Comment Lacoste a remporté la partie sur Instagram

Par Xuoan D. le 01/10/2015

Temps de lecture : 7 min

Comme chaque mois dans parole d’annonceur, un annonceur est invité à dévoiler les secrets d’une campagne, de sa communication ainsi que sa vision de la marque.

Pour le lancement de la LT12, une raquette alliant le bois et le graphite, « la tradition et l’innovation », Lacoste a surpris avec une campagne internationale et sociale de haute volée. Un bel arbre qui cache une forêt de contenus digitaux publiés chaque jour avec élégance par la marque en pleine réinvention. Pour évoquer la mue digitale du plus célèbre crocodile de marque, nous avons rendez-vous avec Laetitia Laplace, international communications, media & digital director.

– La communication de Lacoste semble s’être considérablement enrichie et accélérée depuis quelques mois. A quoi est-ce dû ?

Nous avons totalement repensé la plateforme de marque il y a 2 ans, suite au départ de la famille Lacoste. Auparavant la marque était gérée par deux entités distinctes, l’une possédant les licences, l’autre ayant en charge la distribution. Ce qui impliquait de nombreuses parties prenantes. Aujourd’hui, la marque est organisée autour d’une même entité, de façon totalement intégrée, ce qui est propice à la modernisation de la marque. Lacoste est une véritable pépite qui vit depuis 80 ans. Notre défi est d’arriver à la faire vivre pour 80 années supplémentaires ! Or pour cela, la nouvelle plateforme de marque se devait d’être en phase avec notre époque, ambitieuse, et apportant une vision. Nous avons alors travaillé avec BETC autour d’un film de marque qui porterait la nouvelle plateforme et une nouvelle signature : « Life is a Beautiful Sport ».

Or pour qu’une telle plateforme existe, un seul film ne suffit pas. Le digital permet de décupler et d’enrichir le storytelling de la marque tout au long de l’année. L’enjeu est d’être chaque jour un peu plus crédible grâce aux contenus, et d’inscrire la marque dans un lifestyle accessible qui lui est propre.

 

– Que représente le digital au sein de la communication de Lacoste ?

Nous ne l’isolons pas. Le digital est un formidable levier d’amplification de la publicité. Et surtout il s’agit d’un moyen pour donner vie à notre plateforme de marque de façon permanente. Pour y parvenir, nous créons des contenus entretenant la conversation au quotidien.

La digitalisation est un sujet majeur en interne et considérée par toute l’équipe, direction comprise. 15 personnes œuvrent au pôle digital de notre siège à Paris.

 

– Comment pilotez-vous votre communication digitale internationale ?

Nous avons un fonctionnement collaboratif avec les filiales. Il n’y a pas de relation de hiérarchie marquée entre le siège et ses filiales. Nous les considérons comme un réseau de contributeurs, de talents, de contacts qui nourrissent nos réflexions et dispositifs.

Le marché français sert néanmoins de test à la plupart de nos campagnes. Et la situation parisienne du siège permet d’accentuer notre côté français, propre à l’ADN de la marque ! Voilà pourquoi une campagne faisant appel à des influenceurs / ambassadeurs parisiens pourra être diffusée de façon globale.

 

– À une époque où l’on parle beaucoup de programmatique et de désintermédiation, comment est géré votre budget média digital ?

Il nous arrive de travailler en direct avec les supports, comme ce fut le cas avec Instagram. Pour le display, nous travaillons en France avec Havas Media International. Pour les autres pays, nous faisons appel aux agences locales et aux filiales. Nous centralisons en revanche l’achat pour le social évènementiel.

 

– Parlez-nous de la campagne pour la raquette LT12.

La raquette LT12 (ndlr : une raquette « réinventée » combinant pour la 1ère fois le bois et le graphite) était une belle opportunité de prolonger notre storytelling autour du « Beautiful Sport ». Lacoste est issue du sport, avec une forte légitimité et une vision particulière. Nous avons toujours eu un vrai propos esthétique, matérialisé par des objets design. Ce type de message ne se dissémine pas avec une grande campagne média. Il faut être plus diffus, social, viral et événementiel.

Nous nous sommes demandés comment parler de tennis en tant que Lacoste. Quelle est notre proposition dans le sport ? Nous ne pouvions que faire preuve de finesse et être fidèle à l’esprit de René Lacoste : la vraie victoire, c’est l’élégance.

La campagne nous a également permis de mettre l’accent sur l’aspect innovant de la marque. La raquette LT12 étant en bois et en graphite, elle symbolise la parfaite rencontre entre la tradition et l’innovation, si cohérente avec la marque. Pour amplifier ce caractère innovant, la campagne se devait d’être connectée. Nous avons alors fait appel à MNSTR qui est une agence digitale mais qui – et c’était le plus important pour nous – sait raconter des histoires, des « brand stories ». MNSTR a alors imaginé l’histoire « Elegance is Victory » qui précise notre signature « Life is a Beautiful Sport » en exposant notre vision du sport.

« Elegance is Victory » est une mini série de 7 épisodes conçus essentiellement pour Instagram, plateforme sociale et mobile par excellence. Nos épisodes y ont été diffusés en organique mais aussi en sponsorisé, faisant ainsi partie des 1ères campagnes publicitaires diffusées sur Instagram. La campagne a aussi été prolongée sur Vine, Facebook, Snapchat, et bénéficie d’un large plan média, avec notamment du display en France.

 

– Comment avez-vous travaillé avec Instagram ?

Instagram nous a proposé un véritable partenariat, en nous mettant en relation avec leurs créatifs in-house qui nous ont fournis de précieux conseils lors de la production des vidéos et des 1ers montages. Il était important pour nous de valider notre approche, de savoir si nous étions en phase avec les usages de ce média social. Instagram possède tant de datas qu’il était très précieux pour nous de recueillir leurs avis. Leurs créatifs nous ont notamment conseillé de ne pas numéroter nos épisodes, de monter différemment les 1ères images – décisives – de nos vidéos. Ce qui est très éloigné de l’habituelle relation avec un média qui se contente de livrer les éléments !

La diffusion sponsorisée de nos contenus a permis d’augmenter notre nombre d’abonnés [1 million à date] même si l’objectif recherché était avant tout l’amplification digitale via le reach : 850 000 personnes ont été atteintes, les vidéos ont été vues 320 000 fois, avec une fréquence sur cible de 2,81 et un bon taux de « j’aime » supérieur à 2%.

Mais depuis Instagram a évolué un peu trop vite à notre goût. Chaque campagne était auparavant visionnée par Kevin Systrom [ndlr : le co-fondateur d’Instagram], qui en en validait l’esprit, la cohérence graphique, l’ambition… Aujourd’hui, la publicité est en libre service sur Instagram. Le nombre de campagnes augmentant, l’engagement ne sera pas le même.

 

– La qualité de réalisation de cette campagne est particulièrement élevée pour du social media…

L’exécution est clé quand on affirme que l’élégance, c’est la victoire !

MNSTR a fait appel au réalisateur Romain Laurent connu pour sa série « One Loop Portrait a Week » et ses vidéos pour Hermès. Ainsi qu’au photographe Sam Hofman – contributeur régulier de GQ, Wired, Wallpaper – pour des « natures mortes » de la collection sport accompagnant la LT12. Adrien Bosc, rédacteur en chef du magazine Desports et romancier primé par l’Académie Française, s’est également vu confier l’édition du livre « Une histoire de tennis et d’élégance ». 128 pages autour du tennis, son influence sur le style Lacoste et la conception de la LT12. Le livre a été un très beau prétexte pour développer une multitude de contenus supplémentaires. Avec un tel projet, il n’y a aucune limite par rapport à ce que l’on peut produire. Nous démultiplions les angles d’attaque et la façon d’affirmer la position de Lacoste dans le tennis.

La qualité de réalisation est aussi liée au fait que tous les intervenants du projets ont une vraie passion pour le sport, ce qui rend l’ensemble légitime.

 

– La marque est également présente sur Snapchat.

Snapchat fait maintenant systématiquement partie de nos dispositifs. Même si l’audience était un peu décriée au départ, nous y sommes allés avant tout pour l’opportunité d’engagement. Nous y diffusons des contenus en avant-première, du live stream, du « behind the scenes ». Nous avons notamment eu 150 000 vues sur Instagram pour les vidéos de coulisses de notre défilé à New York. Ce n’est pas le lieu pour des contenus à forte réalisation. C’est une approche quasi en « one to one », pas du tout du mass social media comme sont devenus certains médias sociaux.

 

– Quels seront vos prochains rendez-vous ?

Nous préparons une nouvelle campagne Instagram avec MNSTR pour la période des fêtes, dans un tout autre registre.

Lacoste sera partenaire de l’équipe de France aux jeux olympiques et aux jeux paralympiques de 2016. Nous travaillons actuellement sur des dispositifs autour de ce partenariat. 2016 sera une année riche pour la marque.

 

– Et pour finir, un conseil pour que la relation agence – annonceur soit une réussite ?

Les annonceurs sont désormais en capacité de produire énormément en interne, notamment en digital et social media. Ainsi, lorsque nous faisons appel à une agence, nous attendons que celle-ci soit capable de produire un véritable récit de marque, de l’exprimer de façon innovante tout en respectant l’authenticité de la marque. Ce qui n’est pas toujours simple. Et puis, il faut aussi réussir à « aligner nos planètes » pour que l’achat d’art soit au niveau.

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