Adieu mannequins Angels normés et dirigeants misogynes.
Le géant de la lingerie qu’on ne présente plus, Victoria’s Secret change du tout au tout pour ce qu’on pourrait appeler le plus gros revirement de marque de la décennie. Elle abandonne ainsi ses fameux “Anges”, mannequins aux proportions de Barbie et longtemps égérie du sexy, pour “ce que veulent les femme”.
Ces dernières années, les mentalités ont drastiquement évolué, notamment en matière de stéréotypes patriarcaux qui ne sont plus du tout dans l’ère du temps, en témoignent les nombreuses campagnes Dove. Pourtant, un ovni restait complètement en décalage avec l’époque, en glorifiant les corps irréels et totalement dans les codes et attentes de la société des hommes, Victoria’s Secret.
Après plusieurs scandales quant aux relations de son propriétaire avec le délinquant sexuel Jeffrey Epstein et les révélations sur une culture d’entreprise misogyne et sexiste, la marque semble enfin changer.
« Quand le monde changeait, nous étions trop lents à réagir », a déclaré Martin Waters, l’ancien chef des affaires internationales de Victoria’s Secret récemment nommé directeur général de la marque en février. “Nous devons arrêter de nous préoccuper de ce que veulent les hommes et passer à ce que veulent les femmes.” peut-on lire dans un long article du New York Times à ce propos.
Ainsi l’entreprise change du tout au tout, certains de ses dirigeants sont évincés comme M. Razek et M. Wexner qui ne feront pas partie du nouveau Victoria’s Secret. L’entreprise se séparera également de L Brands et Bath & Body Works pour devenir sa propre entreprise publique cet été.
« Je savais que nous devions changer cette marque depuis longtemps, nous n’avons tout simplement pas eu le contrôle de l’entreprise pour pouvoir le faire », a déclaré Martin Waters pour défendre son inaction ces dernières années.
Mais ce n’est pas tout, si Victoria’s Secret change donc dans le fond, c’est aussi le cas dans la forme, et pas qu’un peu. En effet, les fameux “Anges” de Victoria’s Secret sont donc abandonnés pour faire place à 7 nouvelles « égéries » célèbres non pas pour leurs proportions, mais pour leurs exploits et leurs engagements. Parmi elles Megan Rapinoe, la star et capitaine de l’équipe de football des USA, militante pour l’égalité des sexes ; Eileen Gu, skieuse acrobatique sino-américaine de 17 ans et bientôt olympienne ; Paloma Elsesser, mannequin biraciale et militante pour l’inclusion, âgée de 29 ans, qui était la rare femme de taille 14 a avoir fait la couverture de Vogue ; Priyanka Chopra Jonas, actrice indienne de 38 ans et investisseuse en technologie ; Adut Akech, Amanda De cadenet et Valentina Sampaio. Les sept femmes forment ainsi un groupe appelé le “VS Collective”.
On peut alors se demander pourquoi ces femmes aux carrières immaculées ont accepté de s’associer à Victoria’s Secret ? C’est notamment parce qu’elles ne seront pas de simples égéries. En effet, en plus d’apparaître dans des publicités de la marque et d’en faire la promotion sur Instagram, elles auront pour mission essentielle de conseiller la marque afin qu’elle atteigne son objectif (et nouveau credo) : être en phase avec “ce que veulent les femmes”. Elles rejoignent ainsi une entreprise à l’équipe de direction entièrement renouvelée et forment un conseil d’administration dans lequel tous les sièges sauf un seront occupés par des femmes.
Les internautes se questionnent maintenant légitimement quant à ce revirement à 360°, fake, opportunisme, ou réelle prise de conscience ? Pour certains, ce changement, bien que radical, reste bien trop tardif. Des marques prônent la diversité depuis toujours et sont bien plus légitimes.
“Bien sûr, il y aura des gens qui se demanderont : Est-ce que cela a du sens ?”, a déclaré Mme Rapinoe, qui a reconnu que lorsqu’elle a été approchée pour la première fois, “moi aussi, j’étais comme : Quoi ? Pourquoi voulez-vous travailler avec moi ?” Pourtant elle avait été convaincue par la volonté des dirigeants de la marque de reconnaître leurs erreurs et leur histoire, et par le fait que son rôle ne se limite pas à la typique “ambassadrice de la marque”, mais s’étend au conseil sur le langage utilisé par l’entreprise, l’assortiment de produits qu’elle propose et la narration qu’elle diffuse” peut on lire dans l’article du New York Times.
Que l’on croit à ce revirement ou qu’on le juge opportuniste, il a tout de même le mérite d’exister.