L’IA va-t-elle sauver le marketing relationnel… et l’environnement ?

Par Élodie C. le 28/10/2019

Temps de lecture : 7 min

Objectif : 100 % de taux d’ouverture.

Et si l’intelligence artificielle, en plus de nous faire gagner un temps de plus en plus précieux (le fameux “Time is money”), permettait de répondre à des enjeux environnementaux d’économie d’énergie ? C’est le parti pris d’Amaury de Larauze et Arnaud Becker, les fondateurs de Kiliba, une solution de marketing automation écologique qui vise le 100% de taux d’ouverture. Un outil riche de promesses alors que l’empreinte carbone d’un spam est de 0,3 gramme de CO2 et que l’énergie consommée par leur traitement équivaudrait à celle produite par quatre grandes centrales au charbon récentes (17 millions de tonnes de CO2). Amaury de Larauze, directeur associé de Kiliba, nous explique comment il entend faire du spam un vieux souvenir en personnalisant toujours plus la communication entre marques et consommateurs, dans cette nouvelle interview Jeunes Loups.

Pourquoi avoir lancé récemment Kiliba, une “solution de marketing automation écologique” ?

Amaury de Larauze : Plusieurs raisons. Cela fait dix ans que je travaille dans l’e-mail marketing avec Arnaud, mon associé : nous nous sommes rendu compte qu’il n’était pas si simple de mettre en place de l’automation marketing pour les marketeurs. Kiliba s’est conçue en réponse à cette “douleur” du marché.

Ensuite, en 10 ans, personne ne m’a jamais dit : “J’adore les newsletters, je les lis toutes, je trouve cela passionnant”. À l’inverse, les retours de mon entourage n’étaient pas très positifs et pointaient une certaine lassitude d’en recevoir en trop grande quantité. Globalement, et c’est un constat, les internautes ne sont pas pleinement satisfaits des newsletters qu’ils reçoivent, alors que l’e-mail marketing reste le canal le plus efficace pour communiquer avec les marques. En tant qu’acteur de l’industrie, nous nous sommes demandé si nous pouvions améliorer les choses.

Enfin, Arnaud et moi avons respectivement 34 et 35 ans, nous ne pouvons plus nier les aspects écologiques et environnementaux, or l’e-mail marketing est une industrie polluante. Les e-mails envoyés et stockés dans les boîtes de messageries demandent beaucoup d’énergie aux data centers qui les hébergent. En partant de ces trois constats-là, nous souhaitions répondre à une problématique des marketeurs, tout en arrêtant d’embêter les internautes avec des contenus non pertinents pour eux. L’objectif final étant d’atteindre les 100% d’ouverture. En envoyant moins d’e-mails, mais beaucoup mieux ciblés, les messageries seront moins engorgées et énergivores.

Les moyennes d’ouverture en France sont assez stables depuis un certain nombre d’années, entre 15-20% d’ouverture en moyenne, avec des taux de clics de 1 à 3%. Avec Kiliba, nous triplons déjà cette ouverture (58%).

L’e-mailing constitue-t-il selon vous l’outil le plus efficace dans une stratégie digitale de conversion et de fidélisation des clients ?

AD : Ce serait trop prétentieux de le dire, c’est toutefois un canal privilégié. Il vient en complément de tous les autres canaux. Un site e-commerce ne peut pas uniquement se reposer sur de l’e-mailing et se passer de référencement naturel, Google Ads, de display, de réseaux sociaux, etc. Le canal e-mail est un peu une pierre angulaire de la communication digitale, mais ce n’est pas le canal unique du marketing relationnel.

Le taux d’ouverture des e-mailings de vos clients est de 58% en moyenne, contre 15-18% en moyenne pour une campagne classique. Vous visez le 100% d’ouverture. Comment expliquez-vous un tel écart ? Et comment comptez-vous progresser ?

AD : Depuis deux ans, nous nous appuyons sur des algorithmes d’intelligence artificielle qui déterminent les messages à envoyer aux bonnes personnes, avec les bons produits. C’est-à-dire pertinents pour elles au regard de leur profil consommateur. Les algorithmes définissent à qui et quand envoyer le message commercial. Lorsqu’un marketeur réfléchit au segment qu’il va pouvoir cibler sur un marché de TPE/ PME, il n’a pas la puissance mathématique d’une IA pour analyser l’ensemble de sa base de données et les comportements de ses clients sur le site. Grâce aux algorithmes développés par nos data scientists, nous pouvons envoyer beaucoup moins d’e-mails, mieux ciblés et plus pertinents, ce qui génère un meilleur taux d’ouverture et taux de clic.

Comment entendons-nousnous atteindre notre objectif de 100% ? En continuant de travailler d’arrache-pied sur nos algorithmes pour qu’ils apprennent d’eux-mêmes et affinent toujours plus leurs envois d’e-mails aux gens qui les ouvriront. Le défi est de taille évidemment, il est ambitieux, mais tout à fait jouable. Tout le sujet est de déterminer comment agréger les datas pour cibler les bonnes personnes. Derrière cette intelligence artificielle, ce n’est ni plus ni moins que des mathématiques et des statistiques.

Comment s’assurer que l’IA émette des messages pertinents, personnalisés et en phase avec les attentes de l’audience ?

AD : Notre intelligence artificielle s’appuie sur de la donnée analytique (dans le back-office du client) recueillie sur PrestaShop, ensuite nous nous basons sur des données comportementales : ce que le client a vu, ce qu’il a acheté, ce sur quoi il a cliqué dans un e-mail, etc. Le mix de ces données permet aux algorithmes de mieux cibler le client final.

Pour ce qui est du contenu, les algorithmes établissent des personas, c’est-à-dire des personnes qui ont un profil comportemental similaire. Si l’une d’elles a regardé un ou plusieurs produits en particulier qu’une autre n’a pas vu, les algorithmes vont pousser ce produit dans le message à transmettre. Chaque message est totalement différent, car personnalisé par rapport au comportement de l’internaute.

Pourquoi ne pas favoriser un mix entre e-mailings faits à la main, mais riches en contenu différenciant, et automatiser ce qui est plus transactionnel (à la perf) ?

AD : Pour une raison simple : la problématique à laquelle nous voulons répondre a trait au manque de temps de nos clients pour faire de l’e-mailing avancé. Autant l’automatisation marketing est longue à mettre en place pour les marketeurs et demande des moyens financiers, autant en envoyant votre newsletter dans une full base [à toute la base d’inscrits, NDLR], vous faites exactement ce que l’internaute ne veut pas. L’internaute désire des e-mails extrêmement personnalisés par rapport à son propre comportement. Pour cela, les algorithmes doivent tourner en permanence pour déterminer le moment le plus propice pour envoyer le message. L’humain ne peut pas faire ça. Nos clients n’ont rien à faire et n’ont pas besoin de compétences particulières dans l’e-mailing. Ils peuvent se concentrer sur d’autres tâches et laisser faire Kiliba.

Toutes les marques ont-elles vocation à utiliser une solution comment la vôtre ?

AD : Nous nous adressons aux e-commerçants. Ceux qui ne communiquent pas encore par e-mail, car ils n’ont pas le temps et ceux qui communiquent par e-mail, mais de manière très basique, ont intérêt à utiliser notre solution. Certains de nos clients utilisent des solutions d’e-mails marketing avancées, mais parce qu’ils n’ont jamais pris le temps ou qu’ils n’arrivent pas à mettre en place des scénarios complexes, exploitent également Kiliba en complément de leur solution classique pour opérer une accélération.

Est-ce que cette solution pourrait accompagner des marques – qui ne vendent pas encore en e-commerce – dans leurs projets e-commerce ?

AD : Ceux qui se lancent dans le e-commerce peuvent évidemment utiliser Kiliba à condition que leur CMS soit PrestaShop aujourd’hui : nous ne travaillons qu’avec eux pour le moment. En 2020 nous utiliserons également Shopify, WooCommerce (WordPress) et Magento. Un e-commercant qui se lance pourra activer des scénarios qu’il n’aurait pu activer sans Kiliba. La seule limite ? Une certaine volumétrie pour que les algorithmes puissent tourner suffisamment.

Comment se démarquer si tout le monde automatise des offres avec des IA similaires ?

AD : Aujourd’hui, la différence fondamentale entre nous et d’autres acteurs qui font de la segmentation, c’est que Kiliba est le seul outil qui génère un message commercial de A à Z (conception, rédaction, push produit et diffusion), sans besoin d’intervention humaine : en 10 minutes, l’outil permet d’activer 8 solutions de marketing automation. C’est une véritable rupture technologique et une innovation dans notre secteur. Depuis 20 ans que l’e-mail marketing existe, une telle situation ne s’était jamais produite.

Certains outils s’appuyant sur de l’IA sont très performants pour aller chercher des segments très poussés, mais cela demande aux marketeurs de créer autant d’e-mail en retour. Et sur le marché des TPE/PME, le temps est précieux, ces outils ne sont donc pas adaptés à notre secteur d’activité.

Comment imaginez-vous l’avenir du marketing relationnel ? L’IA restera-t-elle au centre des solutions proposées ?

AD : Je crois beaucoup à l’émergence d’une prise de conscience écologique dans le marketing relationnel et à ce symbole “AI for good”. Il faut utiliser l’intelligence artificielle pour le bien commun et faire en sorte de s’appuyer sur cette technologie pour répondre à cette problématique environnementale que plus personne ne peut nier. Nous, humbles marketeurs que nous sommes, n’y arriverons pas tout seuls. C’est une véritable opportunité d’assister à la montée en puissance drastique de l’IA, car nous pourrons nous appuyer dessus pour résoudre les problématiques de demain et répondre aux enjeux environnementaux actuels. L’avenir se fera avec l’IA, mais pour le bien commun.

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