne vous reste plus qu’à configurer votre building (changer les couleurs, textures, matières). Enfin, vous avez tout un panel de fonctionnalités que vous pouvez configurer en quelques clics. L’outil permet de tout configurer en une quinzaine de minutes.
Ce que nous faisons et que nous allons déployer de plus en plus, c’est vendre un système d’abonnement à l’année avec un nombre d’événements fixes, pour faire en sorte que l’utilisateur ait une dynamique d’animation régulière. Les prix sont dégressifs en fonction du nombre d’événements que vous prenez, et de la taille des buildings.
Vous travaillez également sur la création de votre propre monde virtuel, où en est ce projet ?
R.A. : Depuis plusieurs mois maintenant, nous sommes en train de développer un « métavers fermé” dédié à la création en superposition d’espaces permanents déjà designés. Ces espaces 3D propres à RLTY seront différents de ce que l’on peut retrouver sur Decentraland et The Sandbox – de par des designs graphiques assez évolués, en plus haute définition. Ce projet verra le jour d’ici janvier 2023.