Comment CeraVe a dynamité le discours skincare avec Michael Cera

Par Élodie C. le 04/09/2024 - Agence : Ogilvy Paris

Temps de lecture : 8 min

Le saviez-vous ? L’acteur Michael Cera, aperçu dans la série Arrested Development ou les films Barbie et Juno, a donné son nom à la marque de skincare CeraVe. Mieux, il en serait le créateur. Une vraie-fausse affirmation comme de point de départ d’une campagne au long cours qui a trouvé son apogée lors de la finale du Super Bowl et est depuis multirécompensé (Gold Lions, Clio Awards, nomination aux Emmy Awards, etc.)

Elle a surtout démontré qu’il était possible, si ce n’est urgent, pour les marques de soins de la peau de renouveler leur discours pour se démarquer dans un marché devenu pléthorique et ultra tendance (un petit tour sur TikTok suffit pour s’en convaincre). 

Le coup de génie de cette campagne ? L’insight sous forme de légende urbaine née sur le web déployé IRL et associé à un film parodique absurde, brillant et résolument drôle. 

Pierre-Hubert Meilhac, vice-président, head of PR & influence chez Ogilvy Paris, et Kelly Buchanan Spillers, vice-présidente mondiale de CeraVe, responsable du numérique et des réseaux sociaux reviennent sur l’une des meilleures campagnes des dernières années.

La genèse

Pour peu que vous soyez familier de TikTok et de ses trends, les marques de cosmétiques et skincare comme Typologie, The Ordinary, Erborian et donc CeraVe ne vous sont pas étrangères. Chacune y va de son packaging et de son identité, mais le discours et les points différenciant restent difficiles à trouver. Aujourd’hui, toutes ces marques mettent en avant leur expertise, leurs ingrédients actifs et formules cliniques connus et reconnus pour leurs résultats. Comment émerger ?

Chez CeraVe, l’objectif initial, voire final, de la campagne devait intervenir lors de la grande messe publicitaire du Super Bowl. La campagne devait y trouver son point culminant, et non son point de départ, comme la grande majorité des publicités projetées ce soir-là. 

Le spot de 30 secondes pour le Super Bowl était certes prévu, mais le véritable enjeu pour la marque était de positionner CeraVe au cœur des conversations bien avant le jour J, en réaffirmant son leadership sur le sujet des céramides, se souvient Pierre-Hubert Meilhac. Il s’agissait de mettre en avant l’approche professionnelle et dermatologique de CeraVe, face aux multiples discours contradictoires circulant sur les réseaux sociaux. L’objectif était de rappeler que derrière la marque, il y a des experts dermatologiques.

CeraVe étant une marque profondément ancrée dans la culture et les médias sociaux, nous savions que la présence inaugurale de la marque au Super Bowl devait être plus grande et plus audacieuse qu’une publicité télévisée traditionnelle, créant une conversation, un voyage divertissant que tout le monde peut apprécier, engager et commenter. Les gens n’aiment rien de plus que de faire partie d’une histoire !”, explique Kelly Buchanan Spillers, vice-présidente mondiale, responsable du numérique et des réseaux sociaux.

L’initiative de cette campagne inédite vient des holdings de WPP et a été redirigée vers Ogilvy, partenaire du groupe, précise Ogilvy Paris. “Grâce à notre organisation, un seul compte d’exploitation, donc pas de bataille de chapelle pour savoir où va le budget.  L’opportunité de partir des PR s’est fait ressentir et s’est confirmée, c’est pour cette raison qu’Ogilvy PR a orchestré cette campagne, en réunissant tous les experts nécessaires autour de l’équipe RP. « 

La campagne

  • influence 360°

La campagne “Michael CeraVe” a débuté trois semaines avant le Super Bowl avec une phase de rumeurs orchestrée par des influenceurs (Bobbi Althoff, Caleb Simpson, Dr Muneeb Shah, Haley Kalil). On voyait Michael Cera signer des produits CeraVe en pharmacie et les distribuer dans la rue. Ces actions ont été relayées sur les réseaux sociaux et reprises par des médias traditionnels. 

@cerave

Can always count on Dr. Shah, a real, board-certified derm, for chasing the facts. #DevelopedWithDerms

♬ original sound – CeraVe

Juste avant le Super Bowl, CeraVe a commencé à intervenir dans la discussion, contestant les déclarations de Michael Cera, ce qui a maintenu le suspense jusqu’à la révélation finale pendant le Super Bowl. “Avant même la diffusion du spot, la campagne avait généré plus de 6 milliards d’impressions, atteignant 32 milliards au total”, se remémore Pierre-Hubert Meilhac.

  • création d’un site internet 

iamcerave.com

  • le teaser
  • le film du SuperBowl

À rebours des messages et campagnes du secteur, CeraVe adopte un parti pris original et va chercher l’idée centrale de la campagne dans les tréfonds d’Internet. Une légende urbaine apparue il y a 7 ans de ça sur un forum Reddit : Michael Cera serait lié à la marque depuis longtemps. Son nom de famille n’étant pas anodin, comme le confirme le head of PR et influence d’Ogilvy Paris : « Il y avait cette vieille légende urbaine autour de Michael Cera et CeraVe qui traînaient sur les réseaux sociaux. Et c’est parti, comme souvent, d’un listening social pour voir un petit peu ce qui se disait sur la marque.« 

La marque a joué le jeu et laissé planer le doute jusqu’à démentir la théorie pour réaffirmer son message : “CeraVe, première marque de soins recommandée par les dermatologues aux États-Unis, est et a toujours été développé avec des dermatologues depuis 2005. En fait, le « Ve » signifie MVE Technology et « Cera » se réfère aux « céramides », pas à Michael Cera.

« Nous avons travaillé pour intégrer les influenceurs les plus influents, les dermatologues et même la marque CeraVe dans la conversation pour rendre cette campagne inattendue incontournable et emmener les gens dans un voyage allant de la propagation de fausses rumeurs selon lesquelles « CeraVe est développé par Michael Cera » à « CeraVe est développé avec des dermatologues », confirme ainsi Kelly Buchanan Spillers.

Pour la première fois, la publicité est intervenue à la fin de la campagne. D’habitude, on commence par concevoir une publicité, puis on pense aux déclinaisons pour les réseaux sociaux, les influenceurs, et à créer de l’engouement médiatique autour”, rappelle Pierre-Hubert Meilhac.

La place de Michael Cera

Tout était centré sur lui dès le début, et cela a été un élément clé qui l’a beaucoup amusé. Il s’est véritablement investi, appréciant particulièrement de pouvoir apporter sa touche créative. L’objectif n’était pas simplement de signer un contrat d’ambassadeur classique, mais de l’inciter à s’impliquer activement dans le projet. Cela l’a immédiatement intéressé, d’autant plus que le défi était de taille : il n’a aucun compte sur les réseaux sociaux comme Instagram ou Twitch. Il a donc fallu trouver des moyens de relais sur les réseaux sociaux et l’intégrer dans différents contenus. D’où l’idée de cette première phase basée sur des rumeurs, où on le voit par exemple dans une pharmacie en train de signer des produits ou en distribuer dans la rue. Cette phase a été soigneusement orchestrée”, précise Meilhac.

Le case study 

Les résultats

Un immense succès” : 

– 32 milliards d’impressions ;
– 2 000 publications earned media ;
– une augmentation de 25% des ventes ;
– une hausse de 2 200% des recherches sur CeraVe
– Élue publicité du Super Bowl la plus efficace sur TikTok ;
– Grand Prix en Social et Influence aux Cannes Lions 2024 ;
– Gold aux Influencer Marketing Awards ;
nomination aux Emmy Awards, catégorie “Outstanding Commercial” ;
Super Clio de la meilleure pub du Super Bowl ;
– 5 Grand Clio aux Clio Health Awards (Creative effectiveness, Film, Integrated, Partnerships et collaborations, RP).

Cette campagne a redéfini le rôle que peut jouer une marque de soins de la peau dans la culture. En règle générale, les publicités pour les soins de la peau sont sérieuses, essentiellement axées sur les caractéristiques du produit et fortement axées sur la relativité et la familiarité. Ce spot a bouleversé le scénario archétypal de la publicité pour les soins de la peau en attirant les téléspectateurs avec un message hilarant. Un drame maladroit conçu pour piéger l’Amérique et la ravir avec une résolution aussi choquante qu’inattendue le dimanche du Super Bowl. Nous avons fait une #adcool”, se félicite Kelly Buchanan Spillers.

Les 3 clés de succès

– Un brief ouvert
Le client a eu l’intelligence d’aborder le brief de manière totalement ouverte, sans se soucier de savoir si l’idée venait de l’agence de relations publiques ou de l’agence de publicité. L’objectif était de créer une véritable campagne qui résonne, et pas seulement de produire un simple spot pour le Super Bowl avec quelques déclinaisons.Pierre-Hubert Meilhac

– Une collaboration interdisciplinaire
Chez Ogilvy, les experts PR et les créatifs publicitaires travaillent main dans la main. Historiquement néanmoins, on a plutôt eu tendance à les opposer – l’une axée sur la culture du ‘earned media’, et l’autre sur le ‘paid media’, avec d’un côté une approche créative et de l’autre un focus sur l’activation. Cette collaboration intégrée a permis de marier ces deux cultures, assurant une campagne cohérente et efficace.

– Une co-création avec Michael Cera et les influenceurs
La campagne a été réussie grâce à la capacité de co-création avec Michael Cera et les influenceurs. L’idée n’était pas de simplement choisir une égérie, surtout que Michael Cera ne correspond pas au modèle d’une égérie traditionnelle. Le client a montré une grande intelligence en acceptant de lâcher prise et de permettre une liberté créative, garantissant que la campagne reste authentique et en phase avec l’univers de Michael Cera, ce qui a fortement contribué à son succès.

Du côté de CeraVe, Kelly Buchanan Spillers conclut : “Pour réussir cette campagne, nous devions nous assurer que nous étions pleinement engagés dans la farce. Nous devions penser au-delà de la simple tentative d’être drôle ou de faire rire, et plutôt rendre le tout si incroyable qu’il capterait l’attention des consommateurs par sa valeur comique.

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