Avec le mobile, la pratique du jeu vidéo s'est considérablement développée auprès de populations de tous âges : 3 milliards d'heures seraient consacrées chaque semaine au casual gaming dans le monde.
Et si cet usage contribuait également à la recherche et à la santé grâce à la data ? Tel est le pari de Deutsche Telekom qui, sur les conseils de l’agence Saatchi & Saatchi London, a décidé de faire jouer ses 200 millions de clients pour la bonne cause.
Le contexte
47 millions de personnes dans le monde sont atteintes de démence, dont la maladie d’Alzheimer est la forme la plus commune avec 60 à 80% des cas selon l’Alzheimer’s Association France. Personne n’a survécu à la démence, et le nombre de malades pourrait atteindre les 135 millions en 2050, avec dès aujourd’hui, un cas recensé toutes les 3 secondes.
De son côté, Deutsche Telekom a 200 millions de clients dans le mobile. Il est aux premières loges d’un phénomène de masse : le casual gaming. Ce phénomène représente plus de 3 milliards d’heures jouées chaque semaine dans le monde, que ce soit en ligne, ou sur mobile.
Partant de ces deux postulats que peu de choses unissent au départ, l’agence Saatchi & Saatchi London a proposé à son client annonceur une idée de casual gaming aidant la recherche via le recueil d’une somme de données jamais atteintes jusqu’alors.
Le concept
Sea Hero Quest est un jeu mobile pour la bonne cause, dans lequel un jeune marin est invité à naviguer en mer, en quête des souvenirs de son père, atteint de démence. La façon dont les joueurs auront de se repérer dans l’espace permettra de recueillir des datas clés pour la recherche. En revanche, le fait de se perdre est l’un des premiers signes de la démence et donc d’Alzheimer. Or pour comprendre comment et pourquoi un être humain en vient à ne plus savoir où il va, il faut d’abord étudier un cerveau sain. « Ce qui devrait à terme permettre de nouveaux diagnostics de la maladie » selon Saatchi & Saatchi London.
Pour la recherche scientifique, Sea Hero Quest est une mine d’or : la précédente et plus grande étude équivalente sur le sujet ne représentait que 600 personnes. Avec ce projet disponible sur iOS et Android sur 40 marchés, les partenaires de Deutsche Telekom vont toucher une audience considérable. De plus, le jeu permettrait de collecter des données bien plus rapidement qu’avec un process conventionnel : 2 minutes de jeu seraient équivalentes à 5h de questionnaires et de traitement par des scientifiques.
Pour l’agence Saatchi & Saatchi London, une telle accélération technologique liée à l’audience de son client ne fait aucun doute : « il s’agit du plus grand benchmark jamais réalisé sur le sujet ».
Les parties prenantes
Afin de s’assurer de l’utilité et de la rigueur scientifique du projet, Deutsche Telekom et son agence se sont rapprochés d’Alzheimer’s Research UK, de l’University College de Londres et de l’Université d’East Anglia. L’UCL a prévu d’utiliser les données collectées pour mettre au point de nouveaux tests de diagnostic de la démence. Mais les données collectées seront aussi mises à disposition de la communauté scientifique internationale.
Comme c’est le plus souvent le cas dans un projet de jeu mobile, l’agence a fait appel à un studio mobile : Glitchers. Saatchi & Saatchi London profitant ainsi de l’expertise d’une structure ayant fait ses preuves en éditant ses propres jeux mobiles. De quoi conjuguer « gameplay » et démarche scientifique.
Pour apporter un peu de storytelling à l’ensemble, un film d’animation a été réalisé par Bibo Bergeron pour Buf Paris. Celui-ci revient sur l’histoire du jeune marin et de son père ayant perdu la mémoire.
Les résultats
– Plus de 500 000 téléchargements les 5 premiers jours (début mai)
– Plus d’un million de téléchargements au total
– Top 20 dans les App Store et Google Play de 40 marchés
– 25 000 notes de 5 étoiles sur l’App Store et Google Play
– 58 mois de jeux cumulés équivalent à 725 années de collectes traditionnelles
– 404 médias ont relayé le lancement de Sea Hero Quest
– 8 lions à Cannes : Gold et Silver en Promo & Activation, Silver en Direct, Silver en Cyber, Silver en Health & Wellness, Silver en Pharma et 2 Bronze en Mobile.
Les clés de succès
Un ambassadeur de choix
Pour s’assurer d’un démarrage digne d’un hors-bord, Deutsche Telekom a fait appel au Youtubeur star PewDiePie et à ses 45 millions d’abonnés. Celui-ci a réalisé une vidéo présentant 3 jeux gratuits dont Sea Quest Hero, avec 4,7 millions de vues à la clé :
La brand utility
Comme tous les opérateurs téléphoniques, Deutsche Telekom est confronté à une banalisation de son offre et de ses services, désormais totalement intégrés à la vie courante. Avec Sea Hero Quest, Deutsche Telekom réaffirme l’impact de la technologie sur nos vies, non pas en se concentrant sur le quotidien (la communication entre proches, le divertissement, l’accès à l’information…) mais sur les promesses d’un avenir où nous aurons trouvé des remèdes contre des maladies touchant des millions de personnes. De quoi élever l’ambition de sa communication tout en impliquant le public, qui est ici clé pour co-construire le futur : sans parties jouées, pas d’avancée !
L’équilibre
Sur mobile, une application n’a que quelques secondes pour convaincre, et quelques jours pour espérer rester sur un écran d’accueil. Cette exigence fait que la marque et son agence se sont entourées de partenaires référents, que ce soit côté mobile, ou recherche. Le branding s’avère subtil, avec un interstitiel Deutsche Telekom au démarrage, et le rose de la marque omniprésent dans la direction artistique. Bien évidemment, « DT » a le bon goût de ne jamais faire la promotion active de ses services en plein jeu, concentrant les push et autres messages sur la participation au jeu et au recueil de données.
La sécurité des datas
Glitchers a collaboré avec Deutsche Telekom pour s’assurer que les données collectées ne pourraient être piratées. En effet, si les données de jeu peuvent paraître triviales, celles-ci sont tout de même liées à la santé des joueurs. La marque s’engageant de plus à ce que les données ne soient pas exploitées à des fins marketing, d’autant que le recueil optionnel de données personnelles socio-démographiques est proposé à la fin de certaines parties « pour aider la science ».