Adieu SMS, bonjour RCS ! Et si c’était le levier marketing que nous n’avions pas vu venir ?

Par Xuoan D. le 27/06/2024

Temps de lecture : 5 min

Conversation avec Flavien Charles, DG et associé de Wellpack.

Depuis quelques années, la bataille fait rage entre les différentes plateformes pour remplacer pour de bon les SMS et imposer leurs messageries riches en fonctionnalités. Apple avec iMessage, Google avec RCS, Meta avec WhatsApp ou Messenger, Snap ou encore WeChat en Chine. Tout cela manque d’interopérabilité, chaque géant tentant de dicter sa loi.

Et comme souvent, l’Union européenne est entrée dans la danse. On le sait, l’UE aime les solutions universelles. En Europe, Apple a dû se résigner à abandonner son port de recharge propriétaire pour ses iPhones et à passer à l’USB-C, le standard du marché. Même approche pour les messages enrichis sur smartphones : Apple et Google vont devoir accorder leurs violons. C’est désormais (presque) chose faite avec le RCS, un format qui permet d’enrichir considérablement le contenu de messages envoyés, en apparence, comme des SMS.

Pour en savoir plus sur l’impact marketing de ce nouveau levier, la Réclame .mark&tech a aujourd’hui rendez-vous avec Flavien Charles, directeur général et associé de Wellpack, une société leader des campagnes d’acquisition par SMS.

Qu’est-ce que le RCS ? Quelles différences avec le SMS et le SMS enrichi ?

Flavien Charles : Le SMS, c’est 149 caractères de texte, un simple “texto”. 

Le SMS enrichi intègre au cœur du message un lien qui va vous envoyer vers une landing page optimisée mobile avec du contenu, de la vidéo, un store locator, etc. 

Et le RCS, c’est un SMS enrichi de 200 caractères, sauf que tout est au sein même du message : logo, GIF, vidéo, événement de calendrier, carrousel, call to action… Si vous voulez savoir où est le magasin d’une marque, vous n’aurez besoin de cliquer sur un lien, c’est directement depuis le message que l’information est affichée. L’expéditeur est aussi clairement identifié, vérifié par Google, et enrichi par des liens (site web, téléphone, email…)

Pourquoi parle-t-on du RCS aujourd’hui ?

F.C. : Le protocole a été lancé par Google en 2017 pour les smartphones Android. Au deuxième trimestre 2024, 46 % des mobiles français sont en capacité de recevoir des RCS. Mais à notre grande surprise, Apple est en train de bouleverser tout cela. Lors de sa dernière conférence dédiée aux développeurs en juin, le grand concurrent de Google a annoncé que les RCS seront acceptés par tous les iPhones sur lesquels iOS 18, la prochaine version de son système mobile, sera installé. On s’attend donc à passer de 46 % à 80-85 % de taux de couverture. Et cela change tout ! [ndlr, cela sera progressif, le déploiement d’iOS 18 n’est prévu que pour septembre, et les opérateurs devront activer le RCS pour leurs abonnés]

Quel impact sur le marketing ? 

F.C. : On gagne en interaction avec l’audience, et on a surtout beaucoup plus de statistiques grâce au RCS : taux d’ouverture, taux de clic, taux de réactivité, pixel de tracking… on va pouvoir bénéficier de toutes ces statistiques avec le RCS. 

On est vraiment dans la sphère digitale, cela se rapproche davantage des données d’un emailing que d’un SMS qui ne renvoyait que très peu d’informations. Le taux d’ouverture SMS, par exemple, est un chiffre global qui provient d’une étude Médiamétrie qui commence à dater. « 95 % des gens qui reçoivent un SMS le lisent. » Alors qu’avec le RCS, on a réellement la statistique de chaque campagne.

Quels sont les cas d’usage ?

F.C. : Avec le RCS, on distingue le format court et le format long.

Le format court, c’est en quelque sorte le SMS 2.0 avec le média intégré et les CTA au cœur du message, comme je l’ai décrit précédemment. C’est le format le plus évident pour de l’acquisition.

L’opportunité est immense pour les e-commerçants qui vont enfin pouvoir suivre la réception des messages jusqu’à la conversion de leurs campagnes. Le SMS avait jusqu’alors un problème de statistiques pour eux : si je vous envoie un SMS pour Cdiscount, une offre alléchante, il y a fort à parier que vous allez finaliser l’acte d’achat sur votre tablette ou sur votre PC. Et là, cela rend la chose compliquée parce qu’on n’arrive pas à attribuer cette vente au SMS que vous avez reçu. Alors qu’avec le RCS, on est vraiment sur un usage digital, et l’attribution est facilitée.

Ensuite, le RCS long est un format conversationnel avec une scénarisation de campagne. Ce format est très adapté aux stratégies CRM. Vous êtes client Toyota, je vais vous envoyer un message en format long RCS avec comme question : « Vous êtes plutôt SUV ou citadine ? Hydride ou essence ? » Vous allez répondre aux questions et votre expérience sera ainsi personnalisée. Pour du CRM, c’est très intéressant, notamment sur des produits à forte valeur ajoutée, l’automobile, l’immobilier, des métiers où les marges sont quand même assez conséquentes. On va ainsi très loin dans le tunnel de conversion.

Y a-t-il un nouveau risque de spam ou de scam avec le RCS ?

F.C. : Le phishing par SMS a pris de l’ampleur. Mais avec le RCS, nous sommes obligés de déclarer l’expéditeur en amont de la campagne.

Illustrons cela avec un exemple : imaginons que je prépare une campagne de messages RCS pour Krys. Google va se rapprocher de Krys en disant « Wellpack souhaite opérer une campagne RCS en votre nom, est-ce que vous êtes OK ? » Donc si demain, un escroc décide d’envoyer du RCS au nom de Krys, il ne pourra pas le faire parce qu’il n’aura pas eu l’accord préalable de Google.

Évidemment, cela renforce la mainmise de Google. Il est étonnant que les opérateurs mobiles laissent Google avoir accès à autant de données qui leur revenaient précédemment. Le RCS est, à la base, un protocole ouvert mais il n’est pas opéré en tant que tel.

Quitte à pactiser avec une plateforme, utiliser WhatsApp ne serait-il pas plus simple ?

F.C. : Effectivement, WhatsApp est un peu le cousin germain du RCS. C’est un produit que nous avons aussi en catalogue. WhatsApp est néanmoins un peu moins universel. Dans nos environnements respectifs, le vôtre, le mien, tout le monde, ou presque, utilise WhatsApp. Néanmoins, quand on extrapole, notamment pour une cible senior, l’usage chute drastiquement. Alors que le RCS à terme concernera tous les smartphones un minimum récents.

Autre spécificité, WhatsApp exige des marques que ce soit le consommateur / le prospect qui engage la conversation en émettant un premier message. Cela ne se prête donc pas à des campagnes d’acquisition ou de push CRM de la part d’une marque.

Quelle est l’étape d’après pour RCS ? 

F.C. : Son déploiement massif en France. La sortie d’iOS 18 à la rentrée, et que chaque opérateur soit bien compatible. Ce n’est pas encore le cas avec les opérateurs virtuels (MVNO) et Free. C’est déjà actif chez Orange, SFR et Bouygues Telecom.

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