Peut-on vraiment être créatif sur mobile ?

Par Xuoan D. le 18/01/2016

Temps de lecture : 6 min

Avec la rubrique Jeunes loups, la Réclame donne la parole aux jeunes professionnels de la com : entrepreneurs, dirigeants et autres profils à suivre. Au programme : des interviews, tribunes et des échanges autour du présent et surtout de l'avenir de notre secteur.

Le digital se mobilise à vitesse grand V, avec une audience désormais majoritairement mobile, que ce soit pour les moteurs de recherche, l’e-mail, les médias ou encore les réseaux sociaux. Et pourtant, les initiatives de marques sont à la traîne face à ce raz de marée.

Comment oublier définitivement le « desktop first » pour évoluer dans un monde « mobile first » en attendant le « mobile only » ? En misant sur la créativité, une fois de plus ! Pour y parvenir, faisons le point avec Martin Jaglin qui est à la fois Executive Vice President de 1000mercis Group / Mobile CEO (Ocito) et Vice President de la Mobile Marketing Association France.

Le marché associe rarement mobile et créativité. Pourquoi ?

Parce que le mobile challenge plus la création et les créatifs que d’autres médias, et ce pour 3 raisons : c’est un objet personnel, sur lequel le sentiment d’intrusion est très fort. C’est par ailleurs un média de petits écrans avec une surface d’expression réduite pour les marques. Et enfin, le contexte est très exigeant puisque les personnes en situation de mobilité veulent obtenir rapidement une information, et si possible courte (d’où l’avènement de la push notification).

Deuxièmement, il faut arrêter de limiter la créativité mobile au display ! Le mobile n’est pas qu’un média, c’est aussi un magasin, un assistant personnel, une messagerie, un messenger, un baladeur… Les marques peuvent s’exprimer à tous ces niveaux, sans forcément y aller de sa énième bannière. La difficulté rencontrée par les annonceurs aujourd’hui est de ne pas toujours savoir par quel bout aborder le mobile (Plan média ? App m-commerce ? Site mobile de contenus ? SMS ?) et cela s’en ressent dans la créativité, surtout quand on finit par simplement décliner une campagne sur mobile. La richesse offerte par ce couteau-suisse du marketing et de la communication peut inhiber certaines agences / marques. Et au contraire en libérer d’autres.

 

La perception des annonceurs et agences évolue-t-elle ?

Ils n’ont plus le choix car les consommateurs ont pris les devants ! Ça y est, nous avons basculé dans l’ère du mobile first : Google a révélé en novembre que plus de 50% des recherches dans le monde étaient effectuées depuis un mobile, les audiences des sites média comme Le Monde, L’Equipe, Le Figaro… sont plus mobiles que desktop, idem pour les : emails, Facebook engrange 75% de ses revenus via son app et site mobile.

Les investissements publicitaires mobiles sont encore en décalage avec l’audience, ce n’est plus qu’une question de temps pour que les 2 courbes s’épousent, comme on le voit progressivement aux US et UK, surtout que la performance est bien là.

 

Qu’avez-vous retenu de plus créatif en terme d’usage du mobile par les marques ?

Des projets mobile first dans leur conception, qui utilisent d’ailleurs souvent des fonctionnalités qui n’existent pas sur les autres média (gyroscope, GPS, appareil photo, caméra).

En termes de campagne media mobile, il y a cette campagne McDonald’s en Allemagne qui affichait une glace en interstitiel : si le mobinaute se rendait dans un restaurant à proximité avant que la glace virtuelle ne fonde, il bénéficiait d’une promotion immédiate. Ou encore celle de Mercedes en Belgique : la bannière du 4×4 s’adaptait à l’orientation de la tablette. En mode paysage, elle roulait à l’horizontale. En mode portrait, la voiture traçait sa route mais à la verticale, soulignant que ce 4×4 n’est pas effrayé par les fortes pentes.

Au Brésil, une entreprise de livraison s’est servie de la géolocalisation et de Google Street View pour afficher une bannière avec un screenshot en fond d’écran de l’endroit exact où le mobinaute se trouvait au moment de l’affichage de la bannière !

Si l’on parle d’app – un beau territoire d’expression pérenne pour les marques – celle de la mutuelle Smeno est intéressante puisqu’elle s’adapte aux codes de sa cible (les étudiants) avec 2 jeux de détection d’alcoolémie. 1/ marcher sur 10 mètres avec son smartphone en main (grâce au gyroscope, on détecte si la personne a marché droit ou pas). 2/ souffler dans le micro du téléphone pour vérifier si le souffle est discontinu.

coach-smeno-mobile

MakeUp Genius de l’Oréal est aussi un bel exemple d’usage créatif du smartphone, permettant de tester virtuellement du maquillage sur son visage grâce à la réalité augmentée et à la caméra (app bizarrement primée à Cannes en 2015 longtemps après sa sortie !) L’app accélère notamment ici les ventes en magasin.

 

Il se dit pourtant que les App (de marque ou non) sont vouées à disparaître.

En effet, il n’y a pas de place pour une app pour chaque marque sur les smartphones. Quelques statistiques peuvent effrayer : si au bout d’une journée de test, l’app ne convainc pas, elle est désinstallée dans 70% des cas. Seules survivent les apps qui font preuve d’utilité et de récurrence pour l’utilisateur. Il faut arrêter de croire que mettre le site web dans une app suffit à être téléchargé !

Les bons comptes est un exemple intéressant : en plus de son app officielle, BNP Paribas a lancé celle-ci presque en marque blanche. Elle permet de mieux gérer ses comptes quand on fait un week-end ou des vacances entre amis et que tout le monde a payé des choses de son coté. La marque BNP est peu présente, sauf quand il s’agit du remboursement final : à ce moment les solutions BNP sont mises en avant.

Autre exemple, nous avons développé l’app d’une marque de cosmétiques distribuée chez les pharmaciens : une prise de photo du ticket de caisse + un scan du code EAN du produit acheté permet de déclarer ses achats et de gagner des points de fidélité, remplaçant le bon vieux formulaire papier, et permettant d’intensifier le Direct To Consumer que recherchent les marques qui n’ont pas leur propre réseau de distribution.

Et puis les apps – quand elles communiquent avec les objets connectés – améliorent l’expérience in-store : nous avons déployé pour un grand groupe hôtelier des beacons dans 2 hôtels parisiens qui permettent d’envoyer aux porteurs de l’app ayant le Bluetooth activé des notifications d’accueil, mais aussi les codes du Wi-Fi quand ils sont à l’accueil ou encore des informations sur les oeuvres d’art dans les couloirs.

Il est cependant vrai que de plus en plus d’expériences sont proposées « hors app ». C’est le cas de toutes les expérimentations autour des messengers comme Facebook Messenger, Whats App ou tout simplement les SMS. Citons par exemple Walmart qui a testé un service de guidage des clients en magasin. L’envoi d’un SMS avec le nom d’une marque permettait d’obtenir instantanément de la part de Walmart une info sur où se trouvaient les produits recherchés dans les rayons. Si le dispositif peut paraître simple, il nécessite à la fois de l’intelligence artificielle (pour traiter les demandes client) et un important datamining (pour interroger les stocks et la localisation en magasin).

walmart-sms

 

Le mobile sera-t-il encore un sujet dans quelques années ?

A force d’être partout, il ne sera plus nulle part ! Le mobile, comme le digital avant lui fera corps avec toutes les actions de communication et de marketing des entreprises, il ne sera plus géré en silo et tant mieux, il sera “natif” au sein des organisations à terme.

 

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