Comment Amazon a réussi le retour de la série « Jack Ryan » grâce à l’e-commerce

Par Élodie C. le 06/02/2020

Temps de lecture : 7 min

C’est ce qui s’appelle une synergie.

2020 est annoncée comme l’année qui verra s’affronter les plateformes de SVOD pour le trône de leader aujourd’hui détenu par l’ogre rouge Netflix. Les acteurs ne manquent pas, Hulu, Apple TV+, Amazon Prime Video, HBO Max, Peacock (NBCUniversal) : cette semaine, le dernier nouveau venu Disney+ a bombé le torse en annonçant 28,6 millions d’abonnés à son service seulement deux mois et demi après son lancement.

Dans ce paysage saturé, comment se démarquer lorsque l’on est un acteur de la SVOD déjà bien installé ? Comment faire valoir sa singularité tout en promouvant une offre encore mal appréhendée ? C’est tout l’enjeu de la mission confiée à l’agence Herezie, première agence française d’Amazon Prime Video depuis son arrivée en 2016. Paul Marty, directeur de la création d’Herezie, lève le voie sur une activation menée tambour battant, en seulement 24h chrono, pour la sortie de la nouvelle saison de Jack Ryan dans ce nouveau bilan de campagne.

Le contexte

Déjà poids lourd du e-commerce, Amazon lance son service Prime Video en France en décembre 2016 avec des séries comme Transparent et The Man In The High Castle. Netflix est déjà présent depuis septembre 2014 dans l’Hexagone et affolera bientôt les compteurs. Pourtant, face à une concurrence de plus en plus féroce, qui déploie une communication et des activations tous azimuts (notamment sur les réseaux sociaux), Amazon ne s’est toujours pas offert les services d’une agence française pour promouvoir ses offres, trois ans après son arrivée sur le territoire. Ce sera chose faite en 2019 avec Herezie qui gère désormais sa présence sociale (dont le compte Twitter Amazon Prime Video France) sur tous les supports (events, influence, print avec interaction sociale, partenariats). Comme l’explique Paul Marty, directeur de la création chez Herezie, “Amazon Prime manquait jusque là de temps forts et se contentait de décliner en français des campagnes monde. Quand en face, Netflix en sort un par semaine.” À présent, Herezie vise un temps fort tous les trois mois, à l’instar de #AmazonDubbingExperience.

En outre, la firme souffre d’un manque de compréhension de son offre Prime. En s’abonnant à Prime, l’utilisateur bénéficie en plus du service de livraison gratuite en 24h, de Prime Video donc, mais également de Prime Photos (espace de stockage illimité sur Amazon Drive), de Twitch Prime, Prime Music (2 millions de titres par mois sans publicité), Prime Reading (soit un catalogue de plusieurs centaines d’ebook) et autres avantages. Ce dont peu d’utilisateurs et prospects ont conscience.

Partant de ce postulat, nous nous sommes dit qu’il y avait des ponts à faire entre les différents services de la marque Amazon, explique Paul Marty. L’avantage de cette idée-là est qu’elle reposait sur l’utilisation de deux services, dont Delivery qui cartonne. Pour jouer, il fallait nécessairement être un membre Prime afin de regarder la série Jack Ryan, et ensuite se faire livrer l’objet en question. » Herezie pouvait ainsi faire la démonstration et la publicité de deux produits de l’offre Amazon Prime en incitant les utilisateurs à se servir des deux plateformes. 

La campagne

Amazon Binge Shopping

Découvrez aujourd’hui sur Twitter le #AmazonBingeShopping !Une expérience de binge watching un peu particulière autour de #JackRyan via laquelle vous pouvez gagner…tous les objets de la série qui sont aussi présents sur Amazon.Fr (et ne vous inquiétez pas, le catalogue est…assez complet ?)Une manière de faire le pont entre le monde de l’entertaining et du retail…dont SEUL Amazon Prime Video a le secret.

Publiée par HEREZIE sur Mardi 5 novembre 2019

Ce bilan de campagne a ceci de peu commun qu’il revient sur une activation de 24 heures seulement. L’agence a ainsi fait le choix de se concentrer sur les premières 24h pour plusieurs raisons nous explique le directeur de la création d’Herezie :
– “C’est un temps fort qui avait pour vocation de ne durer que 24h dès le départ. #AmazonBingeShopping n’avait plus d’intérêt le lendemain de son lancement.
– Nous n’en sommes pas encore à penser prix, mais un jury qui juge des campagnes américaines, asiatiques et ensuite une campagne française à 20 millions d’impressions, c’est peanuts. Cela n’avait aucun intérêt ici d’aller chercher de gros chiffres, car nous n’arriverons jamais à la cheville d’une campagne déployée dans un grand pays. C’est pour cela que nous ne l’avons même pas inscrit en PR. Même si ça marche en France, c’est tout petit pour ce genre de case. Nous sommes en revanche pertinents sur 24h et les statistiques ne sont pas ridicules
.”

La campagne s’est déroulée en trois temps à travers un trending topic sponsorisé pour lancer l’opération en 3 étapes. 

De minuit à 10h du matin, un teasing vidéo avec le hashtag de l’activation donnait rendez-vous aux internautes à 10h. À l’heure dite, le TT redirigeait vers le post de lancement et dès le concours achevé le TT a servi à mettre en avant une vidéo de remerciements pour tous les participants. “C’est le seul achat média de l’opération, confie Paul Marty. Tout le reste a été de l’organique. Nous avons réalisé un plan d’influence très léger, comparé à la DubbingExperience par exemple, soit deux, trois relais. Tous les autres influenceurs ayant relayé l’opération l’ont fait d’eux-mêmes, car ils voulaient gagner, comme tout le monde. Je travaille avec un adblock, et je voyais quand même #AmazonBingeShopping en TT sans la partie sponso, ce qui traduit bien le succès de l’opération”, se félicite le créatif.

Les objets susceptibles d’être gagnés ont-ils été sélectionnés à l’avance ? Comme le confie Paul Marty, à l’origine, l’idée n’était pas tant de lancer un jeu concours pour faire gagner des produits, que de démontrer l’étendue du catalogue d’Amazon.fr. “Nous avons pris une série qui n’a pas été produite ni conçue pour cette activation-là et pourtant tous les objets choisis par les participants sont disponibles sur le site de e-commerce. C’est une démonstration que l’on trouve presque tout sur Amazon”, explique le directeur de la création. Il n’y a pas eu de choix, certains participants ont choisi de gagner un sac plastique, un canapé, du cellophane, tout objet (sauf les avions et les armes évidemment) pouvait être désigné.” Le règlement précisait simplement (après des mois de travail avec des avocats tout de même) qu’il fallait trouver un objet identique ou très similaire sur le site pour le gagner. “Il y avait une nuance juridique indispensable, précise Paul Marty : “Par exemple, si on observait le verso d’un iPhone sur une capture d’écran envoyée, sans pouvoir faire la distinction entre le 8 et 7, ça marchait. Mais pas avec le 11, trop identifiable avec ses trois objectifs. »

Le case study

Les résultats

• 400 000 vues sur le compte Amazon Prime Video Fr en une matinée ;
• + 5000 tweets en 24h ;
•  + 30M impressions sur Twitter dans les premières 24h ;
• Trending topic Fr en 24h ;
• +160% de vue en 24h ;
Et tout cela pour un budget chèque cadeau dérisoire.

L’opération a bénéficié de retombées presse en France évidemment et quelques reprises à l’étranger, comme en Italie (notamment grâce au président d’Herezie, Andrea Stillacci, qui bénéficie d’un important réseau là-bas), en Belgique dans la presse flamande également et dans la presse spécialisée britannique.

Une V2 est-elle en projet ? Paul Marty nous prévient qu’il faut “prendre cela avec des pincettes” : “Il se peut que l’opération soit rééditée, mais dans d’autres pays ». #AmazonBingeShopping est devenu un “best case chez Amazon Prime Video” France. Les équipes l’ont partagé en interne et d’autres pays sont désormais intéressés. La V2 de l’opération #AmazonBingeShopping verra donc probablement le jour dans d’autres pays où Prime Video est disponible. En France, si une V2 voit le jour ce sera “dans un gros second temps”, précise Paul Marty, “peut-être en fin d’année.

Les clés du succès

– “Vu à la télé”
Au-delà du simple jeu-concours, Amazon Prime Video proposait ici de gagner un objet aperçu dans une série télé. Qui n’a jamais souhaité acquérir un objet ou une tenue repérée dans Friends, Sex And The City ou l’un de ses programmes favoris ? C’est d’ailleurs tout l’objet du site Spotern.

De plus, il y avait une certaine créativité dans l’offre : les gens choisissaient ce qu’ils voulaient gagner. “Certains se sont mis à participer pour gagner une coque ou un tube de cellophane. On savait que l’on pouvait gagner des objets, mais on ne savait pas lesquels. Certains ont été créatifs, rigolos et se sont mis à chercher des objets auxquels personne ne pensait”. En effet, chaque objet n’était gagnable qu’une seule fois, donc une fois le smartphone ou la console d’une séquence de la série gagnée, le produit ne pouvait plus être mis en jeu. Certains se sont alors tournés vers des objets insolites comme un canapé, un cadre, une cafetière, une sculpture, etc. 

– 24h chrono
Le temps très court de l’activation a sans doute contribué à l’émulation suscitée et à maximiser sa portée. Les utilisateurs ont fondu sur le hashtag #AmazonBingeShopping contribuant à le propulser en TT France.

– e-commerce & streaming
Seul Amazon pouvait se permettre une telle opération dans l’univers de la SVOD puisqu’aucun de ses concurrents ne possède de plateforme de e-commerce. Aussitôt vu, aussitôt commandé. La firme démontre ainsi toute l’étendue de son catalogue, et se distingue de la concurrence avec son offre Prime qui va bien au-delà d’un simple catalogue de contenus vidéos. Imaginez un instant qu’Amazon décide de croiser véritablement binge watching et e-commerce ?

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Letter to to the Future pour Accor

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