Comment Renault s’est joué du french bashing

Par Mégane G. et Xuoan D. le 31/03/2016

Temps de lecture : 6 min

L’histoire du concessionnaire automobile le plus célèbre de France.

En 2011, Renault prenait un virage dans sa communication en parodiant les marques allemandes. Avec une revendication forte : l’hexagone a aussi sa place dans la course à la voiture de qualité. Faisant fi du french bashing ambiant, son agence Publicis Dialog a imaginé une saga publicitaire portée par un personnage charismatique, incarnant l’art de vivre et l’humour à la française. Stéphane Gaillard, European Advertising Director chez Publicis, nous raconte l’itinéraire suivi par cette saga que le grand public s’est approprié.

Le brief

Audi, Mercedes, BMW ou encore Volkswagen malgré son image récemment entachée par un scandale, autant de noms qui font le renom de l’Allemagne dans l’automobile. Un gage de qualité, de fiabilité et d’innovation que les constructeurs germaniques n’hésitent pas à vanter dans leur communication. Comme en témoigne ce spot publicitaire de 2010, dans lequel McCann France vante les qualités de l’Opel Corsa dans la langue de Goethe.

“Étant français, il fallait rester humbles car toute voiture de qualité était forcément allemande”, résume Stéphane Gaillard. “Le tout associé à une forme de french bashing”. Râleurs, arrogants ou encore fainéants, la mauvaise presse des français auprès des anglo-saxons semble imposer une sorte de retenue. “Il n’y a pas de raison de s’auto-flageller sans cesse”, regrette-t-il. En 2011, poussé par Publicis, Renault se décide à réaffirmer la qualité de l’automobile française.

“Plutôt que le proclamer de façon arrogante, nous avons choisi de le faire avec de l’esprit”, détaille Stéphane Gaillard. Le concept de la French Touch est né. Emprunté à l’univers de la musique dans lequel des artistes comme Daft Punk, Justice ou encore Phoenix font rayonner la France à l’international, le terme est synonyme de créativité et d’innovation. Et rappelle l’origine de Renault, entreprise fondée à Boulogne-Billancourt en 1899.

La saga publicitaire

La French Touch est mise en application pour la première fois 2011 dans une communication de Publicis Dialog pour la Renault Mégane, parodiant le spot d’Opel.

Suivront d’autres films se riant également des codes utilisés par l’automobile allemande, italienne, et même belge.



Cette campagne a aussi pour particularité d’introduire le personnage charismatique du concessionnaire Renault, incarné par Nicolas Carpentier. L’acteur français connu pour son rôle dans “Plus belle la vie” ou au cinéma dans “Tu veux ou tu veux pas” y apparaît décontracté dans son costume, écharpant les langues étrangères avec nonchalance. “Au départ, le premier film était ponctuel, le personnage du concessionnaire avait seulement été choisi pour une publicité Mégane et non pas pour devenir le visage de Renault. Mais suite au succès de la campagne, nous avons décidé d’en faire une égérie promotionnelle”, précise Stéphane Gaillard. La recette se décline d’année en année, le concessionnaire incarnant l’art de vivre à la française en abordant ses spécificités comme la langue, le cinéma ou plus récemment l’élégance en juin 2015.


Mais la saga est avant tout rythmée par des célébrités invitées à côtoyer Nicolas Carpentier le temps d’un spot. “En plus de la présence du porte-parole, nous avons pensé à faire appel aux stars sous contrat avec Renault (à l’image du basketteur Tony Parker mobilisé pour le lancement du SUV Koleos) afin d’évènementialiser les prises de parole, de créer plus d’impact et de gagner en notoriété”, explique le publicitaire. On retrouve ainsi dans les véhicules de la marque au losange le judoka Teddy Riner (mars 2015), le DJ Bob Sinclar (janvier 2016) et ce mois-ci les rugbymen Morgan Parra et Jules Plisson.




Les résultats

Image de marque

Scores moyens sur les 3 dernières campagnes French Touch :
– Reconnaissance supérieure de +2% à +15% aux standards du marché automobile
– Attribution à la marque supérieure de +6% à +16% aux standards du marché automobile
– Agrément supérieur de + 3% à +17% aux standards du marché automobile

Retombées média
Le 4 janvier dernier, le Petit Journal diffuse un sketch des humoristes Eric et Quentin. Le sujet ? Le dernier spot TV Renault dans lequel le célèbre concessionnaire et Bob Sinclar rivalisent de jeux de mots. Si la parodie a pu apparaitre comme une mauvaise retombée, l’exposition s’est avérée massive.

– 1,35 million de téléspectateurs devant l’émission ce soir-là
– + 17 000 likes sur le post Facebook du Petit Journal
– 1283 partages sur le tweet du Petit Journal

Toi aussi, danse comme le concessionnaire de la fabuleuse nouvelle pub Renault…À revoir ici ➡ http://bit.ly/1ZKP86W#LPJ

Posté par Le Petit Journal sur lundi 4 janvier 2016

Impact sur les ventes
En 2014, Renault lance deux films pour promouvoir la simplicité de sa citadine électrique, Zoe. La campagne remporte l’Or dans la catégorie Automobile aux Effie France 2015.

– Plus de 1000 véhicules vendus en un mois
– 3724 modèles vendus en 4 mois
– Les objectifs de vente sont dépassés de 17%
– La part de marché de Zoé dans le segment passe de 47% à 67%

Les clés du succès

Pour Stéphane Gaillard, la réussite de cette saga tient à trois items :

Créer un rendez-vous publicitaire
« La saga publicitaire possède un fort pouvoir d’attribution, elle permet d’instaurer un état d’esprit. Le vrai challenge est de créer la surprise : nous devons sans cesse nous remettre en question afin de nous renouveler. Tant que nous arriverons à créer l’évènement, nous poursuivrons la saga. ”

Capitaliser sur un porte-parole plutôt qu’une égérie
“La dérive lorsque l’on fait appel à une star dans une publicité, est que les gens se focalisent sur combien elle a été payée plutôt que de se concentrer sur le message. En revanche, en invitant de temps en temps des célébrités, Renault gagne en notoriété et démontre l’étendue de la French Touch, de l’automobile, au sport, en passant par la musique.”

Rebondir sur des périodes clés
“Il y a des grandes périodes de communication dans l’automobile : le début d’année, puis le mois de mars, le début de l’été, la rentrée de septembre ainsi que les fêtes de fin d’année. Ces périodes clés doivent être rythmées par des nouvelles campagnes ou des rediffusions qui doivent conserver une certaine cohérence. Pour la saga French Touch, Renault rebondit parfois sur l’actualité d’une star (lorsque Teddy Riner a été une nouvelle fois sacré champion du monde), parfois sur de grands évènements (lors de la Coupe du monde football de 2014 au Brésil) afin de créer l’évènement et de continuer à surprendre.”

S’il ne devait retenir qu’un seul principe pour ligne de conduite, le directeur du garage Renault de Publicis opterait pour le bon sens : “Avant de faire une bonne communication, il faut vendre de bonnes voitures”. Un conseil que semble avoir intégré Volkswagen suite à l’affaire révélée en 2015, en abandonnant ses spots les plus drôles pour se concentrer sur des campagnes orientées vente.

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