Qui a fini les cookies ?
2025 s’annonce être une année charnière pour le monde de la publicité en ligne puisqu’elle signe la fin des cookies tiers. Initialement prévu le 1er juillet 2024, l’arrêt de ces petits fichiers permettant de collecter nos préférences est finalement prévu le 1er janvier 2025. Cette nouveauté n’est pas négligeable puisque la publicité en ligne représenterait 65% du marché publicitaire en 2030 (Arcom).
À cette occasion, la CNIL publie un rapport sur le bouleversement des modèles d’affaires de la publicité numérique et les conséquences de cette disparition, comme un potentiel meilleur respect de la vie privée des internautes. Pour ce faire, une étude économique a été réalisée sur la base de 25 entretiens avec des médias, annonceurs et agences.
En premier lieu, l’étude a permis d’exercer plusieurs constats sur les cookies tiers et leur efficacité. Effectivement, celle-ci est parfois surestimée mais ce modèle est tout de même favorisé par les annonceurs car plus rentable. La suppression des cookies tiers peut diminuer la valeur des publicités, réduisant les revenus des éditeurs.
La suppression des cookies tiers par Chrome entraînera des changements majeurs en termes de concurrence et d’organisation dans le secteur publicitaire. Les risques perçus sont principalement économiques, résultant des actions des grandes entreprises.
L’étude constate également que le RGPD n’a pas vraiment réduit le traçage publicitaire puisque les internautes ont continué de donner leur consentement. Les changements majeurs dans le secteur publicitaire proviennent principalement des initiatives des grandes entreprises privées, telles que la solution ATT d’Apple et l’annonce de Google concernant la fin des cookies tiers.
Afin de pallier la suppression de ces précieux cookies, les chercheurs proposent 6 modèles pouvant constituer des alternatives réparties dans deux grandes familles :
Les trois premières proposent de passer par des données différentes :
– les identifiants de substitution : le suivi des utilisateurs avec leurs identifiants numériques ;
– le ciblage contextuel : le choix de la publicité à afficher en fonction du contenu de la page ;
– le ciblage par cohortes : le groupement des utilisateurs en segments basés sur leurs comportements ou intérêts .
Les trois autres reposent sur le choix d’architectures :
– le « retail media » : la publicité sur des espaces appartenant à des distributeurs ;
– les environnements tracés par un compte utilisateur : l’utilisation des données collectées par des comptes utilisateurs pour cibler les publicités ;
– les murs de traceurs à péage, correspondant en réalité à des modèles d’affaires payants afin de générer des revenus complémentaires.
L’étude souligne également que les changements dans le secteur publicitaire créent des enjeux concurrentiels majeurs, en partie parce que les grandes plateformes dominent avec des systèmes fermés et une forte intégration verticale. Ces évolutions bénéficient surtout aux architectures fermées et au retail media, tandis que les acteurs de l’Internet ouvert devront collaborer et innover pour rester compétitifs. La CNIL et l’Autorité de la concurrence doivent coopérer étroitement pour surveiller ces évolutions, protéger la vie privée et maintenir une concurrence équitable.
L’exploration des modèles d’affaires de la publicité en ligne révèle que les incertitudes actuelles proviennent autant des stratégies des grands acteurs du numérique que des évolutions réglementaires. La règle du consentement est désormais bien intégrée par le marché, et l’évaluation de la CNIL montre une stabilisation du taux de refus de la publicité ciblée en France. Les récentes tendances vers des modèles « consentir ou payer » dans les réseaux sociaux soulèvent des questions sur leur pertinence dans les médias et la presse. Cette étude sur les modèles publicitaires alternatifs enrichit la réflexion de la CNIL et démontre son engagement à dialoguer avec les acteurs du marché pour développer des outils réglementaires flexibles et adaptés.