Quelles innovations marketing à l’approche des JO de Paris 2024 ?

Par Élodie C. le 11/04/2024

Temps de lecture : 23 min

On ne demande qu'à être surpris.

À bientôt J-100 de l’ouverture des Jeux Olympiques de Paris, le pays et sa capitale se préparent à 4 mois de célébration sportive. Sponsors, partenaires et supporters officiels se mettent en ordre de bataille pour faire de ces Jeux une réussite et tenter de tirer son épingle du jeu dans le flux de prises de parole attendues : 77 partenaires (63 domestiques et 14 mondiaux) sont sur la ligne de départ.

Alors que le monde aura les yeux rivés vers Paris, ce carrefour d’audience et la visibilité qu’il offre pourraient inciter des marques non partenaires à tenter l’embuscade sous les radars aiguisés du CIO, du comité d’organisation olympiques (COJOP)… et des marques, peu enclines à se faire voler la vedette et un ticket d’entrée chèrement payé. 

Qu’est-on en droit d’espèrer de ces XXXIIIe Olympiades ? Que viennent chercher les marques et quelles innovations préparent-elles ?

Nous faisons le point avec agences, partenaires et diffuseur officiels, ainsi que des observateurs avisés du monde du sport.

Esprit JO, es-tu là ?

Quatre ans que la France vibre au rythme des Jeux Olympiques. Du moins dans les médias et dans les rues de la capitale où les travaux extérieurs succèdent à ceux sous terre (les 12 travaux du métro bien connus des Parisiens). Du côté des marques partenaires/supporteurs, il en va de même. L’enjeu étant de s’inscrire dans cet événement monde et de faire résonner sa marque. Pour cette édition 2024 à Paris, près de quatre milliards de téléspectateurs sont espérés dont un milliard rien que pour la cérémonie d’ouverture. 

En France, le sponsoring sportif est une manière pour les marques de s’intégrer dans l’industrie sportive afin d’atteindre leur audience et d’en conquérir de nouvelles. Cette stratégie est un gage d’awareness (visibilité) et de considération pour les marques. Depuis avril 2023, la mémorisation des marques et sponsors lors d’événements sportifs en France a connu une croissance de 21%”, rappellent Samir Bousaïd, head of Social Intelligence, et Félix Rauturier, analyste senior chez We Are Social.

Le sponsoring sportif serait même en “constante progression” depuis une décennie : les 10 contrats les plus importants en France représentaient 215 millions € en 2021 / 2022, contre 120 millions € lors de la saison sportive 2011/2012 (source Nielsen Sports). 

Toutefois, les Jeux Olympiques ne sont pas un “simple” sponsoring sportif comme la Coupe du monde de football peut en être un, qui plus autour du sport star de la planète : 47 disciplines sont au programme olympique cette année autour de 10 500 athlètes, dont 248 Français. Les marques qui prennent la parole doivent faire briller les valeurs olympiques et espérer que le transfert de valeurs s’opère, mais l’olympisme fait-il seulement encore rêver ?

Les JO ne font pas partie des imaginaires dominants chez les Français, tranche François Bellanger, co-fondateur du Prospective Sport Lab. C’est le monde du 19e siècle, celui de la compétition de l’horloge, c’est la première révolution industrielle. Le discours se décrépit alors que le récit sportif c’est enrichi. Les JO, c’est le sport pour certains, quand ce qui intéresse aujourd’hui, c’est le sport pour tous. Les JO, c’est le sport dans des lieux définis, quand on veut faire du sport partout. Les JO, c’est le sport des jeunes, alors qu’on voudrait que tout le monde en fasse, y compris les vieux.” Selon lui, cela explique en parti le désintérêt des marques, de sport notamment, pour les JO, quand d’autres, comme LVMH préfèrent communiquer sur l’image de Paris et de la France. “Le lendemain des Jeux, personne ne se souviendra de la place de la France dans le classement des médailles. Il y a une multiplicité d’épreuves, une multiplicité de discours possibles, c’est un flou absolument total, car il n’y a pas d’aspérité. Et surtout, ça ne résonne pas avec les imaginaires actuels”, conclut le prospectiviste du sport.

Du côté des publicitaires en revanche, les Jeux représentent une formidable opportunité, malgré les défis attendus : “Paris 2024 réunit les parfaits ingrédients pour imaginer et délivrer des dispositifs de communication innovants : une audience mondiale, une concentration très forte dans le temps, un enjeu fort à émerger parmi la multitude d’annonceurs, et pas de visibilité directe en panneautique dans les stades, souligne Augustin Pénicaud, vice-président de Havas Play, avant de conseiller : Dans ce contexte, pour les annonceurs, innover et surprendre sont même plus que jamais un impératif pour émerger et avoir de l’impact.

Nous sommes face à un événement totalement hors normes, confirme Geoffroy Martin, directeur marketing adjoint offre Multiscreen de FranceTV Publicité. Pour la régie du diffuseur officiel des Jeux Olympiques, l’une des particularités d’un tel événement, c’est son nombre de partenaires. Une particularité “qui a son importance dans les dispositifs qu’on va ensuite construire avec les marques. Il a fallu s’adapter à ce contexte-là.

Les Jeux Olympiques et Paralympiques charrient des valeurs extrêmement fortes et chères aux différentes marques : l’excellence, le respect, la détermination, le courage. Des valeurs sur lesquelles les marques veulent s’appuyer lorsqu’elles sont partenaires. Et l’une des complexités, c’est de proposer à chacune des marques qui souhaitent s’exprimer d’émerger avec le territoire choisi.”

Pour Decathlon, dont ce sont les premières olympiades en tant que partenaire officiel et équipementier des 45 000 volontaires, “Les Jeux sont l’opportunité de montrer un peu plus qui l’on est, d’expliquer la façon dont on travaille, avec les volontaires, avec les athlètes, et tout l’événementiel pendant l’événement, explique Virginie Sainte-Rose, head of partnerships Decathlon pour Paris 2024. Nous ne sommes pas de purs marketeurs, on aborde donc cet événement à notre façon. Notre cœur de métier dans ce partenariat, c’est la tenue des volontaires, pour laquelle les marques ne se battent pas alors qu’ils sont une des clés de la réussite des Jeux.”

Pour Carrefour aussi ce sera une grande première, et la première fois qu’un acteur de la grande distribution est partenaire des Jeux Olympiques. “Nous en sommes évidemment très fiers. Au cœur de ce partenariat se trouve notre raison d’être, la transition alimentaire pour tous. C’est une occasion rêvée d’associer cette mission et cette raison d’être à un événement qui va toucher l’ensemble des Français”, se réjouit Marie-Esther Mathonnat, directrice publicité et média de Carrefour.

Accor “partenaire passionné et établi des institutions et des compétitions sportives dans le monde entier” (Coupe du monde de football 1998 à celle du Qatar en 2022, Roland-Garros, Tour de France ou Coupe du monde de rugby 2023), se dit convaincus que “le sport est capable d’inspirer et de créer des moments uniques” : “Dans le cas des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, c’était donc une évidence de faire partie de cet événement unique en tant que partenaire premium, raconte Stéphanie Dartevelle, VP Sponsorship Europe North Africa du groupe Accor. Au-delà du lien avec le sport, la France, berceau du groupe, est un marché historique et clé pour Accor qui y est leader avec plus de 1 700 hôtels et 23 marques sur le territoire. Ces Jeux seront une magnifique vitrine de la France comme destination touristique de premier plan et une opportunité de montrer au monde entier le meilleur de ce que le pays a à offrir.

What did you expect ?

77 partenaires officiels – 63 domestiques et 14 mondiaux – sont sur la ligne de départ. Chacun voulant “capitaliser” sur l’événement. Avant d’imaginer les futures festivités, précisons déjà le rôle de chacun réparti en trois grandes catégories et établi en fonction des investissements concédés par les marques (de million(s) à plusieurs centaines de millions d’euros pour les partenaires mondiaux) : 

– Les Partenaires Mondiaux 
Le summum du parrainage olympique. Certaines marques, comme Omega, sont partenaires depuis plusieurs olympiades (elle est aussi chronométreur officiel des Jeux Olympiques depuis 1932). Seuls ces sponsors peuvent activer leurs droits marketing à l’international. Des entreprises comme Coca-Cola , AirBnB, Toyota, Alibaba, Samsung ou Visa (qui a obtenu d’être le seul moyen de paiement par CB dans dans les boutiques officielles parisiennes des Jeux Olympiques). 

– Les Partenaires Premium 
Le plus haut parrainage à l’échelle national, au moins 50 millions d’euros le ticket d’entrée. Ce que l’on nomme également les partenaires “domestiques” qui ont financé les Jeux contre de la visibilité et des prises de parole pendant toute la période de Paris 2024, notamment concernant l’Équipe de France : Orange, LVMH, Carrefour, Accor, EDF.

– Les Partenaires Officiels 
Également à l’échelle nationale, mais avec un spectre plus resserré sur l’évènement : Air France, ADP, Danone, Decathlon, le Coq Sportif ou la FDJ.

– Les Supporters officiels
La moitié du nombre total de sponsors de l’organisation : Enedis, La Poste, la RATP.

Les marques communiquent quatre ans en amont. elles n’ont pas ou peu le droit de communiquer pendant la quinzaine, elles ne peuvent pas activer les sportifs, ou communiquer sur les réseaux sociaux selon leur statut de partenariat, explique Julien Delaye, directeur associé d’Eventeam. Il y a pas mal de restrictions et d’embargos.

Qu’attendre de ces marques en terme d’innovation ? Pour Havas Play qui accompagnne une quinzaine de partenaires des Jeux, “une innovation forte en termes d’activation de partenariats, même si pas toujours directement visible, est le fait de réussir à réellement activer le partenariat à 360°, dans toute l’entreprise : en com interne et externe, en activation commerciale, marketing ou produit. L’idée c’est de mettre les Jeux – et l’investissement qu’ils représentent – au service de toute l’entreprise et pas simplement des enjeux de marque.

Augustin Pénicaud poursuit : “Concrètement, cela peut-être l’occasion d’inventer et réussir à déployer un packing produit deux fois plus vite que d’habitude, imaginer des dispositifs de brand content très originaux, réunir et faire travailler ensemble des services qui se parlent peu d’habitude, tester des dispositifs comme du FOOH ou des innovations proposées par les régies et plateformes social media, déployer des dispositifs inédits d’inventive commercial à l’ampleur inédite, toucher des cibles d’habitude inaccessibles – notamment les visiteurs internationaux, etc.

Côté régie justement, FranceTV Publicité travaille à la création d’un billboard commun à tous les partenaires Premium diffusé en début et en sortie des cérémonies d’ouverture et de clôture des Jeux Olympiques de Paris et des Jeux Paralympiques de Paris 2024 (offre partenaire Premium Jeux Olympiques de Paris 2024). « En tant que régie, nous devons anticiper, prendre le temps d’écouter les marques, de comprendre leurs besoins, les enjeux qu’elles expriment, et leurs attentes par rapport à cet événement, à l’activation média ou aux activations média qu’elles voulaient avoir, prend soin de préciser Geoffroy Martin. “Dans un premier temps, nous leur avons proposé de prendre la parole très tôt pour faire connaître ce partenariat au public français. L’association entre une marque et les valeurs des JO est fondamentale.

À l’instant T, François Bellanger fait ce constat cinglant “il y a beaucoup d’argent dépensés, pour pas grand chose de faites du côté des marques partenaires officiels” “Les acteurs traditionnels du CIO quant à eux, Omega, Samsung, Toyota, vont faire ce qu’ils font d’habitude. Ils n’incitent pas à la pratique du sport : Toyota ne vous incite pas à marcher, Samsung vous incite à rester devant votre écran de télé et Coca-Cola à boire du sucre. Ce ne sont pas des sponsors vertueux.

De l’aveu même de Decathlon, la plupart des innovations pensées par la marque interviendront pendant les Jeux, d’ici là motus et une communication parcimonieuse. saviez-vous seulement qu’elle compte une Team Athlètes dont le capitaine n’est autre que le triple champion olympique et onze fois champion du monde de judo, Teddy Riner ?

Avec cette équipe, nous avons tenté de construire un collectif : nous leur avons demandé ce qu’ils voulaient faire, comment ils voulaient communiquer et être habillés. C’est la première fois que ça se passe ainsi, concède Virginie Sainte-Rose. On ne leur demande pas d’être des porte-manteaux qu’on prendra en photo devant la Tour Eiffel ou l’Arc de Triomphe pour communiquer dessus. Je ne peux pas vous dire sous quelle forme cela va se matérialiser, mais c’est un pari qu’on a fait et c’est un pari gagnant.” 

Decathlon collabore avec 33 athlètes, dont 16 sur des projets de co-création (Yohann Diniz, ancien marcheur, est le chef de projet de la team athlètes). “Méline Rollin par exemple est marathonienne et data-analyste chez Decathlon. Nous avons conçu une chaussure avec elle, et elle a battu le record de France du marathon il y a un mois, se réjouit Virginie Sainte-Rose. C’est ça aussi le “Ready to play”, on veut raconter ce type d’histoires, s’inscrire dans cette approche ludique du sport, que ce soit le champion ou le débutant, en appuyant sur cette super accessibilité avec le bon matériel.” 

Nous sommes certes capables d’équiper les volontaires, mais aussi des athlètes de haut niveau et faire en sorte qu’ils battent des records ou aillent chercher la victoire avec notre matériel. C’est une très bonne manière de se distinguer. Nous avons un peu moins d’une centaine de partenariats techniques, mais nous n’en parlions pas. Ça va changer.

Des marques en ambushcade ? 

La tentation est trop belle pour ne pas tenter d’y céder. Alors que les marques partenaires sont contraintes à une prise de parole et une créatitivé ultra encadrées, les marques non partenaires pourraient vouloir participer à la fête et profiter du feu d’artifices sans y avoir été conviées. L’ambush marketing (le marketing d’embuscade donc) pourrait peut-être créer la surprise et donner des sueurs froides au COJOP dont la responsabilité est de garantir l’exclusivité (et par la même, la valeur acquittée) des droits acquis par l’ensemble des partenaires domestiques et mondiaux (pour un quart de son budget).

L’une des applications particulières du parasitisme est connue sous le terme anglais d’ambush marketing, traduit en marketing d’embuscade qui consiste à se placer indûment dans le sillage d’un grand évènement, notamment sportif, à le parasiter, et ce en tirant indûment profit des investissements et efforts déployés par les Titulaires de droits. Les sanctions seront déterminées au cas par cas selon le préjudice subi parla victime d’acte de concurrence déloyale et/ou de parasitisme.

Paris 2024 – Brand Protection

Un véritable jeu d’équilibriste pour les marques qui voudraient tirer la couverture sur eux, sans enfreindre les règles. Et elles sont nombreuses. Comme le rappelle L’Équipe dans son dossier du 3 avril dernier, les embuches sont nombreuses, mais la principale règle à respecter par les non partenaires est l’interdiciton d’user des “propriétés olympiques (symboles, emblèmes, terminologies, devises, images, marques déposées par Paris 2024). Plus de 175 marques, 1 000 noms de domaines ou encore 40 dessins et modèles ont été déposés auprès de l’Institut national de la propriété industrielle(INPI).” Le terrain est balisé. Le quotidien rappelle qu’à la mi-février, “1 500 produits avaient été retirés ou détruits.

On sera peut-être être surpris par des marques non sponsors en guerrilla/ambush marketing. Avec les réseaux sociaux, il y a de quoi faire un coup. Est-ce que ça vaut encore le coût de payer des millions en spots télé?”, se demande François Bellanger.

Le programme de protection des assets olympiques est extrêmement contrôlé”, prévient Magali Tézenas du Montcel, directrice générale de Sporsora dont l’organisation a mené une conférence avec des avocats et les directeurs juridiques de Paris 2024, pour exposer les limites de l’ambush marketing. “Les partenaires du sport non partenaires des Jeux olympiques ne bougeront pas d’un orteil. Ils feront très attention car ils sont habitués à ces règles et n’apprécient que moyennement l’embush marketing quand ils sont eux-mêmes partenaires. Les marques opportunistes feront des coups. mais c’est risqué car très surveillé par le COJOP et les marques partenaires.

La visibilité se fait en amont, par les activations à côté des stades. Beaucoup d’entreprises non partenaires, par manque de moyens, veulent profiter des Jeux pour en faire un moment unique, explique Julien Delaye. Elles achètent des packages pour inviter des clients, faire une journée team building, ou nous demandent de faire de l’ambush marketing pour surfer intelligemment sur les Jeux, sans utiliser ses signes distinctifs, les anneaux olympiques, rentrer sur les sites, faire des publications sociales, etc.” 

Mais les sanctions sont limitées. Dans son rapport Brand Protection, sur “La concurrence déloyale et le parasitisme : le marketing d’embuscade”, Paris 2024 explique : “Selon le droit civil français, toute faute causant un préjudice engage la responsabilité civile de son auteur et l’oblige à le réparer (articles 1240 et 1241 du code civil)”. Toutefois, celui-ci reste difficile à prouver et à estimer, contrairement à la valorisation d’une visibilité hautement hackée. Même sanctionnée, la faute reste lucrative pour son auteur, s’y attaquer c’est risquer de donner encore plus de visibilité à la marque auteure de l’ambush.

Pour François Bellanger, outre ces restrictions, le caractère même de l’évènement limite les marques : “Il y a un manque de créativité, car les JO doivent faire plaisir à tout le monde, il n’y aura donc pas de messages clivants. Espérons qu’il y ait un peu d’humour, comme lors des Jeux Olympiques de Los Anngeles en 1984 : en août, Carl Lewis gagne toutes les épreuves. Nike déploie une campagne dans Paris, sur les abribus, « Carl, arrête, on va se faire remarquer ». Mais Nike peut se le permettre, car la marque s’est construite contre ce monde de la compétition et des vainqueurs pour leur préférer les finishers.” 

Dans le même esprit, Augustin Pénicaud estime que créativement, “on retrouve la dynamique du Superbowl ! Les spots s’enchaîneront et il y a un vrai enjeu à articuler sens et surprise pour émerger, tout en parlant à un public très large et en maniant des codes communs : les athlètes, le sport et ses valeurs. Les clefs seront comme souvent le bon dosage d’émotion, d’humour, d’esthétique et parfois d’extravagance ! C’est l’occasion pour les marques et nos créatifs d’explorer des territoires d’expression inédit.

À vos marques, émergez !

Responsabilités
C’était une promesse de candidature de la ville de Paris, organiser les Jeux les plus responsables et inclusifs qui soient. D’après une étude Seedtag sur les sujets et marques plébiscités par les internautes dans le cadre des JO de Paris 2024, les sujets liés aux innovations et à la durabilité (30%) et à l’impact économique et à la transformation urbaine (30%) sont les plus plébiscités. les marques devraient donc logiquement les inclure dans leurs prises de parole et innnovations.

Accueillir en France plus de 16 millions de visiteurs, c’est l’occasion pour ne pas dire l’obligation d’accélérer la mise en œuvre d’actions essentielles sur des thématiques RSE, appuie Augustin Pénicaud (Havas Play). Je pense par exemple à l’accueil des personnes en situation de handicap pour Accor. Sujet essentiel sur lequel le groupe agit fortement depuis des années : les Jeux sont une occasion exceptionnelle de le faire savoir et déployer à plus grande échelle avec des dispositifs innovants.

Ce que confirme Stéphanie Dartevelle (Accor) : “Notre visibilité sera plus importante au moment des Jeux Paralympiques, avec par exemple la présence du groupe lors de la Cérémonie d’ouverture des Jeux Paralympiques le 28 août prochain. Déjà engagés depuis plusieurs années sur les enjeux d’inclusion et de diversité, nous accélérons nos actions en amont des Jeux pour assurer le meilleur des accueils. Cela passe notamment par la labellisation « Tourisme & Handicap » de nos hôtels français ou le développement de notre Smartroom, notre chambre innovante qui allie expérience et design à tous les standards PMR.

Le comité d’organisation des Jeux Olympiques a voulu sortir du cadre en mettant l’accent sur des Jeux responsables, il y aura donc beaucoup d’innovations, ne serait-ce que dans les infrastructures du village olympique par exemple, avec des modes de réfrigération innovants, le lit des athlètes en carton – donc recyclables, poursuit Magali Tézenas du Montcel (Sporsora). Tout doit avoir une seconde vie. La piscine olympique a une structure en bois avec une toiture concave pour consommer moins d’énergie. Les Jeux sont une très belle vitrine pour démontrer l’innovation technologiques des marques. Des choses jamais faites auparavant sur un événement sportif et qui vont rester pérennes.

Cette ligne RSE plaît aux entreprises, c’est autant dans leur stratégie marketing et communication depuis plusieurs mois qu’une volonté du comité olympique et de la candidature de Paris 2024. Des marques comme Toyota et Orange n’ont pas attendu l’attribution et le partenariat avec Paris 2004 pour en faire un axe majeur de leur business”, rapelle Julien Delaye (Eventeam).

En plus de la mobilité, Toyota s’est aussi emparé d’un sujet d’inclusivité avec le Toyota Wheel Park donc FranceTV Pub se fait le porte-voix en diffusant un documentaire sur la plateforme France.tv : “Toyota est le partenaire mobilité des Jeux et avait à cœur d’amener de la mobilité à tous car c’est un enjeu très social”, précise Geoffroy Martin. L’ambition de Toyota était de permettre à des gens en situation de handicap de participer à ce projet, de pouvoir avoir accès à ces skatesparks dits  « hybrides » et d’en faire des skateparks utilisables aussi pour les valides. Ils ont inversé la logique.” Toyota souhaitant évoquer les coulisses et de la genèse du projet, France TV a réalisé “une émission spéciale avec Samuel Etienne et Zack Nani, une personnalité très influente de la Gen Z. Ce format a permis à cette opération de rayonner particulièrement sur les jeunes publics grâce à ces contenus très immersifs diffusés sur nos plateformes propriétaires et sur Twitch.

Activations
Du côté des marques partenaires, plusieurs activations sont déjà à l’oeuvre.

Orange
Julien Delaye (Eventeam) précise ainsi qu’Orange devrait se distinguer grâce à ses solutions 5G : “Le réseau sera très saturé, notamment pour la cérémonie d’ouverture, puisqu’elle aura lieu dans Paris, et non dans un stade, avec potentiellement 300 000 personnes, voire plus, qui seront présentes et voudront être connectées. C’est une certitude aujourd’hui, personne ou presque n’aura plus que la Edge pour patienter, appeler et faire des photos à ces moments-là. Ce sera totalement saturé. Sur les différents sites officiels, Orange déploiera cette solution-là, vous allez pouvoir vous y connecter (avec les codes Wi-Fi) si vous êtes à proximité. Et les organisateurs, tenus d’être connectés, s’en serviront nécessairement.

Eventeam, qui accompagne Orange sur la partie hospitalité, pense que la marque va profiter de l’occasion pour lancer une importante opération de communication et de marketing. L’idée ? “Montrer que dans un espace saturé, ils sont les seuls à pouvoir fournir en live une bonne connexion, un bon streaming, une bonne retransmission des épreuves olympiques sur les écrans géants ou dans les espaces VIP auprès des leaders d’opinion”. 

Decathlon
Pour Decathlon, l’innovation se situe notamment dans la conception des tenues des volontaires et le traitement qui leur a été donné : L’enseigne est ainsi sortie “de la traditionnelle tenue polo-pantalon-parka”, avec un pantalon modulable, un gilet transformable en boléro, un bob et une banane par exemple. “On a vraiment travaillé l’usage et notre cœur d’image, l’innovation. Non pas marketing, mais usage produit. Nous voulions mettre les volontaires sur un piédestal, de façon plus poussée qu’ils ne l’ont été jusque-là, explique Virginie Sainte-Rose. C’est grâce aux volontaires que les Jeux fonctionnent, on voulait leur faire vivre une véritable expérience.” 

Pour cela, et c’est également une première pour un équipementier, Decathlon assurera la distribution “dans un lieu très sympa, au cœur de la capitale : il est très important que ces 45 000 personnes, de tous âges, venant de France et du monde entier, se sentent considérées par la marque.” N’est-ce pas là aussi une formidable opportunité d’installer sa nouvelle identité de la marque ?

Le partenariat a été signé en 2021 et la nouvelle identité a été décidée avec l’arrivée de la nouvelle CEO Barbara Martin Coppola, il y a un peu plus de deux ans. “Les JO sont une opportunité particulièrement intéressante, en tant qu’équipementiers, nous sommes les seuls à avoir accès aux “Fields of play” (les terrains de jeu) et au site de compétition, les volontaires porteront  la nouvelle identité de marque et le nouveau logo sur ce site. C’est une visibilité mondiale sur un événement sportif premium, le plus prestigieux. Effectivement, c’est un beau strike, si on peut le dire ainsi”, assume la responsable des partenariats pour Paris 2024.

Accor
C’est en surfant sur des temporalités fortes des Jeux, tout en développant des animations inédites en lien avec leurs ADN respectifs que nos marques (Ibis, Mama Shelter, Mercure, The Hoxton, etc.) peuvent faire la différence, explique le groupe hotelier français. C’est donc un plan marketing intégré qui a été conçu pour répondre à cet évènement unique.”

Au-delà des animations prévues dans les hôtels et l’opération des villages des athlètes et des médias, Accor prévoit de mettre le programme de fidélité et la plateforme de réservation ALL – Accor Live Limitless au cœur de son dispositif : “Pour la première fois dans l’histoire des Jeux, le CIO a accepté un partenariat avec un programme de fidélité à une édition des Jeux Olympiques et Paralympiques, poussant l’implication de Accor au-delà d’un simple parrainage hôtelier”. Les membres vont ainsi pouvoir bénnéficier d’une large palette d’activités et de « Limitless Experiences » (offre de nuitées combinées à des activités exclusives) “pour se créer des souvenirs inoubliables” : billets pour des compétitions, accès aux coulisses, rencontres avec des athlètes olympiques et paralympiques, soirées spéciales avec les équipes Paris 2024, etc. “Nous venons par exemple de lancer le site dédié ALL x Paris 2024 qui permet aux membres ALL d’utiliser leurs points Rewards autour de tombolas et d’enchères de packages exclusifs pour vivre les Jeux d’une manière unique”, précise Stéphanie Dartevelle.

Carrefour
Le groupe français entend faire de sa raison d’être, de l’univers de manger sain, de produits frais, le centre de toutes ses communications. “Notre dernière campagne publicitaire avec Teddy Riner en est le reflet : elle met en avant la qualité de nos produits frais qui seront consommés à la fois par les athlètes de Paris 2024 et par tous les Français”, explique Marie-Esther Mathonnat.

Carrefour a ainsi mis en place le programme Club de sport l’été dernier où les clients peuvent cumuler des points (cagnotte carte de fidélité) en achetant des produits bio ou avec un Nutri-Score A. “Ils peuvent ensuite faire don de ces points à leur “club de cœur” amateur qui pourra les échanger contre des dotations d’équipement.” Le programme va se poursuivre jusqu’aux Jeux, et peut-être après. Des challenges sont organisés tous les mois pour permettre aux différents clubs de gagner des dotations supplémentaires. “Nous avons récemment fait gagner des minibus aux couleurs des clubs. Il y a évidemment beaucoup d’émulations parmi tous les adhérents et les inscrits des différents clubs.

Enfin, le partenaire premium a lancé une web série avec France Télévision dans laquelle 6 athlètes de la team Carrefour partagent un moment avec Agathe Le Caron autour d’une recette et échangent sur des sujets qui leur tiennent à cœur, sur la nutrition ou les moments de récupération par exemple. “Qu’est-ce que Teddy Riner mange la veille d’un combat important ? Quels aliments privilégie Alexis Hanquinquant pour la performance ? Laura Flessel s’autorise-elle quelques gourmandises ? Six épisodes vont être diffusés jusqu’à la fin des Jeux. Cette initiative nous permet de valoriser  notre mission de rendre accessible à tous le mieux manger et de promouvoir des modes de vie sains autour de l’alimentation et de la nutrition.” 

Les JO du ROI ?

Au delà de la visibilité promise, que viennent chercher les marques sur un tel événement et quel ROI peuvent-elles en attendre ? “Les marques s’intéressent à plusieurs KPI, explique-t-on chez FranceTV Publicité : “Elles veulent montrer et faire savoir qu’elles sont engagées pour la réussite de ces Jeux et qu’elles y contribuent . C’est un vrai point distinctif par rapport aux précédents événements côté régie (…) Il y a bien évidemment des objectifs plus ROIstes derrière, mais ce n’est pas le sujet qui ressort le plus. L’engagement est la priorité des marques aujourd’hui et ces marques partenaires souffrent d’ailleurs rarement d’un déficit de notoriété puisqu’on parle de grandes marques françaises : LVMH fait beaucoup plus que simplement communiquer. Ces marques sont vraiment dans la co-construction de l’événement en tant que tel.

Une co-construction et une implication qui s’explique par le territoire sur lequel se déroule les Jeux. “60 à 70% des partenaires olympiques changent tous les quatre ans, hors partenaires mondiaux majeurs, comme Coca-Cola, qui ont une stratégie long-termiste avec des enjeux sur tous les continents, analyse Julien Delaye. Les partenaires domestiques s’inscrivent dans un sentiment patriotique, un intérêt local, certainement politique/lobbyiste. On ressent comme un devoir moral et un point d’honneur à être présent sur leur Olympiade, ils laisseront donc la place lors des Jeux américains. C’est ce qui explique cette obligation d’impact sur le territoire local, cet héritage à laisser après les Jeux.

Aucune étude officielle ou non officielle ne vient prouver l’intérêt de sponsoriser les JO. Il n’y a pas nécessairement d’impact sur la consommation et l’image que ça peut apporter, observe François Bellanger. Ce n’est pas nécessiarement gratifiant d’être sponsors des Jeux dans le sens où cela donne de la visibilité, mais est-ce que cela fait gagner des parts de marché ? Des arbitrages sont faits et la question de l’opportunité n’est pas tranchée. Le sport a fondamentalement changé depuis une trentaine d’années, il a “mangé” le monde, il est partout, mais la compétition, donc les JO, n’intéresse pas grand monde. Il n’y a pas de phénomène d’entrain, comme une Coupe du monde de foot ou de rugby.

Ce que semble confirmer We are Social : “Bien que le sponsoring sportif soit bien perçu par les Français (81% des Français perçoivent le sponsoring sportif comme bénéfique aux entreprises, et renforçant leur notoriété (95%)), cette pratique inspirée du modèle nord-américain n’est cependant pas sans risque pour les marques. Malgré la promesse que les contrats de naming soient un gage de visibilité pour la marque, certains partenariats peuvent se heurter à des cultures locales fortes. En France, sur l’année 2023, le terme “Orange Vélodrome” a été 17 fois moins cité que le terme “Vélodrome” (29K mentions Vs 508K mentions), nom de l’emblématique stade de l’Olympique de Marseille.

À l’approche des Jeux Olympiques de Paris, la mobilisation des partenaires officiels, l’engouement des marques et les attentes du public convergent vers un objectif commun : faire de cet événement une vitrine mondiale de l’innovation, de la responsabilité sociale et de l’inclusivité. Si les défis logistiques et les restrictions imposées aux partenaires et aux athlètes sont nombreux, l’opportunité de marquer les esprits reste immense. Les Jeux de Paris promettent ainsi de devenir un terrain fertile pour des activations de marque que tout le monde souhaite mémorables, mettant en avant aussi bien les valeurs du sport que les engagements des entreprises pour un futur plus durable et inclusif. La compétition, au-delà des médailles et des records, se jouera également sur le terrain de l’innovation sociale et environnementale, promettant un héritage pérenne pour la capitale et ses visiteurs.

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