Un média et un roadshow.
Comment s’adresser aux jeunes sur des sujets de santé publique (prévention, démarches, réflexes) lorsque l’on est une entité connue de tous les Français, mais que l’on attend pas forcément sur cette cible réputée difficile à atteindre ? C’est le défi relevé par l’Assurance Maladie avec le dispositif Mes Tips Santé, soit un média lancé sur Instagram avec Ici Barbès et un roadshow qui sillonne les routes à la rencontre des 18-25.
Un succès que nous raconte, Stéphane Fouquet, responsable du département campagnes et promotion de la Cnam (Caisse nationale de l’Assurance Maladie).
L’Assurance Maladie est un service qui accompagne de nombreux Français tout au long de vie. Quel est son principal défi en termes de communication aujourd’hui ?
Stéphane Fouquet : L’Assurance Maladie conduit des campagnes d’information et de communication sur des grands sujets de santé publique, avec un objectif de prévention et de réduction des risques en matière de santé : l’incitation à la vaccination contre la grippe par exemple ou encore la campagne de sensibilisation sur les signaux d’alerte de l’insuffisance cardiaque, lancée en 2022 (en France, 1,5 million de personnes en souffrent, principalement de +60 ans, une grande partie est mal ou peu diagnostiquée). C’est un véritable enjeu de santé publique dans le diagnostic et donc la réduction des coûts à long terme.
Par ailleurs, le développement du numérique dans le secteur de la santé exige que nous accompagnions les assurés et les professionnels des systèmes de santé. Ainsi, nous communiquons beaucoup sur ces nouveaux outils numériques permettant notamment de faciliter l’accès aux soins : en 2022, nous avons lancé “Mon espace santé”, le carnet de santé numérique des Français, et d’autres projets sont à venir comme l’application carte Vitale pour dématérialiser cet objet bien connu des Français.
Enfin, au-delà de ces sujets d’accès aux soins, garantir la pérennité de notre système de santé constitue un de nos enjeux majeurs. Chacun doit être conscient de son rôle au sein du système de santé. Nous allons ainsi lancer – à l’automne – une campagne sur le bon usage du système de santé, pour sensibiliser à la problématique des rendez-vous médicaux non honorés ou l’importance d’emporter avec soi sa carte vitale lors d’un rdv médical.
Parlez-nous de la campagne « Mes tips santé ». Quel en était l’objectif principal et le public visé ?
S.F. : Mes Tips Santé est l’incarnation d’un dispositif au long cours. En 2019, le régime étudiant a été supprimé et ce public, totalement nouveau pour nous, a dans sa grande majorité intégré le régime général de l’Assurance Maladie. Nous avons donc développé un dispositif global d’information destiné aux 18-25 ans afin de nouer, avec eux, dès 18 ans une relation qui se poursuivra dans le futur. À 18 ans, on n’a pas forcément conscience de toutes les démarches à entreprendre en matière de santé, ce sont souvent les parents qui gèrent cela.
Nous avons développé plusieurs volets dont les premiers étaient une newsletter d’information, appelée Mes tips santé, ainsi qu’une campagne média diffusée tous les ans au mois de septembre pour les informer sur les démarches à effectuer quand ils deviennent des assurés majeurs (ouvrir son compte ameli, déclarer son médecin traitant, mettre à jour CV, transmettre son RIB, etc.). Nous avons également outillé notre réseau de caisses d’assurance maladie sur le terrain pour aller à la rencontre de ces jeunes lors d’événements, de salons, via des partenaires. Nous avons aussi ajouté une nouvelle brique l’année dernière avec la création d’un compte Instagram : “Mes Tips Santé” délivre une information régulière sur un canal très utilisé par les 18-25 ans.
Enfin, fin mai, nous avons lancé un roadshow avec le bus Mes Tips Santé qui compte une trentaine d’étapes en 2023 : 13 premières villes ont accueilli le bus Mes tips santé au printemps avec un final au festival Solidays, et 16 nouvelles étapes sont prévues de mi-septembre à mi-octobre, notamment sur les campus universitaires. C’est une rematérialisation de la relation qui nous met au contact des jeunes sur le terrain.
Pourriez-vous nous expliquer ce qui a été mis en place autour de « Mes Tips Santé » ? Comment vous êtes-vous assurés d’utiliser le ton juste pour aborder des questions de santé avec un jeune public ?
S.F. : C’est un vrai défi, notamment pour trouver les bons canaux. Nous nous sommes évidemment déployés sur les réseaux sociaux comme Instagram, puisque c’est un de leurs principaux médias d’information.
Dans notre campagne média sur les bons réflexes, nous avons également investi les médias sociaux différemment en faisant appel à des influenceurs pour partager, avec leur tonalité et leur style, des tips et bons réflexes santé. L’année dernière, cette campagne a généré + de 3 millions de vues en organique.
Nous allons à la fois chercher les codes des jeunes en travaillant avec des influenceurs, tout en nous appropriant ces mêmes codes et les tendances du moment, dans nos écrits et visuels, en veillant à ne pas être caricatural, pour faire passer nos messages.
Comment mesurez-vous l’impact de « Mes tips santé » ? Quels ont été les premiers retours/résultats de cette campagne ?
S.F. : Nous analysons les statistiques, comme sur le compte Instagram où nous avons un nombre croissant d’abonnés, notamment dernièrement avec le roadshow “Mes Tips Santé”, qui a fait bondir le nombre de nos abonnés au compte à + de 11,7K followers un an après sa création.
Le nombre de vues et interactions de nos publications sont également mesurées : notre taux d’interaction moyen sur les 6 derniers mois est de 3,44%. Ce qui n’est pas négligeable, cela montre qu’il y a de l’interaction avec nos contenus, que ce soit des likes, des commentaires et des réponses à des questionnaires dans les stories.
Sur le roadshow spécifiquement, une évaluation a été mise en place auprès du panel de participants : le taux de satisfaction est de 70% pour “génial” et grimpe à 99% si on ajoute les “bien”. Les jeunes sont particulièrement intéressés par les sujets de prévention santé et apprécient particulièrement les événements ludiques.
Ensuite, ils sont 18% a déclaré avoir téléchargé l’application “Mon espace santé” lors de l’événement et 14% à y avoir ouvert un compte. En outre, l’image de l’Assurance Maladie a été mesurée à l’issue de ce roadshow, elle bénéficie d’un score de 8,7/10, quand le baromètre image de l’Assurance maladie sur l’ensemble de la population est de 7,3/10 (données 2021).
Enfin, il nous arrive parfois d’être surpris, comme c’est le cas avec le taux d’ouverture d’environ 50% des newsletters que nous envoyons aux jeunes alors même qu’ils ont la réputation de ne pas ouvrir leurs mails…
C’est sans doute le signe que nous avons réussi à trouver des codes et des moyens efficaces pour leur délivrer des messages qu’ils jugent utiles pour leur santé.
Quelle est l’étape d’après pour “Mes Tips Santé” ?
S.F. : Dans un premier temps, continuer à faire vivre le compte Instagram, car cela représente beaucoup de travail. Ensuite, la 2e tournée du roadshow débute mi-septembre jusqu’à mi-octobre dans le sud de la France entre autres à Marseille, Nice, Toulouse, La Rochelle, Villeurbanne…
Cet événement va nous permettre d’enrichir le contenu du compte Instagram “Mes Tips Santé” avec les questions et les messages qui nous seront laissés par les jeunes dans le bus. Enfin, dans le cadre de la campagne “Les bons réflexes”, nous allons collaborer avec trois créateurs de contenus sur TikTok qui vont partager aux jeunes de 18 à 25 ans des bons conseils pour les aider à bien gérer leur santé.
Avec quelles agences travaillez-vous ?
S.F. : Avec l’agence Ici Barbès pour l’animation du compte Instagram “Mes Tips Santé” et ce, depuis plusieurs années ; avec un groupement d’agences du groupe TBWA sur le dispositif roadshow et la campagne média “Les bons réflexes”, les Présidents et Auditoire Shopper; et avec Dentsu Public sur la partie influence et achat d’espaces publicitaires.
La crise sanitaire de la COVID-19 a-t-elle influencé la mise en œuvre de la campagne « Mes Tips Santé » ?
S.F. : Le projet a été lancé en 2019, donc la crise sanitaire n’a pas vraiment eu d’impact sur son déploiement. Au contraire, ce canal d’information nous a permis de leur diffuser des messages sur la situation sanitaire en temps réel et d’accompagner ces jeunes dans un moment difficile pour tout le monde et en particulier pour eux.
Lors de la pandémie, les informations “santé” étaient très débattues, voire remises en cause. Quels sont les défis spécifiques que vous rencontrez en communiquant sur des sujets de santé publique, et comment les surmontez-vous ?
S.F. : De façon générale, en matière de santé publique notamment, notre communication s’appuie sur des informations sourcées et validées scientifiquement par des experts ou des institutions telles que la HAS (Haute autorité de santé) ou l’ANSM (Agence de sécurité du médicament). Comme tous les acteurs publics, nous sommes confrontés à des fake news et nous sommes vigilants à pouvoir y répondre de manière objective et scientifique.
Par ailleurs, lorsque l’Assurance Maladie parle, nous savons qu’elle bénéficie d’un bonus de caution dans la réception de ses messages, comme certaines études nous l’ont montré. En termes de crédibilité et de réception du message, nous gagnons 5 à 10 points par rapport à d’autres acteurs, notamment privés. C’est un atout sur lequel nous pouvons nous appuyer.
Au-delà, un des principaux défis de la communication sur des sujets de santé publique, c’est d’arriver à l’inscrire de façon percutante, et renouvelée, dans la durée pour accompagner les changements de comportements des patients et du grand public. C’est en effet un processus de long terme qui nécessite non seulement d’émerger au moment des campagnes de sensibilisation, mais aussi de sans cesse rappeler les messages sans effet de lassitude. Bref, il faut savoir se renouveler tout en poursuivant une communication de longue haleine.
Question traditionnelle de la rubrique parole d’annonceur : quel est le secret d’une relation annonceur-agence réussie ?
S.F. : La confiance, l’ouverture et la capacité à pouvoir échanger sur les propositions dans un sens comme dans l’autre. Pour l’annonceur, être à l’écoute et accepter d’être bousculé, surpris et à l’inverse que notre agence sache écouter les contraintes inhérentes à une institution comme la nôtre, d’autant plus sur des sujets médicaux. Ces contraintes là peuvent parfois être difficiles pour une agence, mais ce n’est jamais qu’un défi pour être plus créatif.