Les influenceurs vont-ils survivre au confinement ?

Par Élodie C. le 20/04/2020

Temps de lecture : 6 min

La confluence pour les sauver tous.

Le confinement va-t-il sonner le glas de l’influence ? Alors que près de trois milliards de personnes sont confinées, nos priorités et habitudes sont bouleversées. Il n’est plus question de parler luxe, unboxing ou voyage sponsorisé, mais de quarantaine, de pénuries diverses et de soutien aux personnels soignants. Le marketing d’influence est à repenser et doit s’adapter sous peine de tollé retentissant sur les réseaux sociaux.

S’il n’est pas question de stopper toute forme de communication, les marques n’en marchent pas moins sur des œufs pour délivrer un discours en phase avec les nouvelles priorités de leurs communautés. Comment rester connecté à son public sans risquer la prise de parole déconnectée de la réalité ?

Et si l’heure était à la confluence, l’alliance du contenu et de l’influence ? C’est le pari que nous détaille MNSTR dans cette tribune signée Laura Alcain, Head of Social & Influence de l’agence.

Une culture de l’influence à réinventer

La crise que nous sommes en train de vivre remet le monde en question : nos points forts se confirment et nos failles se dévoilent. Dans le marketing d’influence, c’est exactement la même chose. Les événements, les festivals, les voyages, les aventures, les shootings, les tournages : tout a été annulé. Les stars des réseaux voient une grande partie de leur business se mettre en stand-by et doivent très vite s’adapter à des nouvelles façons de créer et interagir.

Un scénario qui les remet tous à un pied d’égalité. Un seul décor : chez eux. Un seul outil : leur smartphone. Les regards se tournent et se centrent sur la qualité des contenus, et le follow / unfollow est ainsi questionné. « Place à la réinvention ! » dira-t-on. Mais le challenge ne s’arrête pas à une petite mise à jour de leur model-business financé par les marques. Les internautes eux, doivent s’occuper. Ils passent désormais 2x fois plus de temps à scroller et swiper, ils téléchargent et découvrent des nouvelles plateformes, et sont plus engagés que jamais. Alors oui plus que jamais, place à la réinvention. Les influenceurs ont un rôle à jouer face à des communautés qui ne cessent de grandir, et un business à sauver. Observons cela de plus près.

L’influence qui survit, c’est l’influence qui s’adapte

Alors oui, il semble plus compliqué de co-construire un bon récit marque-influenceur à ce jour. Mais tout est une question de faire avec les moyens du bord et de s’adapter aux nouveaux modes de consommation du social en temps de confinement. Puisqu’on a le temps et qu’on est à distance, place aux lives, take overs, Face Time et autres péripéties technologiques.

C’est le cas de Sephora, qui choisit la simplicité et adapte sa ligne éditoriale pour continuer à partager des tips soins & maquillage via son armée d’influenceurs beauté comme @Chloebbbb et @richaard2609. La communauté acte le sujet, la marque donne RDV et c’est parti pour un Live Instagram #AtHomeWithSephora où les 2 stars répondent à tous les doutes des internautes. On ne change pas une équipe qui gagne.

Du côté du dénicheur de tendances Konbini, le challenge se trouve dans la faculté à continuer de co-créer du contenu avec les personnalités les plus en vogue : les déjà connus Track ID, Papier-Crayon, Fast Life… Mais le format Face Cam Interview a vite été changé par un simple appel-vidéo. Sous le nom de #MakeHomeGreatAgain, ces contenus continuent à être un succès.

Mais qui dit s’adapter dit aussi se réinventer : c’est le cas du nouveau compte @arte_asuivre sur lequel le média nous balance une production inédite et parfaite pour l’occasion : des séries 100% Instagram, co-écrites avec @amoursolitaires (by @morganeortin) et avec un bon choix de casting comme l’humoriste @anaide_rozam.

L’influence qui survit, c’est celle qui reste authentique

Depuis que nous sommes confinés, tout est devenu plus intimiste. On connaît d’ailleurs désormais les chambres de la plupart de nos amis. Alors oui, assumons que nous sommes tous en chaussons, en jogging et que nos influenceurs préférés le sont aussi. L’authenticité a toujours été clé dans le marketing d’influence et aujourd’hui plus que jamais.

C’est même le cas des marques les plus luxueuses, par exemple Chanel, qui donnait récemment la main de son compte Instagram à sa nouvelle égérie @angele_vl pour un concert en streaming. Très bon début, et en t-shirt.

La top influenceuse @bellahadid le disait déjà, les collaborations prennent un sens tout nouveau. D’ailleurs, elle n’a pas voulu arrêter sa collaboration avec @vogueitalia et a décidé d’organiser une séance photo depuis son salon, via Face Time, avec la photographe new-yorkaise @briannalcapozzi. Quoi de plus intimiste ?

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Far Away So Close. @BellaHadid joined the project with @BriannalCapozzi and @HaleyWollens. About the shooting, Brianna said: “The day before the shoot, Haley and I tested out poses together on facetime; this is always our process, but not within the confinement of a cell phone screen. It was pretty hilarious. Then we called Bella Hadid and did a fitting, it was fun to have the intimacy of the three of us, everyone's opinions were considered, and lots of jokes always. Then we hung up and Bella went off to do her hair and makeup, she did a stellar job, this is why she's a supermodel! She is the full package and always makes it exciting and fun. Bella's friend Lauren, who is a creative director when she’s not stuck in the house, acted as a dream photo assistant & fashion assistant, taking the liberty to order a ring light the night before, and always on hand to hold a mirror or grab a pair of socks. When we actually start shooting it was quite funny, I would call Bella back from my computer, because the quality is better with two people. Haley would then call Lauren's phone and they would put Haley and I side by side so that we could both see a similar frame. Haley and I could not see each other, but being the loud New Yorkers we are, we had no problem hearing each other!” Discover the full Far Away So Close portfolio in our April Issue on newsstands. #FarAwaySoClose #imagine #WhiteCanvas — Editor in chief @EFarneti Creative director @FerdinandoVerderi

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Adidas a, de son coté, mis en suspens son approche inspirationelle d’athlètes fit & parfaits pour nous laisser rentrer dans l’intimité et la réalité de sa #HomeTeam, qui doit désormais s’entraîner comme nous tous. On y retrouve des interviews, live-coachings, défis quotidiens, mini-démos… Un snack de motivation home-made qui continue à engager les foules. À l’heure de la pandémie, l’authenticité n’est pas vraiment un choix, d’accord. Mais cet élan d’intimisme et transparence des influenceurs redonne une toute nouvelle dimension à la collaboration avec les marques. Un rapport plus réel, moins distant et sans artifice. On aime.

L’influence qui survit c’est l’influence utile

En parlant d’humanisme, nous assistons à la plus grande tombée de masques jamais vue. L’état d’alarme sanitaire sépare les personnalités sociales en deux catégories : les hommes et femmes sandwich adeptes de l’opportunisme qui vont monétiser ce qui ne devrait pas l’être (c’est le cas de l’énorme flop de Kim Kardashian et son Crisis Kit à 60$) et ceux qui, légitimés par leurs valeurs, emploient leur influence pour les bonnes causes. Porteurs de messages vs cintres sur pattes : on imagine ceux qui vont survivre au Covid.

Il suffit de faire un tour sur TikTok (plateforme star de ce début d’année pour les créateurs, avec 65 millions de téléchargement en 1 mois et 1 milliard d’utilisateurs), pour comprendre comment l’influence et la viralité peuvent porter de belles valeurs, informer et changer des comportements. On ne parle pas du #quarantainepillowchallenge mais par exemple du #distancedance (11 milliards de vues), porté par @Charliedamelio et Procter & Gamble : une danse = une donation. Pas mal.

Les leaders d’opinion réunissent leurs forces et, conscients de leur pouvoir, sont de plus en plus nombreux à collaborer avec des associations et organismes pour éradiquer cette crise. « Arrêtons les bêtises et restons chez nous », la vidéo de Squeezie avec En Première Ligne (réseau d’entraide contre l’épidémie) faisait 4,6 millions de vues pendant que McFly et Carlito récoltaient 404k€ en seulement 11 heures, le temps d’un Maradon live sur YouTube. D’autres créateurs continuent à divulguer les bonnes paroles, passage obligé sur les chaînes de @HugoDecrypte ou Data Gueule pour être à jour.

Créativité et adaptabilité, authenticité et utilité. On dirait que le marketing d’influence à l’heure du confinement est, sans vouloir généraliser, la meilleure version du marketing d’influence d’avant le confinement. Cette situation nous confronte aux grandes vérités et notre secteur n’est pas épargné. Au moment où l’on consomme le digital comme une première nécessité, le tri se fait de façon naturelle.

L’ancienne influence qui se disait fake, éphémère, opportuniste, basée sur le profit et sans fond continuera à disparaître. On l’espère au moins. Place à la prise de parole seulement lorsqu’on y retrouve du sens. Place aux récits profonds qui démontrent la vraie raison d’être ou l’utilité d’une marque. Place à la confluence intelligente et créative, qualitative, proche et authentique. Place au bon usage de ce levier puissant, au bon moment. Au contraire ? Place au silence.

Laura Alcain, MNSTR.

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Letter to to the Future pour Accor

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