Et si l’IA disruptait aussi les CDP ? Le pari de Datacook

Par Xuoan D. le 04/09/2024

Temps de lecture : 7 min

Pour anticiper un comportement client avant même la première vente.

La startup Datacook se positionne comme le leader français de l’IA marketing. Cette promesse nous a intrigués. Comment une startup française de 8 personnes et ayant levé 1 million d’euros il y a un an peut-elle revendiquer un tel leadership ? D’autant que sur le marché des solutions data, et plus précisément des CDP, les mastodontes ne manquent pas : Adobe, Microsoft, Salesforce, sans oublier des acteurs plus récents comme Commander Act, Eulerian, Mediarithmics ou Segment.

L’avantage pour une solution née récemment, c’est qu’elle n’a ni dette technique ni poids du portfolio client. Elle est libre de s’inscrire dans l’air du temps. Et cela tombe bien, l’époque toute récente est à l’accélération grâce à l’IA. Datacook serait-elle la première CDP réellement « AI-native » ? L’IA va-t-elle changer la vie des directions marketing, mais aussi des DSI et des data scientists ? Comment Datacook se différencie de la concurrence ?

Réponses dans cette interview d’Élodie Vaillant, CEO et co-fondatrice, pour la Réclame .mark&tech.

Vous avez précédemment fondé un cabinet conseil. Qu’est-ce qui vous a amené à créer ensuite Datacook ?

Élodie Vaillant : Lors de nos années de conseil, nous avons observé, Baptiste et moi, qu’il y avait des demandes qui étaient récurrentes et pour lesquelles il n’y avait pas forcément d’offres existantes sur le marché. C’est ce qui nous a mené à imaginer et à créer Datacook.

Quel est le cas d’usage le plus fréquent de votre solution ? 

É.V. : Nos clients e-commerçants et retailers automatisent leurs relances clients en fonction de leur momentum de repeat.

Prenez par exemple des biens de consommations qui se vendent dans des boites : des gélules, des lentilles ou des consommables. Au bout d’un moment, il faut remplacer la boite. Mais quand ? Dans les faits, l’usage est complètement différent d’une personne à l’autre. Certains vont consommer les produits régulièrement et les remplacer à intervalle régulier (en s’abonnant ?) D’autres vont vider la moitié de la boite, et puis… plus rien. Tout cela, cela se score. 

Le score se calcule en fonction de l’historique du client dès la première vente ou en fonction de probabilités pour un profil consommateur donné ?

É.V. : Nous savons calculer un tel score avant même la première vente. L’algorithme apprend de l’ensemble de la population de clientèle. Il se nourrit également de la façon dont vous avez acheté, le jour, l’heure, le canal, la typologie de produit, si il y avait une promo, etc. Et c’est ça qui permet au score de prédire votre timing de repeat. Le score s’ajuste ensuite en fonction de vos propres comportements. 

Un autre cas d’usage ? 

É.V. : Il y en a beaucoup. Il y a les cas d’usage anti-churn [anti perte de clients, NDLR]. Là aussi, nous anticipons la rétention et ce sont des triggers [déclenchements, NDLR], des boucles qui s’adossent au score de churn. Par exemple, un client dont le risque de churn est élévé et qui se promène sur le site d’une marque, il va être identifié par l’IA de Datacook. Il sera retargeté automatiquement, soit par des campagnes email, soit sur les réseaux sociaux.

Nous avons des scores de valeur. Quand on identifie des profils un peu atypiques mais qui tirent une partie du chiffre d’affaires, ces personnes-là sont dorlotées avec des cycle et, des parcours spécifiques. 

Il y a aussi le score d’appétence à la promotion. Cela ne sert à rien d’envoyer du SMS promotionnel et de dépenser à fond sur toute la base. Il vaut mieux cibler uniquement les clients pour qui la promotion a du sens. Avec un tel score, on a observé des gains de marge qui vont jusqu’à +26 % tout en conservant la quasi-totalité du chiffre d’affaires. On réduit ainsi les dépenses inutiles.


Côtédonnées, vous adressez à tout type de clients ou c’est quand même des entreprises qui ont un minimum de données first-party? 

É.V. : Le cœur du réacteur de Datacook, ce sont les données transactionnelles.

Et si je suis une marque de grande conso par exemple, qui ne vend pas en direct et qui n’a donc pas de données transactionnelles ?

É.V. : Une marque de grande conso aura tout de même des enjeux de connaissances clients avec un programme CRM, des données de navigation web, des données de campagnes média…

Datacook sait collecter des données de formats et de sources très différentes.

Est-ce de la donnée anonyme ou de la donnée client? 

É.V. : Il s’agit de donnée pseudonymisée. Nous travaillons avec des données qui nous permettent de réconcilier un client qui utilise plusieurs devices, plusieurs canaux, en boutique, qui appelle le call center, qui se promène sur le site. La CDP est en capacité de suivre ce client sur l’ensemble des canaux où il se promène. Techniquement, sur les serveurs, il n’y a pas de Michel Dupont qui se promène. Toutes les données sont pseudonymisées, et c’est ce procédé qui nous permet d’être en conformité vis-à-vis du RGPD.

Comment votre CDP se différencie-t-elle sur ce marché où la concurrence ne manque pas, notamment de grands acteurs de la tech ?

É.V. : Datacook est l’une des seules CDP, si ce n’est la seule, qui s’appuie vraiment sur l’intelligence artificielle. Cet atout fait la différence au niveau de l’intégration.

Avec une CDP, habituellement, soit c’est l’éditeur qui l’intègre pour vous. Soit vous devez faire appel à un intégrateur. C’est une personne ou une équipe qui va passer 3 mois à un an à installer la CDP et à la connecter manuellement à vos différentes sources de données. Le chantier est de taille,  vous mettez le bras dans un tunnel, vous ne savez pas quand est-ce que vous en sortirez. Ni combien cela coûtera à la fin.

Notre conviction est qu’en 2024, l’intégration d’une CDP est une mission trop rébarbative qui ne fait pas honneur à la valeur ajoutée de l’humain. L’IA doit pouvoir se charger de cela, et c’est ce que nous proposons avec Datacook. Nos algorithmes d’AI recognition auto-intègrent notre CDP dans l’environnement du client. Les champs et les tables des données sont reconnus automatiquement, c’est un gain de temps immense. Cette partie-là d’interfacage, d’intégration, de reconnaissance, au moment de l’intégration, elle fait gagner un temps considérable. Évidemment, nous vérifons ce que l’IA fait lors de ce processus. Mais on se concentre sur ce temps court et très qualitatif où l’expertise humaine fait la différence.

L’IA nous permet d’être la seule CDP du marché à proposer un test. En moyenne, en un mois et demi, la CDP est opérationnelle, elle tourne, et donc en un mois et demi, sur des grands comptes, on a des clients qui testent la CDP Datacook avec des cas d’usage très simples, mais sur lesquels il y a déjà du ROI associé. 

Nous avons échangé avec un grand acteur du football que je ne vais pas citer, mais vous le connaissez obligatoirement. Ils avaient fait un appel d’offre et sollicité 40 éditeurs de CDP. Ils nous ont confié que sur les 40, nous étions les seuls à pousser l’IA à ce point-là, et surtout, à proposer ce test.

La CDP Datacook s’installe donc sans intégrateur ? Dans tous les cas ?

É.V. : Tout à fait !

Pouvez-vous nous en dire plus sur votre module Gen AI ?

É.V. : Aujourd’hui au sein des entreprises, nombre de métiers de tiers pour accéder à la data. L’équipe marketing va se demander “Quelle est la tendance de comportement de mes clients ?” “Est-ce que ma nouvelle gamme de produits fonctionne bien ?” Et pour cela, elle doit s’adresser à Jean-Michel, data analyst, ou à Jean-Claude de la DSI. Cela sature les demandes de bas niveau et personne ne progresse au final, car face aux délais de réponse, l’équipe marketing va se limiter dans sa quête de la connaissance client.

Pour contrer cette situation, le module Gen AI permet à l’équipe métier de faire sa demande en langage naturel. Et l’IA répond à la demande avec un graphique, une explication analytique, une préconisation et l’export qui va bien. Cela change totalement la donne. 

On désengorge ainsi les équipes data en les délestant des demandes qui sont vraiment rébarbatives à traiter. Et on apporte du confort et de la réceptivité à l’équipe marketing.

Je vois nombre de concurrents qui s’y essaient, mais cela dépasse rarement l’étape des slides à ce stade. Notre solution Gen AI est quant à elle pleinement opérationnelle.

Est-ce qu’il y a un grand défi actuellement à résoudre sur votre secteur ? 

É.V. : Le sujet qui occupe tous les esprits, c’est l’IA. Les gens en ont peur. Ils se demandent si l’IA va les manger tout cru et les remplacer. Alors qu’au contraire, l’IA va leur permettre de ne plus consacrer de temps aux travaux rébarbatifs et pénibles pour se concentrer sur ce qui a de la valeur. Un data analyst aujourd’hui est submergé par des requêtes toutes semblables à une petite nuance à chaque fois. L’IA sait très bien gérer cela, à condition d’être parfaitement entraînée pour le secteur concerné. ChatGPT a comme promesse qu’il sait tout faire, mais il n’est expert de rien. Notre métier aujourd’hui est d’entraîner l’IA avec notre expertise marketing et data.

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